Ce soir, ce n'est pas le temps des discours ; c'est plutôt le temps de chanter, de célébrer, d'adorer et contempler. La naissance de Jésus a été annoncée par des anges qui chantent. Elle a été précédée par des témoins qui chantent : Elisabeth, Zacharie, Marie sont immédiatement devenus chantres du Christ, dès qu'ils ont été touchés. Et ce qu'on a retenu d'eux, ce qu'on a reçu d'eux, ce sont leurs cantiques (le cantique de Zacharie, le cantique de Marie) et il y aura ensuite encore le cantique de Siméon. Ils font écho sur la terre aux chants du ciel. Leur joie témoigne sur terre de la joie de Dieu.
Pourquoi donc sommes-nous venus ce soir ? Pourquoi nous sommes-nous mis à l'écoute de la Radio romande ? N'est-ce pas pour devenir chantres, pour participer au chant de l'univers, à la louange de ceux qui accueillent le Cadeau de Dieu ?
Je suis tout de même fasciné de ce que maintenant, partout sur la terre, on célèbre le Seigneur Jésus ; non seulement ici à St-Blaise, ni seulement sur les ondes de la radio et dans l'intimité de nos foyers, mais aussi à Bandiagara chez les Dogons du Mali et dans tous les pays, quasiment dans tous les villages du monde, on se réjouit et on se laisse rejoindre par le mystère de l'incarnation, dans le monde entier : un peuple chante son Dieu !
Il s'agit non seulement de chanter, mais de devenir chantre dans nos personnes, par nos vies, devenir chantre du cadeau de Dieu, chantre du don du Messie, chantre de son amour subversif.
Pour qu'un chant jaillisse d'une clarinette ou d'une trompette ou même un seul son, il ne suffit pas de souffler dedans ! Il faut que ce souffle trouve une résistance sur les lèvres du musicien dans le bec de l'instrument et qu'il puisse vibrer dans tout son corps. Pour que le chant jaillisse chez ces témoins originaux, chez Elisabeth, Zacharie, Joseph et Marie, il n'a pas suffi que le souffle de Dieu vienne ; Dieu a dû traverser les résistances de chacun. En tout cas, Zacharie n'y a pas cru d'abord, malgré qu'il l'ait espéré toute sa vie. Il était resté incrédule jusqu'à ce qu'il en devienne muet. Et Joseph ne voulait rien avoir à faire avec cette histoire jusqu'à ce que l'ange le convainque dans la nuit. Quant à Marie, son premier étonnement passé, elle questionne sans trop bien comprendre et elle acquiesce.
C'est alors le grand OUI au passage de Dieu dans sa vie, le OUI à la folie de Dieu, au souffle de l'Esprit-Saint, à la demeure du Christ en elle. Chacun a commencé ou fini par dire oui, ce oui plein d'un être, qui en a pris la mesure et qui s'abandonne à Dieu, qui consent à son chemin. Une fois les résistances ou les questionnements traversés, le Souffle-Saint résonne comme une trompette dans la vie de ces chantres.
C'est la conjonction du oui de Dieu et du oui de l'homme, conjonction de la joie de Dieu et de la joie de l'homme, du souffle de Dieu et du souffle de l'homme. Le miracle a lieu, Dieu est présent parmi nous, Dieu se rend présent à nous comme nous à lui. Présent en Jésus, le nouveau-né, et dans le chant qui le célèbre.
Ça n'a pas empêché les armées du roi Hérode ou de l'empereur César Auguste de sévir et d'opprimer les peuples. Ça n'a pas éliminé la folie des hommes. Jusqu'à aujourd'hui, tant de misères, de maltraitances et d'injustices sévissent encore sur terre. Mais là, autour de l'incarnation du Verbe, autour de la naissance du Christ, respire le poumon du cosmos. C'est là que bat le cœur du monde. Ce chant, ces cantiques auxquels nous nous associons, c'est la musique de l'univers.
Quand nous nous y associons, alors nous-mêmes, nous sommes traversés par cette musique qui transforme le monde et nos vies ; quand nous sentons nos résistances et finissons par nous abandonner à ce souffle dans un grand OUI à Dieu, alors nous-mêmes nous devenons les chantres du Très-Haut, en compagnie des anges et des premiers témoins.
Luc 2.18-20 : Tous ceux qui les entendirent furent dans l'étonnement de ce que leur disaient les bergers. Marie gardait toutes ces choses, et les repassait dans son cœur. Et les bergers s'en retournèrent, glorifiant et louant Dieu pour tout ce qu'ils avaient entendu et vu, et qui était conforme à ce qui leur avait été annoncé.
" Circulez, il n'y a rien à voir " disent les policiers pour disperser des attroupements de bandeaux.
Mais ici, ce soir, il y a à voir, et même pour les auditeurs de la radio ! Il y a à voir et à entendre pour ceux qui ont su ouvrir leur cœur, se laisser rejoindre et qui ont su voir de l'intérieur, voir le monde de l'intérieur. Voir et devenir chantres, participer au chant du Monde.
Après ça, qu'est-ce qui nous reste à faire ? Faire comme les bergers : s'en retourner louant et glorifiant Dieu au sujet de tout ce qu'on a vu et entendu. Faire comme Marie : conserver le souvenir de ces paroles et les repasser toujours dans notre cœur. Ça, ce fut l'œuvre de toute sa vie. L'œuvre de toute notre vie consiste à repasser dans notre cœur ce que nous avons perçu cette nuit, à le méditer et participer comme chantre à la musique de l'Univers !