Au commencement… la reconnaissance

image

Écouter le culte :

- Regarde Isa…
J’ai surfé sur internet en rentrant les mots : Colosse, Phrygie, Mont Cadmus… et voilà ce que j’ai trouvé…

- Quelle bonne idée, Chrys
Ouh ! qu’est-ce que c’est beau, magnifique !
J’ai envie d’y aller. Pas toi ?

- Oui, mais… c’est loin, la Turquie. Et pour comprendre la lettre aux Colossiens,
Il faudrait aussi… revenir dans le temps.

- Pas compliqué, j’ai demandé à Doc Emmet Brown de nous prêter sa voiture.

- Ah, tu parles de ce savant fou qui voyageait avec sa voiture dans le temps…

- …Alors on y va ? Monte…

- Bon, je règle la date sur quoi ?

- Sur 55. Non, pas 2055. Sur l’an 55.

- Tu es sûre ?

- Oui, car je sais que Colosse, un peu plus tard en 60, a subi un terrible tremblement de terre.

- Bon ok. 55… et c’est parti ! Accroche-toi, ça va secouer… Ouah ! nous y voilà !

- Ouf… quelle poussière ! Ca va ?

- Oui, sortons de la voiture
Tu vois quelque chose ? On est arrivé à Colosse ?

- Je sais pas, mais l’air est très vif. On doit être dans une région sauvage, montagneuse…

Oh !!!

- Tu as vu ?
C’est… c’est magnifique. Tu vois cette haute montagne enneigée qui domine tout.

- Le Mont Cadmus, je présume. Et il y a aussi une rivière. J’entends le bruit de l’eau. Le fleuve Lycus, affluent du Méandre. Plus bas cela se resserre. La ville est là…

- Quelle position stratégique ! Pour passer le col qui mène vers les hauts plateaux, il faut passer ici, y’a pas d’autre chemin !

- Oui, chers amis, c’est historique ! Nous sommes bien à Colosse en l’an 55… J’ai envie d’entrer dans la ville… Passons la porte.

- Quelle agitation ! C’est jour de marché… Regarde ces étals, ces couleurs, et tous ces vendeurs de laine !

- En effet, la laine de la région est très réputée, c’est sa spécialité. On vient de loin pour cela.

- Y’a des gens partout.
On dirait que c’est international ici !
Lui c’est…

- Un soldat romain, évidemment. Peut être en garnison tout près. Et lui là, un juif : on le reconnaît à ses habits : à sa kipa, son chapeau

- Et celui-là bien habillé. T’as vu, il donne des ordres à ses serviteurs.

- Non, pas à ses serviteurs, ce sont ses esclaves, eh oui, c’est triste, mais ca existe encore l’esclavage.

Et ces gens ? …Des gens du coin, des cultivateurs ou des bergers. En tout cas, ce ne sont pas des esclaves, ils vont où bon leur semble, ils sont libres.

- Tu crois que la communauté chrétienne réunit tous ces gens-là ?
Des soldats, des juifs, des esclaves, de riches, des cultivateurs, des bergers ?

- Oui heureusement ! Et c’est ce qui est beau : ils sont tous différents, mais tous ensemble autour du Christ. Ils sont unis par une même foi.

- Une même foi, une même foi, tu vas un peu vite…
Pourquoi la lettre alors…

- Les gens d’ici ressemblent au paysage : rude, vif. Ils sont passionnés, volcaniques. Ils s’enthousiasment vite… ce qui n’est pas sans risque.

- Pourquoi ? C’est bien d’être passionné, de s’intéresser à tout, de foncer…

- Oui, mais ils partent souvent dans une fausse direction. Ici, à Colosse, beaucoup d’idées nouvelles circulent. Par exemple, un groupe croit qu’il faut se priver de tout, vivre dans l’austérité pour être sauvé. D’autres se prennent pour le groupe des élus de Dieu, ils méprisent le monde, cherchent à échapper à la réalité. D’autres encore imaginent qu’ils sont entourés d’anges et ils leur célèbrent un culte. Enfin, certains sont des adorateurs de Dyonisos et de Cybèle, les divinités du vin et de la fertilité. Ils font tout le temps la fête
Parmi les croyants aussi, ces idées sont donc source de tension

- Je comprends. La lettre est destinée à remettre les croyants de Colosse sur le bon chemin. Elle annonce l’Evangile. Elle rappelle le sens des paroles de Jésus, ces paroles qui libèrent, empêchent les fausses idées et qui donnent de l’espoir.

- Oui, c’est bien cela.
L’auteur avertit ses lecteurs pour qu’ils ne tombent pas dans le piège de… aujourd’hui, enfin en 2016, on dirait… le piège des sectes.

- Tu crois qu’on va rencontrer Paul ?

- Tu plaisantes ! peut être Epaphras. Paul n’est encore jamais venu ici à Colosse. Il a dû dicter sa lettre. Au fait, tu l’as prise avec, la lettre ?

- Oui oui, la voilà… Il écrit « Grâce et paix » Etrange, il n’a pas l’air fâché. Aucune critique.

- En effet, la lettre commence par une salutation, c’est l’habitude. Tout le monde fait ainsi :
on demande la grâce, c’est-à-dire la présence bienveillante de Dieu, et la paix, qui est l’harmonie ou le bonheur, pour celui qui va lire la lettre. Après, on peut entrer dans le vif du sujet.

- Pourtant, la suite est toujours positive ? Il les félicite même…
« Nous remercions Dieu… nous avons entendu votre foi… »
Je ne comprends pas…

- Doucement… doucement
Tu sais ce que je te propose ?
C’est de trouver un endroit calme pour en discuter…

… Ah tiens… voilà un endroit sympa. C’est bien, installons-nous là…
Alors, cette lettre aux Colossiens, qu’est-ce qu’elle dit ?
L’auteur rend grâce à Dieu…

- Attends, tu vas trop vite… Rendre grâce… Qu’est-ce que cela veut dire ?

- C’est une expression, composée de deux mots : « Eu » qui signifie « bien » et « Charis » qui signifie « grâce ». On pourrait traduire par « bonne grâce »

- Ouf, c’est du chinois

- Non du grec ! Le mot Grâce a plusieurs sens. Si tu veux, cherchons tout ce qui nous fait penser à ce mot Grâce…

- Grâce comme …gratuit ; quelque chose qui est donné, un cadeau, un don.


- Grâce comme… charisme ; un don personnel que nous avons reçu à notre naissance.

- Grâce comme gracieux ; quelque chose de beau, de bienfaisant, qui ne s’achète pas.

- Grâce comme… la grâce présidentielle ; recevoir une faveur, le pardon.

Rendre grâce, c’est donc reconnaître le don gratuit de Dieu, sa présence : son amour, sa bienveillance et tout ce qu’il nous offre de bon. Ici, je traduis l’expression par « nous sommes reconnaissants envers Dieu »

- J’ai vu juste alors ! Il remercie Dieu pour ce que vivent les Colossiens, c’est un compliment !

- Bien sûr. C’est étonnant de voir qu’il place en premier la reconnaissance. Au lieu de partir dans la critique, il remercie Dieu. Bon, je ne te cache pas que, après, plus loin, le ton sera différent. Plus sévère. Mais avant tout, il remercie Dieu pour ce qu’il observe de positif chez les amis de Colosse : ils sont croyants, ils ont reçu la Bonne Nouvelle de Jésus et cette bonne nouvelle porte des fruits : justice, affection mutuelle, solidarité…

- Il les admire alors… Ou peut-être qu’il cherche à attirer leur sympathie. Quand on me dit que je suis « super », ben après, c’est plus facile pour moi d’accepter les remarques !

- Pas forcément. Pour lui, c’est un état d’esprit. D’abord il ouvre les yeux et il considère ce qui est beau. Ensuite, il remercie Dieu.

Est-ce que tu agis de cette façon, Chrys ? Ce matin, quand tu t’es levée, quand tu as ouvert les yeux, as-tu d’abord pensé que c’était une joie ? Car c’est une grande chance que d’être vivant, de vivre une nouvelle journée.

- Oui, j’étais heureuse comme chaque matin. Heureuse de cette journée qui s’offrait à moi, avec son lot de rencontres, de surprises…

Mais d’autres personnes n’ont pas cette chance !
Parce qu’ils sont malades ou seuls, parce qu’ils ont faim, pas de toit, pas de pays, pas de place ! Comment pourraient-il dire merci à Dieu ?

- C’est vrai. Tous n’ont pas cette chance. Pourtant, ouvrir les yeux et se découvrir vivant, quelque soit la vie et ses difficultés, c’est toujours une grâce, un don extraordinaire. Et remercier Dieu de ce don, ça aide sûrement, dans la suite de notre journée. Dire merci permet de poser un autre regard sur la vie, un éclairage différent.
Reconnaître la beauté de chaque vie rend plus fort pour traverser ce qui est difficile.
Ouvrir les yeux et se dire :
Ma vie est importante.
Quel cadeau ! Quelle grâce !
Cette journée est le début de ma vie à venir.
Je suis vivante !

- Comme dans ce poème de la création où Dieu regarde ce qu’il a créé et qu’il voit que c’est bon. Que c’est même très bon !

- Au commencement… la reconnaissance. Pouvoir ouvrir chaque journée par ces mots qui colorent la vie de bienveillance, de bonne grâce. Alors la suite est plus facile.

- C’est ce qui est écrit dans le récit des Actes, quand Paul et Silas sont en prison et qu’ils chantent encore et encore… Chanter, être reconnaissant, ça ouvre des portes… même celle des prisons !

- Et des portes fermées, il y en a ! Les gens vivent des difficultés un peu partout. Les portes qui s’ouvrent ici ce sont celles de notre esprit. Nous sommes notre propre prison. Nous tournons en rond, par peur ou par ignorance
Pour en sortir, il suffit d’ouvrir les yeux, d’avoir confiance et de dire merci.

- Donc si je te comprends bien, la reconnaissance ouvre un passage à la lumière. Elle ouvre les cœurs, elle casse la fatalité. La vie change de sens parce que nous pouvons dire merci.

- Oui, au lieu de voir ce qui manque, je peux me concentrer sur ce qui est donné. Au lieu de considérer les défauts et les faiblesses des autres, je découvre ce qui les habite de bon, le meilleur. Au lieu de chercher à accumuler des biens, je deviens capable de voir la richesse de la vie, son jaillissement.
Je vois… ce que je suis et ce que nous sommes, ce que nous pouvons vivre ensemble.
Je peux m’en réjouir.

- C’est une belle idée.
Ca me fait penser à un conte… C’est l’histoire d’un roi qui avait trois fils. Devenu vieux, il décide de léguer son royaume à l’un d’entre eux. Mais comment choisir celui qui devrait lui succéder ? Il les a alors emmenés dans la grande salle du château, celle des fêtes, des bals, et là, il leur a donné une toute petite somme d’argent en leur disant : « Celui d’entre vous qui remplira entièrement cette salle, eh bien celui-là deviendra roi à ma place »

Les trois fils sont partis aux quatre coins du Royaume et ils ont cherché. L’aîné, très rusé, a acheté de la paille, beaucoup de paille. La paille, ce n’est pas cher. Il l’a déchargé dans la salle… Mais elle se tassait… Et ça n’a pas suffit à remplir la grande salle.

Le deuxième, il a fait transporter du sable. Le sable, il y en a partout. Il en a déversé un énorme tas au milieu de la salle. Mais le sable a coulé, il a filé sous les portes…
Et ça n’a pas suffit à remplir la grande salle.

Le cadet lui, il a pris son temps. Il s’est assit, il a réfléchi…Et puis il est allé au marché. Là, il a acheté une petite lampe à huile. Il l’a posé au milieu de la salle et l’a allumée. Et la lumière est allée se nicher dans les moindres recoins, remplissant toute la grande salle.
Elle a même glissé ses rayons à l’extérieur, répandant sa lumière alentours !

… Pas besoin de te dire qui est devenu roi !

- C’est tout à fait ça !

La salle de fête, c’est ta vie… Oui, la vie qui t’est donnée.
Tu as le choix : tu peux entasser des biens, ou collectionner des relations, tout remplir à raz bord…
C’est inutile.
Quel sens a ta vie ?

Par contre, tu peux choisir la lumière, en commençant chaque jour dans la reconnaissance pour qu’elle nourrisse ta lampe, qu’elle t’habite et qu’elle t’accompagne. Et elle illuminera chaque instant, même les plus difficiles. L’éclairage posé sur ta vie aura changé, ton regard aura changé, et tu verras en chaque personne un cadeau extraordinaire.
Depuis ce jour, rien ne pourra jamais t’enfermer. Chaque situation sera vécue dans cette lumière. Tu t’émerveilleras de vivre.

Et surtout, tu découvriras qu’avec toi, Dieu s’émerveille.

Aujourd’hui, Dieu te dit :

Je te remercie d’exister
A mes yeux
Tu es infiniment précieux
Tu es merveilleux
Vis chaque jour
Dans ma lumière
Car moi, je t’aime !

Amen.

Découvrir ensemble que la reconnaissance peut précéder toute action, qu’elle ouvre un espace au cœur de notre vie. Se savoir vivant, voir une nouvelle aube se lever, tient toujours de l’émerveillement et invite à vivre sous l’éclairage de cet émerveillement.

Détails

Avec la participation de
Alexandre Winter, Nicole Fischer et Chrys Beroud
Orgue
Musique
Michel Tirabosco, flûte de pan et Stéphane Mayer, piano