La paix soit avec vous !

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Frères et sœurs, amis auditeurs de la radio ou amis présents dans cette chapelle, j'aimerais vous saluer ce matin avec les paroles du Christ ressuscité : la paix soit avec vous !
L'actualité internationale pourrait rendre déplacée une telle salutation. Comment parler de paix, annoncer la paix, alors que le monde parle de guerre ? Ce matin pourtant, c'est l'innocent torturé, la victime des bourreaux et des soldats, qui vient nous dire : la paix soit avec vous ! Trois fois, dans ce passage, revient cette salutation de Jésus. La paix est une conséquence de la venue de Jésus au milieu de ses disciples.
Après la mort de Jésus, ses amis ont connu la terreur. Ils n'étaient en paix ni avec eux-mêmes - ils avaient pour la plupart laissé tomber leur Maître - ni avec leur entourage. Par crainte des Juifs, les portes de la maison où se trouvaient les disciples étaient verrouillées. Ils n'avaient plus rien à attendre de la vie ou de l'avenir. Avec l'exécution et la mort de Jésus, leurs espoirs se sont brutalement écroulés.
Mais voici que l'inattendu se produit : Jésus vint, il se tint au milieu d'eux et il leur dit : " La paix soit avec vous. " Voici que les disciples retrouvent leur ami, leur maître. Bien plus, dans sa résurrection, Jésus se révèle à eux comme leur Seigneur. Tout change alors dans la vie de ces gens enfermés. Ils passent du désespoir à l'espérance, de la peur au bonheur : en voyant le Seigneur, les disciples furent tout à la joie…
Le changement intervenu dans la vie des disciples ne dépend pas d'eux. Au contraire, ils avaient tenu à se protéger de toute agression ou influence extérieure. Mais Jésus vivant vient quand même, il passe à travers les portes fermées et sa seule présence ouvre un avenir nouveau.
En ce temps de Pâques, nos portes sont peut-être fermées. Des soucis ou des difficultés nous enferment, nous replient sur nous-mêmes. En ce moment, des auditeurs de ce culte sont prisonniers de leur désespoir, de leur maladie, de leur deuil, de leur solitude, de leur peur… Ces portes fermées par les épreuves de la vie, Jésus vient les traverser. Le Ressuscité reste le crucifié avec tous ceux qui souffrent. Même si nous pensons ne plus rien avoir à attendre de lui, il nous redit ce matin : " Je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin des temps. " (Matthieu 28, 20)
Jésus est vivant pour nous. Il se crée un accès auprès de tout homme en venant à lui. Le bonheur que Jésus apporte ne dépend pas de nous, mais de l'assurance de sa présence, même dans les endroits les plus fermés de notre vie. La paix, Jésus la donne parce qu'il est là, tout simplement, et parce qu'il est le Seigneur. Bienheureux ceux qui le croient !

" La paix soit avec vous," dit le Ressuscité. "Comme le Père m'a envoyé, à mon tour je vous envoie. " La paix que le Seigneur donne a des conséquences sur nos relations avec les autres. La vie des disciples de Jésus est appelée à correspondre à la sienne. En donnant la paix, Jésus envoie ses disciples pour exécuter sa propre mission. C'est dans ce but qu'il leur donne son Esprit : Il souffla sur eux et leur dit : " Recevez l'Esprit Saint. " Le Saint-Esprit est la vie même du Ressuscité. Par lui, l'action de Jésus Christ peut se poursuivre en l'homme. En donnant son Saint-Esprit, le Ressuscité se rend présent au cœur du monde.
De quelle manière ? La réponse transmise par l'Évangile de Jean a de quoi surprendre : " Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis. Ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. " La puissance reçue par les disciples, par l'Église, consisterait-elle donc à retenir éventuellement les péchés, c'est-à-dire à fermer les portes du Royaume de Dieu ? Certainement pas ! Jésus lui-même réfute une telle idée quand il s'écrie: " Malheureux êtes-vous, scribes et Pharisiens hypocrites, vous qui barrez aux hommes l'entrée du Royaume des cieux ! " (Matthieu 23, 13).
La mission de la communauté chrétienne ne réside que dans la bonne nouvelle du pardon des péchés et de la vie éternelle avec Dieu. Le témoignage des disciples du Christ n'a d'autre but que l'annonce de l'ouverture des portes du Royaume. Mais les disciples obstruent ce même Royaume, freinent l'accès au salut, quand ce témoignage est mal rendu. La seule autorité de l'Église consiste à témoigner du pardon, de la paix et de l'amour du Christ. Elle doit annoncer l'Évangile dans ses paroles et dans ses actes, pour montrer à tout homme le chemin de la vraie vie en Christ. Jésus donne son Esprit à ses disciples pour que ses disciples se donnent au monde avec lui.

Ce matin donc, le message de Pâques retentit en nous comme un appel à faire des disciples. Non pas d'abord à faire des autres des disciples, mais à faire de nous-mêmes des disciples. Si l'Esprit du Christ nous fait vivre, d'autres se mettront à sa suite. Nos communautés chrétiennes peuvent alors s'interroger sur leur témoignage. Nous connaissons cette parole de Jésus : " A ceci tous vous reconnaîtront pour mes disciples : à l'amour que vous aurez les uns pour les autres " (Jean 13, 35). Qu'en faisons-nous ? Nos Églises, nos familles, nos relations, reflètent-elles le pardon et la paix du Christ ? Les divisions des chrétiens, aux niveaux local ou interconfessionnel, cachent à beaucoup les portes du Royaume. Ou encore, les Églises arrivent certes à se prononcer en faveur de la paix et de la justice, mais le témoignage non violent des chrétiens reste encore tellement frileux !
Avec raison, bien des Églises ont manifesté publiquement leur opposition à l'attitude belliqueuse des États-Unis. Pourtant, j'ai bien peur que, de ces semaines de guerre en Irak, le monde retienne surtout que des gens qui se réclament du Christ sont capables de faire pleuvoir sur des villes un déluge de feu ! Dans cet enfer, où étaient les disciples du Seigneur ? Qu'en était-il de la paix qu'il leur a donnée ? " Comme le Père m'a envoyé, nous dit Jésus, à mon tour je vous envoie… " L'autorité reçue par l'Église n'est pas un pouvoir, elle est le don de l'amour et de la foi, la vie en elle du Christ ressuscité…

Jésus vient au milieu de ses disciples et leur donne son Esprit pour les mettre en marche avec une espérance. Cette espérance a besoin d'un fondement solide. Thomas le sait bien. Les autres disciples peuvent lui dire : " Nous avons vu le Seigneur ! ", il reste bien dubitatif. " Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je n'enfonce pas mon doigt à la place des clous et si je n'enfonce pas ma main dans son côté, je ne croirai pas ! " Nous apprécions la démarche de Thomas. Nous nous y retrouvons bien. Un Père de l'Église écrivait que " le doute de Thomas nous aide plus que la foi des autres ". Thomas a raison : la foi a besoin de s'appuyer sur le réel.
D'ailleurs, Jésus ne lui donne pas tort. Au contraire, c'est sur la découverte de Thomas qu'il fonde l'espérance de toute l'Église. Elle devient la voie normale et exigée par le Seigneur pour que ses disciples accèdent à la foi et deviennent des apôtres. Jésus leur dit, dans la version de Luc : " Regardez mes mains et mes pieds : c'est bien moi. Touchez-moi, regardez ! " (Luc 24, 39). Les Évangiles insistent sur le toucher et la vision des disciples pour montrer que le Ressuscité est bien Jésus de Nazareth, celui qui a été crucifié. L'apôtre peut en témoigner. Il est le seul à pouvoir le faire. A partir de cette heure, Thomas peut confesser que Jésus, en ayant vaincu la mort, est son Seigneur et son Dieu.
C'est bien Jésus qui est vivant. La mort est donc vaincue et la vie est offerte. La paix de Pâques va jusque-là. C'est une paix grande ouverte sur l'avenir par la puissance de la résurrection. Chaque vie humaine prend une dimension d'éternité. Il est permis de rester paisible, même devant sa propre mort. Les apôtres sont devenus les témoins du fondement solide de cette espérance. Parce qu'ils ont vu et touché le Ressuscité pour croire, il nous est désormais possible de croire sans voir.

L'occasion m'est offerte ce matin d'ajouter que cette démarche - croire sans voir - ne nous est pas complètement étrangère. C'est en effet ce que nous faisons bien souvent - à tort ou à raison ! - quand nous écoutons la radio. Nous accordons une bonne dose de confiance aux émissions que nous écoutons. Mais quelle confiance accorderions-nous à des journalistes qui seraient des témoins complètement désintéressés, qui iraient jusqu'à perdre leur vie pour le message qu'ils annoncent ? Le message des apôtres s'inscrit dans cette perspective. Ils n'ont pas seulement vu et touché les plaies du Crucifié, mais ils les ont souvent portées dans leur propre vie. Une tradition très ancienne dit de Thomas qu'il serait mort martyr en Inde, après avoir contribué à évangéliser la Mésopotamie, là où se situe l'Irak actuel.
Écouter la radio peut nous faire du bien. L'actualité est malheureusement souvent affligeante, mais il est bon d'écouter un concert, une émission passionnante, peut-être même un culte ! Pourtant, affirmer que l'on deviendrait bienheureux en écoutant la radio serait aller trop loin! Il manque dans cette écoute une relation, une vraie rencontre. Or le témoignage des apôtres concernant le Ressuscité atteste une présence qui n'appartient pas qu'au passé. Jésus est toujours vivant au milieu de nous, avec nous. Il est vivant pour l'éternité. A la suite des premiers disciples, il reste possible de rencontrer cet ami, aujourd'hui, pour recevoir de lui la vie, la joie, le bonheur, la paix. Frères et sœurs, que cette paix soit avec vous !

Amen.

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Détails

Avec la participation de
Orgue
Ariane Roulet (piano)
Musique
Claire Frauchiger (harmonium)