Culte de Vendredi-Saint, transmis du Temple de Bulle (FR)

Jacques Schell
No video provider was found to handle the given URL. See the documentation for more information.

1e lecture : Nombre 21.4-9
« En cours de route, le peuple perdit patience et il se mit à critiquer Dieu et Moïse : “Pourquoi nous avez-vous fait quitter l’Egypte ? Pour nous faire mourir dans le désert ? Il n’y a ici ni pain, ni eau et nous sommes dégoûtés de la manne, cette nourriture de misère !”
Alors le Seigneur envoya contre lui des serpents venimeux : ils mordirent un grand nombre d’Israélites qui en moururent.
Le peuple vint vers Moïse et dit : “Nous avons péché en vous critiquant le Seigneur et toi !
Supplie donc le Seigneur d’éloigner ces serpents de nous”. Alors Moïse se mit à prier en faveur du peuple.
Le Seigneur lui répondit : “Façonne un serpent de métal et fixe-le sur une perche. Quiconque aura été mordu et le regardera aura la vie sauve”.
Moïse façonna donc un serpent de bronze et le fixa sur une perche. Dès lors, toute personne qui avait été mordue par un serpent et regardait le serpent de bronze avait la vie sauve. »
Alors que le peuple des Hébreux est décimé par ces serpents venimeux, il se rend bien compte que, sans Dieu, la vie est plus compliquée et dangereuse qu’avec lui. C’est pourquoi il décide de changer son comportement. Il revient à Dieu en reconnaissant ses erreurs et demande son intervention pour le sauver.
La réponse de Dieu nous surprend. Plutôt que de supprimer le danger, il offre un moyen pour que les personnes mordues soient actives dans leur processus de guérison. Il demande en effet aux personnes blessées d’orienter leur regard vers un serpent de bronze dressé sur une perche. C’est ce que l’on appelle un mouvement de conversion, un geste bien connu et apprécié des skieurs cherchant à se sortir de situations difficiles.
Une paroissienne, méditant ce récit, l’a illustré sous la forme d’une sculpture qu’elle a placée au pied de la croix. Nous y voyons le peuple, la perche et le serpent de bronze. Dieu ne supprime ni les serpents, ni les morsures, mais il donne le moyen de garder la vie, même dans les épreuves. Dans le fond, il en va de même dans notre quotidien : les difficultés ne nous sont pas épargnées, mais, avec Dieu, nous les surmonterons.

La traversée d’un désert a ce pouvoir révélateur qui permet à l’essentiel d’émerger, alors que le superflu disparaît. La lassitude de la manne ne fait plus le poids face au danger de la morsure des serpents. Dans cette histoire, les Hébreux apprennent leur dépendance de Dieu pour être sauvés. Eux qui étaient un peuple esclave, avec une mentalité d’assistés, ils apprennent maintenant le difficile chemin de la liberté. Un chemin qui ne consiste pas à faire ce que bon leur semble, mais à tenir compte désormais de l’orientation que Dieu donne à leur vie. Voilà ce qu’illustre le déplacement de leur regard !
La perche et le serpent ont été repris sur les enseignes de nombreuses pharmacies : il s’agit d’une croix verte avec en surimpression une perche et un serpent, en général fortement stylisés. Ces symboles illustrent un principe fondateur de la médecine occidentale : ce qui transmet la maladie est aussi ce qui est utilisé pour favoriser la guérison. Pensons par exemple à la fabrication d’anti-venin qui est souvent obtenu à partir du venin de serpent, ou aux vaccins qui utilisent des traces de la maladie infectieuse combattue afin de créer une réaction immunitaire positive, ou encore à toutes ces substances qui sont des drogues en trop grande quantité, mais deviennent des médicaments lorsqu’ils sont bien dosés.
J’ai demandé à mes catéchumènes de dessiner cette histoire et je vous laisse admirer leurs dessins. Ils ont apprécié chaque élément de ce récit et, en particulier, que le moyen fourni pour obtenir la guérison soit si facile à appliquer, que même un enfant peut le faire. On dit parfois de quelqu’un : “il a le regard qui tue !”. Eh bien, dans cette situation, il s’agit de porter un regard qui sauve !

Nous allons découvrir maintenant comment Jésus a repris ce récit du serpent de bronze lors d’une discussion avec Nicodème, un chef religieux juif cherchant à comprendre qui était Jésus.
2e lecture : Jean 3.12-17
« Si vous ne me croyez pas quand je vous parle des choses de la terre, comment me croiriez-vous quand je vous parle des choses du ciel ? Personne n’est jamais monté au ciel, excepté le Fils de l’homme qui est descendu du ciel !
De même que Moïse a élevé le serpent de bronze sur une perche dans le désert, de même le Fils de l’homme doit être élevé, pour que tous ceux qui croient en lui reçoivent la vie éternelle.
Car Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne soit pas perdu mais qu’il ait la vie éternelle. Dieu n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour condamner le monde, mais pour sauver le monde par lui. »
Dans ce dialogue, lorsque Jésus parle d’ “aller au ciel”, il ne décrit pas une ascension dans l’atmosphère, mais la possibilité d’entrer dans l’intimité de Dieu. Jésus se présente comme Dieu venu à la rencontre des humains, comme le révélateur de ce qui est inaccessible à leur connaissance, parce que c’est au-delà de leur domaine d’expérimentation.

Personne n’a jamais vu Dieu, car il est au-delà de tout ce que nous pouvons penser ou même imaginer. C’est pourquoi nous avons besoin d’un intermédiaire pour le connaître. Jésus, plutôt que de nous présenter un Dieu inaccessible, nous affirme qu’il est déjà là, au milieu de nous. Il nous dit que le Règne de Dieu commence ici et maintenant. C’est la force d’une présence qui nous accompagne à chaque instant.
Si vous questionnez les gens autour de vous, vous serez surpris du nombre de ceux qui ressentent cette présence d’un Dieu bienveillant à leur côté.
Pour aider Nicodème à saisir le sens de sa mort prochaine sur la croix, Jésus reprend ce vieux récit du serpent de bronze élevé au désert par Moïse. Ce récit joue le rôle de support symbolique.
« Comme le serpent de bronze a délivré les Hébreux de la mort, je vais faire de même pour l’humanité en mourant sur la croix », dit-il à Nicodème. Admirons la manière subtile avec laquelle Jésus reprend cette histoire bien connue de Nicodème pour lui transmettre l’essentiel : Dieu délivre et sauve ! Or, cette parole de Jésus s’adresse à nous aussi, elle nous touche et nous stimule. Elle nous donne de l’espérance !
Le geste de conversion du regard que les Hébreux ont été invités à faire dans le désert prend alors toute sa valeur pour Nicodème et pour nous ce matin. Car en tournant notre regard vers la croix, nous pouvons recevoir la délivrance de ce qui envenime notre existence, de ce qui nous éloigne de Dieu. Cette délivrance prend dans la foi chrétienne le nom de salut.
A qui regardons-nous pour vivre pleinement ? Jésus le Christ nous invite aujourd’hui à regarder à la croix. C’est là que nous serons libérés des effets de la morsure du mal, que nous pourrons déposer ces fardeaux qui alourdissent notre marche, que nous pourrons recevoir une vie renouvelée.
Jésus poursuit avec cette parole qui résume l’évangile :
“Car Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son fils unique, afin que quiconque croit en lui ne soit pas perdu (ou ne périsse pas), mais qu’il ait la vie éternelle”.
Peut-être avez-vous vu ce logo dernièrement. Il nous invite à nous situer par rapport à ce verset. Il nous demande : êtes-vous prêts à vous considérer comme dignes de l’amour de Dieu ? êtes-vous prêts à accepter l’élévation de Jésus sur la croix comme le moyen par lequel Dieu vous libère des effets de la morsure du mal ? Etes-vous prêts à croire, c’est-à-dire à mettre votre confiance en Dieu, pour recevoir cette qualité de vie nouvelle qui vous accompagnera jusque dans l’éternité ?
Jésus n’est pas venu pour condamner le monde mais pour le sauver.
Ce qu’il nous reste à faire est tout simplement d’y croire, dans le sens fort du terme, et de vivre en fonction de cette bonne nouvelle.
J’aimerais illustrer cet acte de confiance qui est au cœur même de la foi chrétienne par l’histoire suivante.
Un funambule avait tiré un câble au-dessus d’une chute d’eau. Il a demandé à la foule rassemblée si elle le croyait capable de faire la traversée avec une brouette contenant un sac de sable de 50 kg. Certains le croyaient, d’autres pas. Devant leurs yeux admiratifs, il a rejoint l’autre côté et est revenu. Puis il a demandé à la foule : “Et maintenant, qui croit que je peux le faire à nouveau ?” Tous ont levé la main. Alors il les a mis au défi : “Si quelqu’un le croit vraiment, alors qu’il prenne la place du sac de sable pour que j’aille le déposer de l’autre côté”.
Ce matin, Jésus vous invite à prendre place dans sa brouette !

3e lecture : Luc 23.33-48
« Arrivés à l’endroit appelé Golgotha, les soldats y clouèrent Jésus sur la croix, de même que les deux malfaiteurs, l’un à droite et l’autre à gauche. Jésus dit alors : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. »
Les soldats partagèrent ses vêtements entre eux en les tirant au sort. Le peuple se tenait là et regardait. Les chefs juifs se moquaient de lui en disant : « Il a sauvé d’autres gens, qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie, celui que Dieu a choisi ! » Les soldats aussi se moquèrent de lui. Ils s’approchèrent, lui présentèrent du vinaigre et dirent :
« Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même ! »
Au-dessus de lui, il y avait cette inscription : « Celui-ci est le roi des Juifs. »
L’un des malfaiteurs suspendus en croix l’insultait en disant : « N’es-tu pas le Messie ? Sauve-toi toi-même et nous avec toi ! » Mais l’autre lui fit des reproches et lui dit : « Ne crains-tu pas Dieu, toi qui subis la même punition ? Pour nous, cette punition est juste, car nous recevons ce que nous avons mérité par nos actes. Mais lui n’a rien fait de mal. » Puis il ajouta : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton règne. » Jésus lui répondit : « Je te le déclare, c’est la vérité : aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis.»
Il était environ midi quand le soleil cessa de briller : l’obscurité se fit sur tout le pays et dura jusqu’à trois heures de l’après-midi. Le rideau suspendu dans le temple se déchira par le milieu. Jésus s’écria d’une voix forte : « Père, je remets mon esprit entre tes mains. » Après avoir dit ces mots, il mourut.
Le capitaine romain, voyant ce qui était arrivé, rendit gloire à Dieu par ces mots : « Certainement cet homme était un juste ! » Tous ceux qui étaient venus, en foule, assister à ce spectacle virent ce qui était arrivé. Alors ils s’en retournèrent en se frappant la poitrine de tristesse. Tous les amis de Jésus, ainsi que les femmes qui l’avaient accompagné depuis la Galilée, se tenaient à distance pour regarder ce qui se passait. »

Il y a près de 2000 ans, un charpentier de Nazareth, né à Bethléem, a vécu pendant 30 ans la vie d’un homme tout à fait ordinaire. Puis il a exercé pendant 3 ans un ministère tout à fait extraordinaire : il annonçait le Règne de Dieu, accompagnait ses interlocuteurs dans leurs doutes et leurs questions, il guérissait des malades et faisait toutes sortes de signes étonnants.

Mais certains étaient dérangés par sa proximité avec Dieu et par la liberté de son ton lorsqu’il parlait de religion. Eux, qui se croyaient être des spécialistes du religieux en ont pris ombrage. Ils se sont opposés à lui, l’ont arrêté, jugé au cours d’une parodie de procès et condamné à mourir sur une croix.
Alors que Jésus meurt, les personnes présentes sur les lieux semblent vivre cet événement très différemment les unes des autres. Les soldats font leur boulot. Ils en profitent même pour se remplir les poches en se partageant les habits des suppliciés.
Certains se comportent comme les curieux de ce spectacle macabre. D’autres se moquent de Jésus ou l’insultent. Un des malfaiteurs reconnaît la justesse de la sentence pour lui-même, tout en considérant l’injustice subie par Jésus à qui il demande de l’emmener avec lui au paradis. Le capitaine romain exprime son admiration pour ce condamné, alors que les amis de Jésus sont terrassés par la tristesse et la peur.
Devant le Christ crucifié, chacun semble confronté à ce qu’il croit de la vie et de la mort, de la justice et de la nature humaine. Aucun ne peut rester indifférent.
Et vous, comment vous situez-vous ? Quel sens prend cette mort pour votre vie ?
De très nombreux artistes ont peint, sculpté ou mis en musique ce récit de la crucifixion de Jésus. Chacun y a mis son interprétation, projeté son malaise face à la mort, exprimé son dégoût face à l’injustice et ses craintes face à la violence de notre monde.
On y discerne pourtant des signes d’espérance. La mort a gagné une bataille, mais elle a perdu la guerre. Elle n’est pas la fin de toute chose. Car si Dieu n’a pas empêché la mort de son Fils bien-aimé sur la croix, c’est qu’il est souverain sur la vie comme sur la mort. Il n’a pas encore dit son dernier mot !
Ce jour de la crucifixion, alors que tout semble perdu, il s’opère une sorte de retournement. Cette mort tragique et injuste sur la croix devient le lieu de la victoire ultime de Dieu sur la mort. En mourant, puis en revenant à la vie, Jésus fait exploser les portes de la mort. Elle est vaincue.
L’idée qu’un seul homme puisse changer le destin de l’humanité a profondément marqué notre culture. Combien de romans ou de films mettent en scène un héros qui, pour sauver les siens, ou toute la planète, se sacrifie lui-même. La mort d’un seul permet alors la vie de tous les autres. Voilà ce qui s’est passé à la croix.

Mais pourquoi la mort de Jésus est-elle libératrice pour les humains de tous les temps ? En fait, cela tient à l’identité même de Jésus. Rappelez-vous ce qu’il disait à Nicodème : “Personne n’est jamais monté au ciel, excepté moi, le Fils de l’homme, qui est descendu du ciel !”

En interprétant ces paroles, les théologiens ont affirmé la double nature du Christ : Jésus est à la fois pleinement homme et pleinement Dieu. C’est pourquoi lui seul était capable de prendre sur lui tout ce qui nous éloigne de Dieu, de le dissoudre dans la mort et de revenir parmi nous pour nous apporter la réalité de la vie nouvelle.

La plupart des gens n’aiment pas voir les serpents, comme ils n’aiment pas regarder l’image du crucifié. Dans la tradition protestante, il est d’ailleurs exclu de représenter dans un temple un Jésus sanguinolent sur une croix. Mais aujourd’hui, jour de Vendredi saint, nous nous souvenons de ce que Jésus a accompli sur la croix et cela change toute notre vie, car cela nous plonge au cœur de la vie chrétienne. Je vous invite à garder en mémoire ces cinq verbes commençant par la lettre R qui est chère aux réformés.
Reconnaître • se Repentir • Regarder • Réconcilier • Renouveler
Reconnaissons : commençons par faire le constat du décalage qui s’installe inexorablement entre notre vie et la volonté de Dieu. C’est ce que l’on appelle se Reconnaître pécheurs.

Repentons-nous : lorsque nous faisons fausse route, changeons de direction. C’est la conversion dont il était question tout à l’heure ! Il ne s’agit pas de se culpabiliser mais de prendre conscience de la tristesse que nous éprouvons lorsque nous offensons Dieu.

Regardons : nous parlons d’un regard actif, d’un regard de confiance qui permet de se détourner de tout ce qui nous aliène pour se reconsacrer à la mise en pratique de la volonté de Dieu.

Réconcilions-nous : alors que nous sommes les offenseurs, c’est Dieu qui prend l’initiative de cette réconciliation pour que nous retrouvions une pleine communion entre lui et nous. Sans culpabilité, sans amertume. L’étape suivante est parfois de se réconcilier avec son prochain.

Renouvelons : la vie ne repart pas tout simplement comme avant, mais elle est régénérée, elle retrouve une saveur qui était perdue, elle s’ordonne et s’ajuste à ce qui bon, à ce qui est bien et à ce qui est beau.

Reconnaître, se Repentir, Regarder, Réconcilier et Renouveler.
Tout ce processus est un don de Dieu pour nous extirper de notre éloignement de lui et pour nous en rapprocher.

Voici le secret de la vie chrétienne : Jésus, est mort pour nos péchés et revenu à la vie pour nous ouvrir un avenir nouveau. 2000 ans après, nous sommes devant ce paradoxe qui, en nous mettant à l’écoute de Jésus, devient compréhensible.
En ce jour de Vendredi saint, nous découvrons que l’élévation du Christ sur la croix ouvre pour les hommes et les femmes de tous les temps et de tous les lieux un chemin de liberté, une voie de salut. Ainsi, en orientant notre regard vers le Christ qui se donne à nous, notre vie s’oriente autrement et peut repartir d’un bon pied.

Tout comme le serpent de bronze a été élevé au désert, Jésus a été élevé sur la croix pour que nous recevions le salut et la vie éternelle. Aujourd’hui, tournons notre regard vers lui et nous vivrons. Que Dieu vous bénisse, amen.

Prédications dans le même lieu

Aucun résultat.

Prédications de la même personne

Aucun résultat.

Détails

Avec la participation de
Orgue
Musique

En collaboration avec