Le Notre Père, la prière de tous les chrétiens, est la seule prière que nous ait explicitement enseignée Jésus, selon le récit des évangiles (Mt 6,9-13; Lc 11,1-4). Cette origine fait que le Notre Père a toujours eu un statut particulier pour les chrétiens, et en particulier pour leurs rassemblements de prière. Dès le second siècle de notre ère, la Didachè, un ensemble d’enseignements probablement destiné aux futurs baptisés, exhorte ses lecteurs à le prier trois fois par jour.
S’adresser à Dieu comme « Père », c’est se placer sous le regard du Dieu qui nous aime et qui fait de nous ses enfants. C’est entrer dans une relation intime, une affection personnelle qui est un des traits caractéristiques du Dieu dont Jésus, dans le Nouveau Testament, nous révèle le visage.
Avec ses six demandes (ou sept, selon les découpages), réparties en deux grands thèmes, au sujet de Dieu et au sujet de la vie humaine, le Notre Père place toute notre existence non seulement sous le regard de Dieu, mais aussi dans l’horizon de la venue du Royaume, cette venue qui donne son sens à toute vie.
Il semble que le Notre Père ait très tôt fait partie des rassemblements du dimanche, au cours desquels la communauté célébrait l’Eucharistie, partageant le pain et le vin selon le commandement de Jésus. Traditionnellement, les liturgies chrétiennes voient le Notre Père comme une sorte de charnière dans la liturgie de la Cène, entre ce qui précède (louange, institution, invocation de l’Esprit Saint, rappel de l’œuvre salvatrice du Christ) et le moment qui est plus orienté vers la préparation des participants à la réception de la communion.
Ce choix s’est fait tout particulièrement en raison de deux des demandes du Notre Père : la demande du pardon, comprise comme un bref acte de repentance, et la demande du pain quotidien, dans laquelle les Pères de l’Eglise ont lu non seulement la demande de nous donner la nourriture nécessaire à notre existence physique, mais aussi celle qui est nécessaire à notre existence spirituelle, l’Eucharistie que nous appelons aussi Sainte Cène.
Lorsque la Cène n’est pas célébrée, il trouve naturellement sa place à la fin de la prière d’intercession, comme le rassemblement et la récapitulation de toutes nos prières particulières. Il noue la gerbe de toutes nos demandes en les associant intimement à la prière de Jésus avec nous et pour nous.
Julie Paik, pasteure de l'Eglise réformée évangélique du canton de Neuchâtel