S'ouvrir aux autres

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Que serait la Bible sans toutes les scènes de repas ou d'hospitalité qui se déroulent au fil des pages ? Imaginez : et si Ésaü n'avait pas été tenté par un plat de lentilles ? Et puis que serait la sortie d'Égypte et la marche dans le désert sans le don de la manne céleste. Quelle saveur aurait la parabole du fils perdu et retrouvé, sans l'accueil du père et le repas de fête final ? Comment imaginer l'histoire du Christ sans le lavement des pieds ou sans son dernier repas avec ses disciples ?
Beaucoup d'événements centraux de la Bible se passent dans des rencontres autour de la table. Mais c'est le cas dans le déroulement de nos vies aussi. Pensez à tous ces événements marquants que l'on fête par un repas; à ces fois où l'on rencontre une connaissance dans la rue et où on l'invite à boire un café; à ces décisions qui se prennent lors de repas d’affaires. Pourquoi cette importance ? Bien sûr, se nourrir est un besoin vital de l'homme. Mais est-ce que cela suffit à expliquer la place centrale des repas et de l’hospitalité dans la Bible ?
En fait, derrière ces scènes apparemment banales du quotidien, il y a autre chose qui se joue. Au-delà du fait de se nourrir, il y a la réunion de personnes; la table devient une occasion de rencontre. Or, la rencontre, ce n'est pas simplement l'addition de deux ou plusieurs personnes; c'est avant tout une affaire de relation, d’ouverture. J'aimerais ce matin parcourir 3 aspects de ce qu'est ou de ce que peut être la rencontre.

Elle est d'abord ouverture aux autres. Accueillir l'autre ou répondre à son invitation, c'est ouvrir une porte. C’est concrètement, franchir le seuil de sa maison. Mais quand on s'ouvre à l'autre et qu'on partage avec lui, c'est aussi des portes intérieures que l'on franchit.
Bien sûr, souvent cela prend du temps, il faut s'apprivoiser. Ça commence par des choses toutes simples : par un sourire, par une poignée de main. Puis on échange quelques mots : bonjour ! Comment ça va ? On parle du temps, de la météo, puis on s'invite; on arrive alors à échanger quelque chose de plus profond. On peut se dire alors des mots d'encouragement, se rendre service. Quand on fait tout cela, c'est plus que des mots ou des gestes; c'est quelque chose de soi-même que l'on donne à l'autre et qu'on reçoit. On n'a d'ailleurs pas toujours l'opportunité de vivre ce partage autour de la table. Il y a une communion qui peut se créer quand on partage à distance, à travers un échange de lettres ou par téléphone. Ainsi ce matin, nous sommes tous réunis : nous qui sommes présents dans ce temple et vous qui êtes présents par les ondes. Une relation se crée, nous vivons quelque chose ensemble.

Une dimension de la rencontre, cfiest donc l'ouverture aux autres. Mais toute rencontre est aussi une ouverture à soi-même. Si mes moments de convivialité avec quelqu'un sont riches, c'est aussi parce qu'elles me donnent un vis-à-vis, quelqu'un qui est différent de moi. Parce qu'à travers lui, à travers son regard, je peux m'ouvrir à moi-même, je peux me découvrir. Je peux apprendre à mieux me connaître. C'est un peu comme avec un miroir. Pour savoir à quoi je ressemble, il faut que je me regarde dans la glace ! Mon vis-à-vis peut jouer ce rôle de miroir. Il peut me surprendre, m'apporter un autre éclairage sur moi-même. Il peut me mettre en mouvement et me faire changer de regard sur moi. C'est un exercice parfois redoutable. Mais en me confrontant au miroir des autres, cfiest souvent là que je peux évoluer et grandir, comme Zachée.
C'est dans le face-à-face avec Jésus que pour lui, tout change. Il suffit que Jésus s'invite chez lui. C’est une surprise. Il vient loger chez lui, le pécheur ! La remise en question a lieu. Lui, on peut venir le rencontrer, l'aimer, le considérer comme quelqu'un de digne ! Zachée peut alors changer son regard sur lui, s'ouvrir à une autre dimension de lui-même qu'il ne connaissait pas. Parce que quelqu'un s’est ouvert à lui, il va à son tour pouvoir partager avec d'autres.

Dans la rencontre, je m'ouvre donc aux autres, à moi-même, mais il y a encore une troisième dimension à découvrir : celle de l'ouverture à Dieu. Comment comprendre ce verset de l'épître aux Hébreux : "En recevant bien ceux qui viennent chez vous, quelques-uns ont accueilli des anges sans le savoir." ? Dans les moments de partage, quand je m'ouvre à l'autre et à moi-même, c'est aussi à la dimension de Dieu que je m'ouvre, comme Abraham. Il aurait pu laisser les 3 visiteurs passer leur chemin. Mais il a choisi de leur ouvrir sa tente, de s'ouvrir à la rencontre. Et alors, quelque chose de Dieu a pu entrer dans sa vie.
Abraham et Sarah n'y croyaient plus. Ils ne seraient jamais père et mère. Et pourtant ce repas et ce partage ont permis au possible de Dieu d'ouvrir une brèche dans l'impossible. Abraham a pu entendre la promesse qui lui était faite d'avoir un fils de Sarah; il a pu à nouveau faire confiance. Parce qu'il a découvert, à travers cette rencontre, qu'il avait de la valeur, que Dieu s'intéressait à lui, il a pu être remis en marche, il a reçu des forces nouvelles.
Pour nous aussi cela veut dire que dans nos vies, il y a des possibles qui peuvent s'ouvrir, qu'au travers de nos rencontres, de nos repas partagés, de nos échanges, nous pouvons recevoir une force qui nous remet en route.

Les récits de ce matin sont donc une invitation à rester ouverts, ouverts à l'invitation de l'autre, ouverts à la découverte de soi, ouverts à la rencontre avec Dieu. A travers nos festins partagés, mais aussi à travers tout ce qui permet d’entrer en relation avec mon voisin, même si cela ne commence que par un sourire ! Comme pour Abraham et Zachée, que notre rencontre d'aujourd'hui soit l'occasion pour chacun d'être transformé et de recevoir des forces nouvelles. Amen !

Intercession

Seigneur, nous rêvons d'une maison pleine de rires et de chansons, une maison où la table est préparée pour nous, une maison où l'on ait hâte de retourner pour y rencontrer des visages amis. Merci, père, parce que c'est ainsi que tu nous ouvres la porte de ta maison.
Or il y a tant de portes à ouvrir chez nous, porte de ma maison pour les voisins et l'inconnu de passage, porte de mon jardin pour le visiteur, le flâneur en quête d’amitié, porte de ma voiture pour cette personne en détresse, porte de l'église pour le touriste et le pèlerin en recherche de paix.

Il y a tant de portes à ouvrir dans ma maison, porte de mes yeux ensoleillant la banalité du quotidien, porte de mes lèvres invitées à bénir le Créateur et mes frères de tous les jours, porte de mes oreilles captant les messages de joie et les cris de détresse, porte de mes mains grandes ouvertes à l'amitié et au partage.
Seigneur donne-nous d'ouvrir ces portes un peu plus chaque jour. Puissions-nous t'inviter à entrer dans notre vie, comme Zachée et Abraham t'ont invité chez eux. Viens demeurer chez nous.

Amen !

Détails

Avec la participation de
Orgue
Frédéric Jean-Mairet
Musique
Christian Reichen, chef de choeur