Jésus, compagnon de ma route

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Drôle de dimanche. Tout contre la fête de l'Ascension et, en même temps, si proche encore du traumatisme de Pâques. Car, voyez-vous, je suis persuadée que le matin de Pâques, n'a pas été pour les disciples du crucifié un matin heureux Ce matin-là, ils ont trouvé un tombeau vide et les femmes qui sont venues très tôt apporter les derniers soins au corps de leur Seigneur n'ont pas pu accomplir les gestes qui apaisent et bercent la peine. Comment pouvaient-ils imaginer une bonne nouvelle ? Comment pouvaient-ils croire à la vie ? Comment auraient-ils pu prononcer le mot espérance ? Le matin de Pâques, c'est d'abord le fond de la douleur, le choc de l'absence et le sentiment d'abandon.
Après, oui, lentement, au rythme de leur courage, au pas de leur compréhension, les disciples entreprendront le chemin qui va de la mort à la vie. Car mourir et naître au monde, c'est bien le même chemin. Ils apprendront à vivre avec Son absence, à croire sans Sa présence. Ils apprendront à traverser les doutes et à enterrer les illusions éclatées.
Au point limite de nos épreuves, c'est là que commencent nos résurrections. De Pâques à Pentecôte, c'est le temps et l'espace à parcourir pour mourir et renaître à la vie. De la tombe vide jusqu'au don de l'Esprit. De l'absence à la plénitude. De nos idéologies de tous poils à la rencontre de la vie, quand elle vient, comme elle vient.

Cela a été le chemin des disciples de Jésus. Cela a été le chemin du prophète Elie du fond du découragement à la rencontre de son Dieu au Mont Horeb. C'est le chemin obligé des chercheurs de sens, des chercheurs de Dieu. C'est le chemin et le signe de mon humanité, sans cesse pétrie, bouleversée, transformée et régénérée par ses pulsions de vie et de résurrection.
De Pâques à Pentecôte. C'est le temps nécessaire aux disciples pour se réveiller et pour redescendre sur terre, car oui, c'est bien là que nous avons à vivre et à célébrer Pâques.
C'est le temps nécessaire pour quitter nos illusions et nous réconcilier avec le bonheur, l'amour, la justice dont nous rêvons. Non, nous ne verrons pas Dieu. Mais personne n'a jamais vu Dieu, répond l'évangile.
Non, il n'est pas nécessaire de voir pour croire. Par contre, mes amis, il faut croire pour voir, pour tout voir, pour tout percevoir. Il faut croire pour rencontrer Dieu dans le bruit d'un fin silence, comme Elie sur le mont Horeb. De Pâques à Pentecôte, c'est le temps nécessaire à notre réveil et à notre relèvement.

De Pâques à Pentecôte. C'est l'espace nécessaire à la grâce de Dieu pour se faufiler dans le cœur et l'intelligence des disciples. Les quatre évangiles sont unanimes à parler de ce matin de Pâques. Et si les personnages présents varient selon les évangélistes, l'état d'esprit est le même : Le souffle manque pour courir dire la nouvelle.
L'espérance s'est usée dans nos rêves illusoires. Certes, le message des anges a été entendu, à savoir retourner en Galilée, retourner dans nos lieux de vie. Mais le courage et la motivation manquent. De Pâques à Pentecôte, il faut d'abord faire l'espace nécessaire à la grâce de Dieu.
Les disciples vont se retirer dans une maison à Jérusalem. Là, à l'écart de tout ce qui pourrait agresser leur douleur ils vont réveiller leurs souvenirs sans précipitation. Ils vont partager leur réflexion et approfondir la réalité de cette réflexion. Dans la confiance du camp de base ! Dans la confiance de la communauté des amis fidèles et sûrs. C'est un espace protecteur où j'ose me risquer à une parole, où j'ose mettre à jour une partie de ma vie intérieure, aussi concrètement que possible. C'est là que Thomas pourra dire : "Si je ne vois pas ses marques - et il me faudra plus que cela - si je ne mets pas mon doigt dans son côté et dans les marques des clous, non, je ne croirai pas."
De Pâques à Pentecôte, c'est un espace suffisamment large pour retrouver la faculté d'aimer et de se donner. Un espace pour vivre la réconciliation et le pardon. C'est l'espace qui permettra à Thomas de s'écrier : "Mon Seigneur et mon Dieu !"
De Pâques à Pentecôte, c'est le temps et l'espace nécessaires pour accueillir dans les dédales et les croix de ma vie un signe, une parole, une rencontre, une espérance qui donne sens à ma vie qui me relève et me remette en marche. Alors la vie nouvelle renaîtra. Les portes de nos maisons et de nos temples pourront s'ouvrir.

Quand Elie percevra le souffle ténu d'une brise de printemps, quand Elie aura rencontré son Dieu non pas dans la force des éléments déchaînés, mais dans la fragilité d'un souffle, alors il pourra se relever et redescendre de sa montagne pour transmettre son flambeau.
Quand les disciples pourront enfin retourner en Galilée, dans leur lieu de vie, là où Jésus les attend, ils entendront ses paroles : " Allez, Faites… " Aller, faire, avancer, aimer, oser, sont les verbes de nos résurrections.
Les doutes sont encore là ? Mais au fond que m'importe les pourquoi et les comment pourvu que Lui soit vraiment le compagnon de ma route et de mes lendemains. La beauté de la création, la beauté des arts, celle des cœurs, me donnent suffisamment souvent à croire qu'Il veille sur nos nuits sans sommeil, qu'il bénit nos rêves et qu'Il habite les corps de ceux qui s'aiment.

Amen !

Détails

Avec la participation de
Orgue
Anne-Lise Vuilleumier
Musique
Choeur des Mouettes