L'Esprit souffle où il veut, quand il veut, comme il veut

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(Cette prédication est précédée d'une introduction en forme d'actualisation préparée et prononcée par Monique Roland, diacre).

Je vous propose, pour commencer, une histoire à variantes multiples et vous invite à remplir les espaces, selon vos expériences, vos conceptions; vous en ferez une histoire à vous.

Imaginez une communauté chrétienne, vous donnez donc un nom à votre Eglise. Vos responsables s'assemblent plus ou moins fréquemment en synode ou autre organe de décision.

Lors d'une de ces réunions, l'ordre du jour prévoit un sujet d'actualité qui touche particulièrement l'Eglise; à vous de choisir ou de compléter. Y parle-t-on du droit à la vie et à la procréation- des étrangers parmi nous - de la violence et non-violence - des conflits sociaux - de la création asphyxiée ou de tout autre thème plus savamment titré ? Pourvu que l'histoire vous devienne crédible, à vous.

A l'issue des délibérations on y vote des résolutions et des voeux. Pris par le sérieux de l'enjeu, personne n'a remarqué l'absence de deux délégués.

L'un d'eux est journaliste et a été envoyé en mission le matin même. L'autre a été lui aussi retenu au dernier moment (Juste en passant, je vous signale que vous pouvez mettre au féminin qui vous voulez !)

Le ou la journaliste donc a fait son enquête, par hasard en rapport étroit avec le thème débattu par l'assemblée ecclésiastique. Il en sort un article vraiment percutant, ou si vous préférez un reportage remarquable et remarqué à la radio ou même à la télé. Maintenant pour faciliter la tâche de ceux qui ont de la peine à imaginer, j'insère là mon exemple - libre à vous d'inventer le vôtre. Alors, une grande entreprise est en faillite plutôt scandaleuse, le personnel vient de l'apprendre et se sent menacé de licenciement. Une manif est en route et c'est donc là que notre journaliste-délégué enquête. L'autre délégué de notre Eglise est un ouvrier spécialisé dans cette même maison. Quand il a perçu la menace planant sur chacun, l'atmosphère pleine de rancune et de violence, il a renoncé à sa délégation et il a passé sa journée à négocier fermement, mais sans violence. Repéré par son ami journaliste, il a été largement interviewé.

Peu après, un fidèle de l'Eglise demande à voir le président, évêque... ou à vous de compléter.

Ce haut dignitaire a-t-il lu, vu, entendu ce que ses deux coreligionnaires ont affirmé ? Où va-t-on si chacun ose prendre des positions aussi explicites au nom de sa foi quand les autorités n'ont même pas terminé leurs délibérations ?

Mon ami, lui est-il répondu, avez-vous peur pour moi, craignez-vous que mon ou notre pouvoir s'affaiblisse ?

Ah, si seulement tous ceux que le Christ inspire pouvaient avoir la même audace.


PREDICATION

Et si seulement tous ceux qui rencontrent ces témoins"hors cadre" pouvaient, au lieu de réagir négativement, adopter cette attitude recommandée par Saint Paul lui-même écrivant aux chrétiens de Thessalonique : "N'éteignez pas l'Esprit ! Ne méprisez pas les paroles des prophètes, examinez tout avec discernement : retenez ce qui est bon." (1 Thess. 5/19-21).

Ce qui nous ramène, des siècles en arrière, à cet épisode, rapporté par la première lecture, de deux responsables israélites qui se sont mis à parler comme des prophètes, en plein camp et hors du lieu prévu devant la tente de la rencontre qui servait de sanctuaire au peuple en marche dans le désert. On la considérait, cette tente, comme le lieu privilégié de la présence de Dieu au milieu de son peuple et c'était là, dans cet endroit considéré comme sacré, que devait être célébrée la consécration de ces septante conseillers ou anciens, appelés à soutenir Moïse dans la conduite et l'administration de la vie d'Israël. Or voici justement que deux de ces conseillers vont manifester, au plein milieu du peuple, une expérience religieuse, alors qu'on les attendait au lieu fixé par les traditions proposées par Dieu lui-même. Ne sont-ils pas des perturbateurs qu'il faut faire taire et rappeler à l'ordre et surtout ne pas approuver ! Et voilà que Moïse en ne condamnant pas ces deux "hors cadre", qui se nomment ELDAD et MEDAD, rappelle la liberté de Dieu qui donne son Esprit à qui il veut et comme il veut.

Alors, que l'on soit au temps de Moïse ou que l'on s'approche de l'an 2000, le même Seigneur anime ceux qui l'aiment, l'adorent et lui font confiance, tant au sein des communautés religieuses que lorsqu'ils sont aux prises avec les réalités des problèmes économiques, familiaux et sociaux. Mais tout se tient, quand il s'agit d'être à l'écoute de ce que l'Esprit de Dieu nous invite à dire et à faire. Tout se tient et je pense qu'une célébration comme celle que nous vivons ici et que vivent aussi nos amis auditeurs, peut être un moment bénéfique, une halte nécessaire où ensemble, oui ensemble, nous recevons cette force, cette confiance et cette paix qui donneront de la lumière à notre existence quotidienne.

Ensemble ! Voilà un mot auquel le Seigneur aime à donner réalité. Sachez que Moïse, quand on lit ce qui précède le texte du Livre des Nombres que nous avons entendu, Moïse se sentait dépassé par les événements, n'en pouvait plus et Dieu l'encourage à s'entourer d'un conseil qui partage avec lui les responsabilités du gouvernement du peuple qui est en marche vers la Terre promise. Dieu a donné à Moïse son Esprit qui accorde sagesse, intelligence et savoir faire, mais il veut que les 70 conseillers puissent participer à un partage de ces capacités que Moïse a reçues en cadeau. Alors pour rendre compréhensible cet acte mystérieux, l'auteur sacré dit que le Seigneur prend une part de l'Esprit donné à Moïse pour le répartir sur ces 70 anciens.

L'action de Dieu dans l'être intérieur d'une personne est confirmée par un signe extérieur, et il y en a plusieurs possibles. Eh bien, à cette occasion, les conseillers vont prophétiser : il faut entendre ici qu'il s'est agi d'un moment d'extase mystique accompagnée sans doute d'expressions verbales peu compréhensibles signifiant cependant la louange du Seigneur de qui seul nous recevons nos capacités et nos dons. Mais ce signe, c'est Dieu qui le donne dans sa liberté; nous n'avons pas à le rechercher par une gymnastique spirituelle. Et Dieu peut susciter d'autres signes extérieurs de ce qu'il accomplit dans nos coeurs. Moïse, par exemple, n'a pas connu cette extase et pourtant on ne peut pas dire que l'Esprit ne l'habitait pas !

Ce moment d'extase est resté transitoire car il est dit que ces conseillers n'ont pas continué... pourquoi ? parce que le service de Dieu auprès des hommes et pour eux, doit être clair et explicite même si tous ceux qui en bénéficient ne l'acceptent pas.

Eh bien, malgré l'ancienneté de cet épisode, chacun découvre quel enseignement et quel encouragement il lui apporte aujourd'hui, déjà en lui rappelant qu'il n'est pas sans moyen ni sans force pour assumer les responsabilités qui lui incombent dans son milieu de vie. Depuis Moïse, l'intervention de Dieu en faveur des hommes s'est faite plus concrète encore, plus directe par l'accompagnement de Jésus-Christ. Et c'est là pour tous les temps, et pour élargir nos horizons, que Moïse s'est écrié : "Si seulement tout le peuple du Seigneur devenait un peuple de prophètes sur qui le Seigneur aurait mis son Esprit." (Nombres 11:29).

Moïse ne désire pas que tous soient chargés d'autorité et de responsabilité de direction et, comme le dit Thierry Juvet, "j'ai peine à imaginer aussi que Moïse souhaite une transe prophétique générale, sorte de jubilation collective non contrôlée et limitée dans le temps." On peut penser que ce que Moïse souhaite et ce qu'il veut pour notre temps, c'est que chacun puisse découvrir qu'il est en marche avec Dieu et s'en réjouir ! Que chacun soit porteur de paroles de vie pour son prochain dans un échange où nous nous enrichissons et nous consolidons les uns les autres. Qu'ensemble, dans cette vie d'aujourd'hui, où le Christ fait route avec nous, nous partagions, non plus la méfiance mutuelle mais bien plutôt l'écoute, la collaboration et des engagements dont nous pouvons être responsables au service de ceux que nous allons rencontrer, qu'ils soient croyants ou non, puisque Dieu veut agir par son Esprit où il veut, quand il veut et comme il veut.

Et c'est ELDAD et c'est MEDAD qui nous donneront le mot de la fin, par le sens de leurs prénoms.
ELDAD cela veut dire : Dieu a aimé, Dieu aime. ELDAD c'est, par ce prénom, le symbole du croyant qui fait toute confiance à Dieu, qui a une foi solide, qui reste solide et fort dans la foi, même quand il est hors de lieux sacrés. MEDAD porte un nom qui contient aussi la racine de l'amour, de l'amitié, mais il y a comme une interrogation : "qui aime ?" C'est celui qui peut passer par le doute, qui recherche souvent qui l'aime; est-ce que Dieu l'aime ? Est-ce que Dieu est vraiment amour ?

C'est pourtant aux deux que le Seigneur a donné, à part égale, son Esprit. Ce sont les deux qui deviennent signes prophétiques. Nous allons les recevoir tous les deux, aujourd'hui dimanche, dans les lieux où nous habitons.

Amen.

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