Frères et sœurs,
Ce qui était une promesse s'est concrétisée : Dieu a envoyé son souffle créateur dans le monde, l’Église va naître et témoigner par ce souffle. Comment pouvons-nous avoir un regard sans cesse renouvelé sur un évènement qui s’est produit il y a plus de 2000 ans ?
Avant de dire un mot sur le travail de l'Esprit Saint, le paraclet, terme d’origine grecque qui signifie « celui qui assiste », à savoir les disciples et tout être humain de la part de Dieu, plongeons-nous dans ce récit historique rapporté par l’Évangile.
Nous sommes dans les discours d'adieux de Jésus. Jean mentionne ces paroles de Jésus lors d'un repas d'adieu, où la mission de Jésus semble être un échec en raison de sa mort imminente. Au plan historique, la rédaction de ces discours intervient à une époque où la communauté chrétienne est confrontée à l'hostilité grandissante de la société, caractérisée par la haine et la persécution, de la part de celles et de ceux qui, malgré le message d’espérance de Jésus, résistent à ce mouvement de bienveillance et d’amour qu’il a initié par ses miracles et ses paroles.
Ce contexte de persécution est aussi marqué par l’exclusion des chrétiens de la synagogue. Ces chrétiens exclus, qui traversent des moments sombres, ressentent une profonde solitude et une grande vulnérabilité. C’est dans ce contexte que l’Évangile mentionne l’Esprit Saint, désigné par le terme de paraclet, ou celui qui aide, au moment où les disciples s’attristent d’entendre Jésus évoquer son départ imminent et les persécutions à venir.
Dès son départ, Jésus enverra le paraclet aux disciples, ce qui les aidera à surmonter leur souffrance pour atteindre la paix. Le Saint-Esprit guidera les disciples, et leur fera ressentir la présence de Dieu, tout en clarifiant l’avenir. Il est la force intérieure qui donne la clé pour comprendre les paroles de Jésus. C’est tout l’agir de Dieu, à travers Jésus et l’Esprit saint en notre faveur.
L’Esprit de vérité est celui qui rend un témoignage authentique en faveur du Fils, le Christ. Il sera encore celui qui accordera aux disciples, et à nous aussi, les moyens nécessaires pour témoigner de la Bonne Nouvelle de manière authentique. Il agit de l’intérieur comme une puissance d’illumination et de révélation dans la conscience des disciples pour affirmer leur foi au milieu des épreuves et des persécutions.
Les disciples sont conduits vers l’inconnu parce que l’Esprit souffle où il veut. Ils vont être engagés sur une nouvelle voie, un nouvel itinéraire, un voyage spirituel. Ils ont la chance de s’ouvrir à quelque chose de plus grand, le Souffle, qui fait éclater tous les enfermements. Ces apôtres sont saisis par l’insaisissable pour qu’ils soient disponibles. Ils sont ouverts aux diverses manières dont Dieu se révèle. Désormais, les disciples seront conduits sur une nouvelle voie, vers un objectif différent, conformément à la volonté de Dieu. Ils vont être renouvelés pour s’engager dans des actions concrètes et qui seront de nature à transformer le quotidien des gens. En même temps, ils accèdent aux intuitions prophétiques qui les mèneront à s’engager concrètement en faveur d’un mieux vivre pour leurs contemporains.
La venue du Saint-Esprit sur les disciples marque un tournant décisif dans le dessein de Dieu pour le salut holistique de l'humanité, un salut pas que spirituel mais qui touche au bien-être de tout l’être humain. L’Esprit ne remplace pas Jésus, mais le fait connaître, témoigne de lui, et le révèle aux disciples. L’Esprit rend la présence de Jésus réelle.
La promesse du Saint-Esprit, devenue réalité pour les disciples et pour nous aujourd’hui, nous dit que nous ne sommes pas abandonnés à nous-mêmes. Car le Saint- Esprit en nous, c'est Dieu en nous qui nous aide et nous aidera à tenir bon dans les situations difficiles, tout en gardant le cap. Cet aidant, qu’est le paraclet en nous, est, ou sera en nous comme une force inspiratrice, pour que nous soyons à même d’agir en nous ajustant à la volonté de Dieu, qui est de nous aimer les uns les autres.
Le travail du Saint-Esprit nous fait entrer dans un processus de maturation ou de croissance spirituelle. Les considérations mondaines, c’est-à-dire les soucis et les inquiétudes de la vie nous accablent tellement souvent que nous ne pouvons pas toujours recevoir un enseignement spirituel. Voilà pourquoi, en bon pédagogue, Jésus annonce d’ores et déjà la manière dont le Saint-Esprit conduira les disciples (et nous également) à une pleine compréhension de la personne et du message de Jésus.
Pour concrétiser ce travail du paraclet dans la vie de l'Église, il est essentiel que nous ayons une véritable adhésion au projet d'amour de Dieu. Car devenir un adulte dans la foi prend du temps, le temps de nous décentrer de nous-mêmes et en expérimentant le lâcher-prise par rapport à nos inquiétudes, nous ouvrir à l’amour donné par l’Esprit Saint. Comme le dira Jésus dans le sermon sur la montagne : « Qui par ses inquiétudes peut ajouter une journée à sa vie ? ».
Apprécier la vie par l'Esprit, ou marcher par l'Esprit, signifie apprendre à vivre en suivant le chemin qu’est Jésus, le Christ. Pour vous et moi, vivre du don de l'Esprit saint n'est réalisable que si nous nous ouvrons pleinement à ce Souffle intérieur de Dieu en nous. C’est à cette condition, que Christ sera glorifié par notre vécu au quotidien. Le Saint Esprit fait des disciples, des témoins poussés vers une tâche à accomplir.
Aujourd’hui Christ est glorifié. Lorsque nous sommes rassemblés en prière, il nous qualifie, il nous attache à lui et nous aligne sur sa Parole. En nous réunissant, nous sommes en espérance d’une rencontre transformatrice au cours de laquelle la présence et l’influence de Dieu pourront être profondément ressenties dans nos actions.
Le jour de Pentecôte, les disciples et plusieurs pèlerins venus du monde entier ont compris le message dans leur langue maternelle. En effet, la foule s’était émerveillée en ceci : « Comment se fait–il que chacun de nous les entende dans sa langue maternelle ? » C’est ça le miracle de la Pentecôte, nous pouvons nous comprendre, quelles que soient nos différences.
Il me paraît évident d’affirmer que la langue de Dieu, c’est l’amour. La seule langue qui peut briser la peur et rompre les barrières. Nous sommes tous attirés par l’amour, et lorsque nous adhérons tous à cette langue, nous pouvons étendre nos affections aux autres personnes, aux visages, aux émotions, à l’ambiguïté, à la différence et à la vérité. Nous sommes convoqués à la responsabilité face à autrui. Nous pouvons souhaiter la paix qui peut rétablir l’unité entre les peuples: Russes et Ukrainiens, Israéliens et Palestiniens, Congolais et Rwandais, Soudanais et Sud-Soudanais, Chinois et Taïwanais, riches et pauvres, et tous les autres peuples en guerre ou en conflit.
Nous sommes tous connectés au Souffle, celui de Dieu. C’est un souffle qui peut nous unir sans nous asservir. Il peut briser les barrières sociales, raciales. Il nous rend universel. Au regard de notre monde actuel plongé dans les inégalités, la pauvreté, la violence, la discrimination et le racisme. Il est impérieux que nous puissions nous interroger. Ne faudra-t-il pas que nos racines soient plongées ou replongées dans la vie de Christ, qu’elles puisent dans la plénitude de l’Esprit, la bienveillance, l’agir compatissant, un agir sans l’intention de dominer l’autre, une liberté d’offrir et de servir?
Hier comme aujourd’hui, Christ se dresse comme un pont entre notre monde, celui du repli sur soi et de la peur, et le monde de la maternité de Dieu, celui de l’innocence qui transcende les couleurs de peau, les origines et toutes les autres barrières humaines.
Aujourd’hui, nous voulons annoncer l’Evangile à tous les êtres humains et continuer notre service d’entraide aux plus précarisés. En attendant ce jour, à la suite de Jésus le Christ, rassemblons-nous en prière, travaillons dans l’unité induite par l’amour pour que chaque vie soit à l’image et à la ressemblance de Dieu, qu’elle soit un lieu où la gloire, la grâce, la miséricorde et la compassion se manifestent.
Amen.