"Je vous enverrai l'Esprit, le souffle de Dieu"

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Nous continuons la lecture des Actes des Apôtres. Après le récit de la Pentecôte, après les premières conversions et la fondation de la première communauté chrétienne. Ce matin, un texte étonnant...

On s'était habitué à écouter les paroles du Christ, on s'était habitué à ses miracles. Mais là, c'en est trop : deux de ses disciples manifestent le même pouvoir, la même force, le même succès...
Si nous nous en étonnons, c'est que nous avons oublié ce qui s'est passé le jour de la Pentecôte, oubliant aussi ce qu'avait dit le Christ avant son Ascension : "Je ne vous laisserai pas seuls", avait-il dit, ni "orphelins (…) Je vous enverrai l'Esprit, le souffle de Dieu".

Le ministère du Christ sur la terre avait ainsi son prolongement. Dieu restait fidèle, présence nouvelle, désincarnée, mais présence réelle, dérangeante, bouleversante.
L'Esprit de Dieu souffle ; il est générateur de paroles et d'actions nouvelles. Pierre et Jean, fidèles du Christ, montent au Temple pour la prière de l'après-midi. A l'une des portes qui donnent accès au Temple, ils sont confrontés à une dure réalité. Dieu avait pourtant promis à son peuple un pays "où coulent le lait et le miel"... et voici qu'un habitant de ce pays en est réduit à mendier ! Certes, cet homme est infirme... mais comment comprendre sa présence ? Elle est un outrage à la richesse infinie de Dieu, mais comme aujourd'hui, tout le monde s'y est habitué, pire, tout le monde s'en est accommodé ! Il va pourtant se passer quelque chose de surprenant.

En montant au Temple pour la prière de l'après-midi, Pierre et Jean n'ont vraisemblablement aucun projet particulier, si ce n'est celui de prier. Mais justement, Dieu en a un pour eux de projet, car prière et action ne peuvent se dissocier l'un de l'autre.
Pierre est troublé par la vue de ce mendiant. Sa présence lui devient intolérable. Poussé par l'Esprit, il s'arrête devant ce mendiant et lui dit : "Regarde-nous !"

"Regarde-nous!... Il veut certainement lui dire : nous sommes nous aussi des gens simples. Regarde-nous, regarde nos habits, regarde nos mains. Nous n'avons ni argent ni or, tu n'as donc pas à attendre de nous une quelconque aumône, mais regarde-nous bien... Mous avons autre chose : une parole et un nom, mais quelle parole ! et quel nom !

"Au nom de Jésus-Christ... marche !"
Et le miracle s'opère. Dieu s'est servi d'un homme malade, infirme, réduit à la mendicité pour faire, une fois encore, éclater sa toute-puissance. Une parole puissance de vie. Quel paradoxe !

Nous voulons "être" et nous pensons "avoir". Notre vie ressemble étrangement à celle du mendiant infirme. Mendiants, parce qu'il nous manque toujours quelque chose pour vivre mieux. Il nous faut toujours plus... Nous ne sommes que très rarement reconnaissants de ce que nous avons déjà.
Ce qui nous paraît le plus important dans notre vie, c'est toujours ce qui nous manque... Mais si vouloir la santé, la guérison paraissent légitimes, vouloir la réussite, le succès ou la fortune, c'est indécent.

Infirmes, paralysés aussi, parce que, intérieurement, nous le sommes. Infirmes, paralysés du cœur, trop souvent incapables d'un geste d'amour, d'un geste gratuit, avares de tendresse, avares d'un geste d'affection, avares d'un mot d'espérance, avares d'une parole de réconfort, avares d'ouverture et d'accueil... Infirmes, paralysés du coeur, tout simplement.

A tous les mendiants de l'avoir et du pouvoir, à tous les infirmes du cœur, j'aimerais leur dire : visitez les prisons, allez voir votre voisin hospitalisé, approchez-vous d'un chômeur, donnez votre bras à un infirme, parlez à un réfugié et vous comprendrez certainement que votre infirmité est faite de peur(s) et d'aveuglement. Vous tenez trop à vous-même !

Il vous est peut-être déjà arrivé de rencontrer quelqu'un qui souffrait des yeux, de cette maladie qu'on appelle cataracte. Une maladie de l'âge qui rend la vision difficile, trouble, comme si l'on essayait de regarder au travers d'une fenêtre embuée. Opérée, cette personne vous dira peut-être que ce qu'on lui a fait, c'est un peu comme un coup de chiffon sec sur une vitre embuée. Un coin de clarté, un espace nouveau. Les formes floues retrouvent leurs contours, les distances leur espace. La réalité devient objective.

C'est cela le vrai miracle, l'oeuvre de l'Esprit Saint, et c'est cela que les premiers chrétiens devaient vivre, c'est cela aussi qui a été vécu par le mendiant infirme : un bon coup de chiffon sec sur la fenêtre embuée de leur vie. Ils ont vu mieux, plus loin, plus clairement, plus nettement.
Eux qui ne pouvaient guère voir distinctement plus de quelques mètres et encore… voient soudainement le ciel à portée de leur coeur.
C'est la rencontre de l'homme avec Dieu, rencontre et partage, rencontre et vie, mais il aura fallu cette rencontre pour que le coeur de l'homme se remette à battre au rythme puissant de l'amour.

Dix ans après la dernière guerre, une publication attendue sortait de presse. Cette publication était l'oeuvre d'un scientifique français, un physicien du nucléaire. Son titre : "L'heure H a-t-elle sonné ?"
D'après l'auteur, selon l'usage qui serait fait de la puissance atomique, l'heure H pourrait être celle de la catastrophe universelle ou l'aube d'un nouvel âge d'or.
Cette Publication était préfacée par le célèbre physicien Albert Einstein. Et dans cette préface, il disait ceci : "La force libérée de l'atome a tout transformé, sauf nos manières de penser. Il nous faut une nouvelle manière de penser si l'humanité doit survivre".

J'ajoute ceci : cette nouvelle manière de penser n'est en fait pas nouvelle, c'est plus simplement l'Evangile, "Bonne Nouvelle", force d'amour et de paix. Il faut le redécouvrir cet Evangile. Il faut qu'il devienne le poumon de notre vie, le principe qui nous anime.

Souvenez-vous, un infirme de naissance, resté en panne de vie, Dieu est capable de le mettre debout et de le faire avancer. S'il l'a pu alors et là-bas, quand et où ne le pourrait-il pas encore ? La Parole de Dieu, par la bouche de Pierre, nous le redit aujourd'hui : lève-toi, marche, remets-toi en route... Cette parole veut nous donner des jambes pour nous mettre debout, libérer notre coeur, ouvrir nos yeux.
Nous n'avons peut-être aujourd'hui aucun projet, mais assurément, Dieu en a un pour chacun de nous : recevoir et transmettre son amour.

Tirant l'idée d'un petit livre d'enfant, on pourrait s'arrêter et dialoguer avec Dieu : "Dis Seigneur, j'ai vu qu'en plantant des graines dans la terre, avec le soleil et la pluie, il y a des fleurs qui poussent... et pas que des fleurs, même des arbres.
J'ai vu aussi qu'avec des briques et du ciment il y a des routes, des maisons, même des églises qui se mettent à pousser.
Je me demande alors comment on pourrait faire pour que les hommes grandissent en eux, là, à l'intérieur. Ils ont l'air parfois si repliés sur eux-mêmes, comme paralysés, qu'on n'ose même plus les aborder. Même qu'ils sont tellement sérieux avec tous leurs problèmes, tout leur travail et toute leur science, qu'on se demande s’ils vivent encore...
Dis, Seigneur, ce n'est pas avec de l'amour qu'on fait grandir les hommes, qu'on les libère à l'intérieur ? Ce n'est pas avec de l'amour que les hommes se mettent à redresser la tête, comme les fleurs ?
Ah ! oui, c'est vrai... c'est ça que tu ne cesses de nous répéter... alors l'amour, c'est le plus merveilleux jeu de construction que tu as donné à l'homme.
Mais c'est vrai qu’ils ne savent pas tellement s'en servir... Tu devrais leur envoyer un mode d'emploi, leur rappeler les règles du jeu.
Ah ! oui, on les connaît... Alors d'où cela vient-il qu'ils ne savent pas s'en servir ?
Essaie de m'expliquer, je t'écoute !
Oui, je comprends... j'ai dit que c'était le plus merveilleux jeu de construction que tu as donné à l'homme... oui, et alors... alors oui, je comprends, les hommes sont trop sérieux pour jouer avec... il n'y a vraiment que les enfants pour y penser toujours ! "

Amen.

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