Culte de l'Avent, Baden (AG)

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Chers téléspectateurs qui vous trouvez chez vous, chers paroissiens et visiteurs, ici dans l’église de Baden,

Quand Marie est passée par la forêt d’épines, quelque chose s’est transformé. Chez les 2 personnages, quelque chose a bougé. Ils se sont comme réveillés, comme s’ils repartaient à zéro. La peur que Marie avait au début et la sollicitation trop importante se sont transformées en force et elle se met à chanter – comme nous venons de l’entendre. Elle chante à propos de la venue de Dieu dans le monde. Elle porte en elle la promesse de Dieu. Il existe une vieille légende chrétienne, dans laquelle quelqu‘un d’autre veut aussi porter quelque chose de Dieu. Christophorus, St-Christophe, était un homme d’une force incroyable. C’est ce Christophe, aux épaules larges, qui se met au service de Dieu et ce faisant se surpasse, qui m’est venu à l’esprit. Il porte l’enfant divin pour traverser le fleuve et échappe tout juste à la noyade. Son nom signifie porteur du Christ.

Contrairement au paquet de muscles que représente Saint-Christophe, la « Christophora », la porteuse du Christ – Marie - ne porte pas l’enfant sur ses épaules, mais « sous le cœur » et elle jubile. Nullement découragée, nullement craintive, mais remplie de reconnaissance et de hardiesse divine. Cela me rend quand même un peu jaloux, quand j’entends Marie, cette jeune femme enceinte, chanter avec tellement d’assurance et je constate – étonné - à quel point elle n’a pas besoin de se donner de l’importance, à quel point elle se met si peu en valeur et à quel point elle loue Dieu de manière si touchante et impressionnante. Et ce faisant, elle grandit elle-même, elle se tient debout.

Magnificat anima mea dominum. Mon âme, moi-même je suis remplie et confiante et joyeuse et forte. Je glorifie Dieu, je lui suis reconnaissante. Il est grand. C’est lui qui m’a comblée ! Comment est-ce au juste, quand une femme se sent enceinte ? Comment ressent-on ce miracle, cette vie offerte par Dieu, cet enfant sous son cœur ?

Une jeune mère m’a raconté sa grossesse : “Lorsque j’ai senti l’enfant en moi, j’ai eu un autre regard sur le monde. Ce qui jusque-là me préoccupait pas vraiment, devenait tout d’un coup important pour moi, comme la pollution ou l’avenir. Je sentais que j’avais maintenant pris une grande responsabilité, que je ne pouvais assumer qu’avec l’aide et le concours d’autres personnes. Mais mon enfant m’a aussi rendue forte.”
A l’époque, la grossesse de Marie n’était pas seulement une grossesse physique. Elle était enceinte de Dieu. Je ne sais pas vraiment si on peut dire cela comme ça, mais Maria était enceinte de Dieu . Une telle grossesse, inscrite dans le contexte de l’Avent, ne serait pas réservée uniquement aux femmes, mais serait à la portée de tout le monde. Pendant toute ma réflexion autour de l’Avent, je n’ai pas cessé de penser à ça. La grossesse dans le sens de « porter Dieu » est aussi possible pour les hommes, les personnes âgées, les grands-parents et les femmes dont le désir d’enfant n’a pas été comblé. Comme Marie, ils peuvent mettre Dieu au monde. Dans cette hypothèse, on peut se demander si cela se voit, lorsqu’en tant que chrétiens nous portons Dieu en nous. Vous remarquerez sans doute que cette jeune Marie me fascine et m’a bouleversé à plusieurs niveaux. Non, je ne suis pas intéressé par une quelconque dévotion mariale.

Mais ce chant, ce courage l’amenant à ébranler le trône des puissants, cette assurance qui la mène à chanter en défiant le monde des puissants, cette force de vie pleine de promesses, cette foi de Marie…elles m’intéressent et me touchent. Je souhaiterais que moi-même et nous, en tant qu’Eglise, nous en soyons davantage enrichis, édifiés.

Et pourtant je suis différent de cette Marie. Les deux personnages que nous avons vus ici avant, me sont plus proches que cette Marie. Etre impatient, s’agiter dans tous les sens au lieu d’attendre est beaucoup plus courant chez moi. Je n’aime pas attendre et préfère remplir les temps morts en faisant des choses. L’action et le combat d’un Saint-Christophe me sont beaucoup plus familiers que cette jeune femme ou vierge Marie, qui se contente de recevoir et qui attend Dieu pendant 9 mois.
Et néanmoins, elle n’apparaît pas se sentir abandonnée par Dieu.

Mais le fait est qu’« être laissé en plan» n’est pas une jolie expression et ce n’est pas non plus un sentiment agréable. C’est une attente qui paralyse, qui fâche, qui déçoit et qui insécurise. Plus le temps d’attente augmente, plus la force de vie et l’espérance régressent. Et pourtant, j’admire ces personnes qui arrivent à supporter cette insécurité, cette impuissance et cette incertitude, quand les autres les font attendre indéfiniment ou quand la vie les fait attendre, quand Dieu ne vient pas comme ils s’y attendaient. Oui, ça demande beaucoup d’énergie, quand on nous fait attendre indéfiniment, quand certains, par exemple, ne tiennent pas leurs engagements, quand l’autre ne vient pas, bien qu’il l’ait promis. Quand on est assis et qu’on attend, et qu’on attend toujours, et qu’on ne sait plus si on s’est trompé soi-même, si l’on n’a pas été clair et précis lorsqu’on a convenu du rendez-vous.

Le temps de l’Avent nous conduit à un dilemme. Car nous ne pouvons pas fabriquer nous-mêmes Noël. Noël se produit aussi au travers de notre capacité à pouvoir attendre : « J’attendrai jusqu’à ce que le temps soit venu ». Mais pendant cette attente, je peux aussi rester bloqué. A force d’attendre, mon horizon peut se restreindre et je peux perdre goût à la vie. Quand je reste assis trop longtemps ou que j’attends de manière trop passive, ou que j’en attends trop des autres et aussi de Dieu.

« Seigneur, je n’ai personne pour me plonger dans la piscine quand l'eau est agitée … », se plaignit le paralytique résigné, après avoir attendu pendant la moitié de sa vie en vain. Et à cet homme désabusé, Jésus dit : « Lève-toi, prends ton lit et marche ». Là on chante une autre strophe du magnificat. Là, l’ancien chant de l’Avent de Marie est transposé, entonné d’une nouvelle manière et adapté à une situation qui semblait être sans issue. Chaque année, l’Avent nous souffle à nouveau à l’oreille que Dieu est déjà venu. Sa force de résurrection, la force de son courage, son espérance sont déjà en nous.

C’est ce que signifie l’Avent : fini, terminé ! On ne nous fait plus attendre jusqu’à la Saint Glinglin. Nous n’avons pas besoin de rester couchés et assis et d’attendre, car Dieu est déjà venu. Dieu est en moi et en toi, un peu comme il était en Marie.

Depuis que je porte cette prédication sur Marie en « gestation », je regarde les femmes enceintes différemment. Elles ont une démarche spéciale, ample, leur regard sur elle-même est posé, elles dégagent quelque chose de très assuré et leurs yeux brillent. Ça m’a vraiment frappé : elles rayonnent d’une confiance intérieure comme si elles étaient transparentes, mais aussi vulnérables. Sûres de leur valeur et fières.
Alors je me pose la question : et si on pouvait nous identifier comme chrétiens grâce à notre démarche, à notre rayonnement, à nos yeux, et reconnaître que nous sommes porteurs, « enceints » de Dieu ? Et si notre temps de l’Avent, notre attente de Noël devenaient visibles ?

Pourquoi ne serions-nous pas plus attentifs à ce que les personnes autour de nous « portent sous leur cœur », à ce que Dieu leur a offert de porter? Pourquoi ne serions-nous pas plus attentifs pour remarquer les signes que Dieu grandit à travers nous et à travers d’autres personnes ? Seul Dieu connaît – et peut-être nous avec lui – les nombreux anniversaires de son avènement au travers de nous.

Je n’ai commencé à comprendre la signification concrète de cette « grossesse de Dieu en nous » que lors d’un dialogue avec un ami.
Il se déclarait être débordé par la vie et une demande de rentabilité excessive, ce qui lui a causé de graves troubles du sommeil, pour lesquels il a été obligé de recourir à l’assurance invalidité. Mais il me disait : « Moi aussi, j’ai à offrir quelque chose de la part de Dieu au monde. Je ne suis ni amer ni déçu. Je ne suis pas jaloux quand d’autres maîtrisent mieux leur vie que moi. Car moi aussi, je porte quelque chose du Christ en moi : quelques-unes de ses louanges, par exemple. J’essaie d’être charitable envers moi et les autres. Certains sont pourvoyeurs de paix, doux dans leur cœur. Mais à travers nous tous quelque chose de Dieu est « mis au monde. » Son récit m’a beaucoup ému ; oui, je crois que nous portons tous en nous quelque chose de divin, qui veut grandir, et qui a besoin de nous en tant que pères et mères ; quelque chose à la fois de fragile et de précieux que nous pourrons transmettre à ce monde.

C’est ainsi que je me sens dans ce temps de l’Avent : je peux me lever, et entrer dans cette période, et entonner la louange de Marie.

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