Jésus nous a quittés parce qu’il nous veut libres

image

Écouter le culte :

Ce jour de la Pentecôte représente donc le moment où le St-Esprit fut donné aux humains. La Pentecôte est le jour de l’arrivée du St-Esprit sur terre, comme Noël est le jour de l’arrivée de Jésus parmi les hommes. Mais Jésus et le St-Esprit ont existé de tout temps, puisqu’ils sont aussi Dieu. Bien avant la création même de la terre. Ils existaient, comme le Père. Manifestation trinitaire de notre Dieu, de tout temps, puisqu’ils étaient déjà, avant que le temps lui-même, ne soit inventé par Dieu.
La Pentecôte n’est pas une fête d’origine chrétienne, mais bien juive, comme tant d’autres. C’est littéralement le jour de la cinquantaine, soit cinquante jours après Pâques, l’alliance entre Dieu et le peuple Hébreu, sorti d’Egypte. De nombreux juifs, revenus de nombreux pays, revenaient à Jérusalem pour cette occasion. De nombreuses langues étaient alors parlées ce jour-là dans la Ville Sainte.
Les apôtres, qui viennent d’élire Matthias, le 13ème apôtre, en remplacement de Judas l’Iscariote, sortent d’un grand traumatisme. D’un second grand traumatisme, aurais-je envie de dire, en effet, la crucifixion de Jésus, avec le reniement de Pierre, suivi d’un temps où tous les disciples ont dû se cacher pour ne pas partager le châtiment de leur Maître, a déjà été une terrible épreuve pour la communauté.
Puis voilà que Jésus, retrouvé, ressuscité, revenu parmi eux, leur est enlevé. Il leur est enlevé en échange de l’assurance de la venue du St-Esprit, certes, mais cela n’en représente pas moins un second traumatisme !

Et si Jésus était resté parmi les hommes? Si nous rêvions un peu d’un Christ, d’un Messie, qui ne serait pas retourné auprès du Père ? Essayons donc quelques scénarios : Tout d’abord, physiquement, Jésus serait certainement resté comme il était, le jour de sa mort, à 33 ans. Il n’aurait pas vieilli, car déjà passé par la mort. Il aurait changé de vêtements, peut-être, s’adaptant au fil des modes, au fil des siècles traversés, mais toujours vêtu simplement. Aujourd'hui, il aurait peut-être un jeans et un polo. Peut-être, une fois par an, nous aurions pu le faire venir au Wankdorf, à Berne, pour une journée d’enseignement. Mais, il aurait certainement un site sur l’Internet, où il répondrait déjà aux milliers de questions. Il voyagerait beaucoup pour guérir des malades, ressusciter des morts...
Il serait régulièrement invité à Infrarouge où le présentateur, où la présentatrice, l’interromprait toutes les 30 secondes. Les présidents américains le convoqueraient juste avant de déclencher une guerre, afin d’avoir sa bénédiction. J’ai quand même quelques gros doutes sur ce coup-là.
Mais tout cela n’a pas beaucoup de sens, car si Jésus était resté parmi nous, notre monde serait bien différent. Des siècles durant, nous avons fait la guerre en son nom. Nous avons passé pratiquement tout le Moyen Age à le revendiquer de notre côté tout en trucidant le voisin qui le revendiquait de même. Tout ceci n’aurait pas eu lieu. Au sortir du Moyen Age, les guerres de religion n’auraient pas eu lieu, elles non plus, puisque le Christ serait resté le Chef de l’Eglise et lui, aurait évidemment empêché tous ces sanglants et fratricides conflits.
Mais finalement, qu’aurions-nous pu encore dire nous-mêmes, sans en demander auparavant l’autorisation à Jésus ? Comment aurions-nous pu continuer à rendre la justice seuls ? Comment les ministres de l’Eglise, auraient-ils pu écrire une prédication, sans la lui soumettre auparavant ?
Eh oui, il ne sert à rien d’imaginer comment serait notre monde, si le Christ n’était pas parti, tant il serait différent de ce que nous connaissons. Mais que serait-il resté de notre libre arbitre? De notre capacité à discerner ? De notre besoin de comprendre ? De transmettre ? Paradoxalement, je réalise que Jésus nous a quittés parce qu’il nous aime. Il n’a pas voulu faire de nous des marionnettes, des êtres n’ayant plus envie de prendre des décisions sans lui en référer préalablement. Jésus nous a quittés parce qu’il nous veut libres.
Il est arrivé bien souvent, au cours des siècles, que les religions mettent le grappin sur les hommes et les femmes, mais jamais Dieu ni Jésus ! Cela a toujours été le fait d’autres hommes, qui se prenaient pour des dieux. Il n’y a rien de plus libre, que le message du Christ. De plus libérateur ! Cela dit, ce que nous avons fait de cette liberté n’est pas forcément très glorieux, évidemment la liberté est peut-être le bien le plus précieux qui nous a été donné, mais aussi le plus complexe à préserver !

Lorsque les apôtres reçurent l’Esprit-Saint, ils se mirent tout à coup à parler en d’autres langues, comme l’Esprit leur donnait de s’exprimer. Dans le Livre de la Genèse, nous nous rappelons que les hommes voulaient construire une immense tour, à Babel, afin d’atteindre le ciel. Dieu « sabote » cette construction en donnant aux ouvriers des langues différentes afin qu’ils ne se comprennent plus. C’est une rupture, dans l’histoire de la relation entre Dieu et les hommes.
A la Pentecôte, Dieu met fin à cette rupture, par l’Esprit-Saint, en donnant aux Apôtres le pouvoir de s’exprimer en plusieurs langues, qu’ils ne connaissaient pas, avant, afin que tous puissent les comprendre. Luc fait mention d’une douzaine de nations, formant l’entier du monde connu, au temps du Christ, une par apôtre. Quel magnifique symbole d’universalité.

A Babel, Dieu divise les hommes en leur ôtant la possibilité de se comprendre entre eux. A Jérusalem, Dieu donne aux Apôtres le don de se faire comprendre de tous. Nous assistons au rétablissement d’une alliance entre Dieu et les hommes, justement à l’occasion d’une Fête, la Pentecôte, qui commémore, comme par hasard, une alliance passée entre Dieu et Israël, libéré d’Egypte.
Pour nous, c’est extraordinaire! C’est une bonne nouvelle, pleine d’avenir ! Mais voilà, nous, nous avons le recul nécessaire pour comprendre tout cela. Sur le moment, à Jérusalem, les hommes ne comprennent pas. Ils se moquent en disant: Ils sont certainement ivres. Ces anciens complices de ce Jésus qui se prenait pour le roi des Juifs, ils ont noyé leur chagrin dans l’alcool et ils sont complètement sur Damas ! Je précise juste que, géographiquement, Damas pour Jérusalem est dans la même direction que Soleure pour les Vaudois.
Les Apôtres ont un comportement différent des personnes alors présentes, ils sont donc suspects, dans le meilleur des cas ils sont saouls, dans le pire, ils sont complètement fous ! C’est donc un moment de l’histoire où une intervention directe de Dieu, l’envoi du St-Esprit, passe aux yeux des hommes pour une folie. Folie parce que nous avons casé Dieu, nous l’avons cadré, avec prière de ne pas sortir de ce cadre, afin de ne pas nous perturber ! Dans notre besoin permanent de maîtriser, de contrôler, de nous rassurer, finalement, avons-nous encore de la place pour la folie de Dieu ? Folie de Dieu qui est plus sage que la plus grande sagesse humaine.
Nous vivons pour le travail, dans des conditions de plus en plus difficiles, pour l’argent, bien sûr, après lequel nous ne cessons de courir, mais aussi pour des gadgets électroniques dont nous n’avons aucune utilité. Un grand patron de l’industrie informatique disait, lors de la sortie du dernier produit-phare de sa société : «Je suis incapable de vous dire à quoi il sert, mais je ne me fais pas de souci, les utilisateurs trouveront très vite de multiples raisons de l’acheter !»

J’ai appris cette semaine que une seule requête, lancée depuis un moteur de recherche sur l’Internet, générait autant de consommation électrique qu’une ampoule de 100W allumée pendant une heure ! Alors qui est fou ? Dieu ou nous ?
Un vieux rabbin de Khelm raconte l’histoire d’un fou de son village, qui ne retrouvait jamais ses vêtements pour se rhabiller le matin. A tel point qu’il hésitait à dormir tout habillé ! Il eut cependant l’idée de noter sur un bout de papier l’endroit où il avait déposé chacun de ses habits, le soir avant de se mettre au lit. Le matin, il retrouva ainsi chacun de ses habits, mais se dit : « Mais, moi, où suis-je donc resté ? » Le pauvre bougre se chercha toute la journée, sans jamais pouvoir se retrouver. Il en est ainsi de nous, chaque jour, conclut le vieux Rabbin.
Alors si nous profitions de la folie de Dieu, en ce jour de la Pentecôte, pour tenter de nous retrouver un peu nous-mêmes. Pour retrouver un peu les autres, notre famille, notre prochain. Et puisse la liberté que Dieu nous a donnée, servir à nous aimer les uns les autres.
Amen !

Détails

Avec la participation de
Claudine Bosshard (lectrice)
Orgue
Blaise Christen
Musique
Groupe de yodeleurs L'Echo du Gros-de-Vaud, directeur Werner Grossenbacher.