Incompréhension entre Jésus et sa famille

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Chers amis, proches et lointains,

Vous n'avez pas tous vu Natacha, Mélanie et Loïc, les jeunes flûtistes de tout à l'heure, mais vous les avez tous entendus, du moins je l'espère. C'est étonnant de constater que des souffles si légers donnent des sons si purs. Une musique merveilleuse, divine. Comme si Dieu lui-même habitait ces trois enfants et nous parlait à travers eux et leurs instruments.

Ca me rappelle ce conte hindou, rapporté par un ami. Il fut un temps, dans un pays très éloigné, où tous les humains étaient des dieux. C’aurait pu être merveilleux, mais ça ne l'était pas du tout : ils n'arrêtaient pas de se chamailler, de se battre de plus en plus violemment. Ils faillirent même s'entretuer...

C'est alors que Brahma, le maître des dieux, décida d'intervenir : il fallait à tout prix faire disparaître la divinité de ces gens et la cacher si bien qu'ils ne puissent plus jamais la trouver !

Où les hommes n'auraient-ils pas l'idée d'aller chercher Dieu, demanda-t-il à l'assemblée des dieux mineurs ? Dans la terre ? L'enterrer tout au fond de la terre ? Les hommes auraient sûrement l'idée de creuser (les enfants déjà aiment bien faire des grands trous dans la terre!); ils inventeront certainement de puissantes machines, des foreuses, pour aller creuser des galeries, des puits, pour atteindre le fond de la terre. Et ils trouveraient la divinité ! Non, pas dans la terre ! Dans la mer ? La plonger tout au fond de la mer ? Les hommes auront certainement l'idée d'explorer un jour le fond des mers, se dit Brahma, le maître des dieux, ils inventeront toutes sortes d'engins sous-marins : bathyscaphes, mésoscaphes, sous-marins nucléaires et autres monstres marins pour descendre tout au fond des mers. Et ils trouveraient la divinité ! Non, pas dans la mer ! Dans le ciel ? La percher tout là-haut dans le ciel ?

Les hommes auront certainement l'idée de s'envoler dans les airs et de s'aventurer dans les espaces intersidéraux. Ils inventeront des objets volants - identifiés ou non - avions, fusées interplanétaires, interstellaires et ils finiront bien par trouver Dieu dans le ciel ! Non, surtout pas dans le ciel ! Il y aura bien un seul endroit, se dit finalement Brahma, le maître des dieux, où les humains n'auront pas l'idée d'aller chercher Dieu, mais pas du tout : je vais le cacher tout au fond de leur coeur. C'est bien le seul endroit où ils ne le trouveront jamais.

Et pourtant, le grand dieu Brahma, le maître des dieux, se trompait, et les dieux mineurs avec lui. Des hommes eurent l'idée d'aller chercher Dieu tout au fond de leur coeur. Des prophètes - comme Jérémie ou Ezéchiel - eurent la révélation que le Dieu vivant mettrait son Esprit dans leur coeur. Mais les autres ne les crurent pas et pendant longtemps, ils continuèrent à chercher Dieu dans la terre, dans la mer ou dans le ciel : il n'y était pas. Il fallut attendre encore longtemps pour qu'un homme se présente aux autres humains : il ne faisait pas qu'annoncer que Dieu mettrait son Esprit dans leur coeur. Il était lui-même ce qu'il disait, il était rempli de l'Esprit de Dieu. Il était le Fils de Dieu, Jésus de Nazareth.

Pensez-vous qu'ils l'ont cru ? qu'ils lui ont fait confiance ? qu'ils ont adhéré à sa personne ? Certains oui, par moments, comme les disciples. D'autres pas, pendant très longtemps, comme sa famille.

Dimanche dernier, ici même, le pasteur Virgile Rochat nous a fait rencontrer Joseph, le père adoptif de Jésus, très secoué après la fugue de son fils. Pensez-vous, un gamin de douze ans qui se permet de quitter ses parents, sans rien dire, pendant trois jours, et pour quoi faire ? Pour aller parler théologie dans le Temple de Jérusalem avec les savants. Celui-là, il va mal tourner, pensa Joseph ! "Pourtant Jésus progressait en sagesse et en taille, et en faveur auprès de Dieu et des hommes" (Luc 2 : 52).

Et voilà qu'aujourd'hui nous retrouvons sa mère et ses frères qui se font du mauvais sang à cause de lui. Ils apprennent qu'il est surmené, au point de n'avoir pas le temps de manger ! A la tête de sa nouvelle entreprise avec ses douze collaborateurs récemment embauchés, il n'a pas une minute à soi. "Il a perdu la tête! "Il est complètement parti!" Ils ont fait tout le chemin de Nazareth à Capernaüm (au moins 30 km. ) pour venir lui mettre la main dessus. Ce fils, ce frère leur fait peur, il va lui arriver un malheur, déjà que les autorités trouvent qu'il en fait un peu trop pour les pauvres, les étrangers et les gens de mauvaise fréquentation...

L'esprit de famille joue à fond : tout le monde s'est déplacé comme pour venir au chevet d'un mourant : "Docteur, croyez-vous qu'il va s'en sortir ?

Avec Jésus, il n'y a vraisemblablement pas beaucoup d'espoir, parce que lui, l'esprit de famille, ça ne lui fait ni chaud ni froid. Ou plutôt si : il remplace l'esprit de famille, par la famille de l'Esprit, la famille spirituelle, celle qui est issue de son Père céleste. Après avoir jeté un regard circulaire sur celles et ceux qui l'entouraient, il dit : "Ma mère, mes frères sont ici. Car celle ou celui qui fait ce que Dieu veut est mon frère, ma soeur ou ma mère" (Marc 3 : 35). "Oui nous faisons partie de la famille de Dieu, des héritiers du Père. Nous partageons nos biens, nos joies et nos fardeaux. Nous sommes soeurs et frères", comme le chante le No 218 du JEM.

Comme dans le cas de Jésus, ce passage de la famille biologique à la famille spirituelle, même aujourd'hui, ne se fait pas toujours sans mal, sans heurt, sans tension. Nous le constatons parfois dans nos propres familles ou autour de nous : "il ou elle s'est fait embobiner", "elle a perdu la tête", "il est perdu pour la société"!

(Soyons clairs : je ne parle pas ici des cas extrêmes - malheureusement trop nombreux - de fanatiques ou d'escrocs qui embrigadent des gens sous la menace de la colère de Dieu s'ils ne se convertissent pas à leurs idées. Nous les dénonçons!)

Ceux dont nous parlons , ce sont celles et ceux qui adhèrent librement à Jésus, le Christ, le Fils du Dieu vivant, qui veut faire de nous des personnes à part entière, des êtres libres. "Quand je vous aurai quittés, dit Jésus, je vous enverrai mon esprit, l'Esprit de vérité, qui vous conduira dans toute la vérité" (Jean 16 : 1ss). Et la vérité vous rendra libres. Cet Esprit, manifesté à la Pentecôte, est puissant, il est agissant, il s'empare de toutes celles et ceux que le Père à choisis. Ce peut être une famille entière. Ce peut être tel ou tel membre de la famille. Par exemple, cet enfant de dix ans, émerveillé par la bonté de Dieu, qui s'approche de sa monitrice, puis de son pasteur et lui dit :"Je voudrais être baptisé !" Bonne idée, et pourquoi ? Parce que j'aime Jésus ! Un tel enfant a besoin de l'appui de ses parents pour grandir dans cette foi, pour faire mûrir le grain, pour s'épanouir dans la joie, au grand soleil de l'Esprit.

Ce n'est pas toujours le cas, et l'épisode de Jésus avec sa famille est édifiant : les situations d'incompréhension sont fréquentes, aujourd'hui comme alors. Je me rappelle aussi cette mère, à qui je disais mon admiration pour le chemin de foi parcouru par sa fille de dix-sept ans qui demandait le baptême, au terme de sa période de catéchisme : "Ne pensez pas, Monsieur le pasteur que ma fille est croyante. Elle demande le baptême uniquement pour me faire plaisir, à moi sa mère".

Et l'enfant de dix ans qui avait demandé le baptême ? Une voisine lui demanda, quelques mois plus tard : "Alors le pasteur n'a pas voulu te baptiser ?" Ce n'est pas lui, c'est mes parents qui m'ont interdit !

Avant de conclure, laissez-moi vous rappeler ce passage poétique de Kalil Gibran, dans "Le Prophète" :

"Vos enfants ne sont pas vos enfants.
Ils sont les fils et les filles de l'appel de la Vie à elle-même.
Ils viennent à travers vous, mais non de vous.
Et bien qu'ils soient avec vous, ils ne vous appartiennent pas".

C'est ce que Dieu a dit quand il a affirmé par les prophètes : "Je graverai mes instructions dans leur coeur (...) Aucun d'eux n'aura plus besoin de s'adresser à ses compagnons, à ses frères, pour leur enseigner à me connaître, car tous me connaîtront, déclare le Seigneur, tous, du plus petit jusqu'au plus grand" (Jérémie 31 : 33-34).

Jésus, le Christ, se révèle personnellement à chacune et à tous. Il fait de nos corps le temple de son Esprit, et nous entraîne à le suivre, pour notre plus grand bonheur, jusque dans son Royaume.

Dans le cours de notre marche, nous sommes amenés à rencontrer des hommes, des femmes, des enfants : tout près de nous, les nôtres, dans nos familles humaines ; tout près de nous , dans nos communautés paroissiales ou de foi, dans nos familles spirituelles; et aussi plus loin : des proches voisins, des étrangers, des gens passionnants ou exécrables, des gens bizarres...

Des hommes, des femmes, des enfants, comme le Christ, comme nous, habités par l'Esprit de Dieu - qu'ils le sachent ou non ! Et nous, nous le savons, depuis que nous l'a révélé le Maître de la parabole du Jugement dernier (Matthieu 25 : 31 ss) : "Toutes les fois que vous l'avez fait <nourri, accueilli, habillé, visité, aimé > à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait".

Amen.

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