Écouter le culte :
Choisir de regarder en haut
Il est question d’espérance dans l’actualité. Hier, le chef de la diplomatie suisse Ignazio Cassis parlait de la déclaration finale de la conférence qui réunit actuellement 92 pays pour la paix : Il a dit espérer « un pas dans la bonne direction ». (Nous aurons l’occasion de prier ensemble pour cette importante conférence après le message.)
Les thèmes d’inquiétude restent nombreux, sur le plan politique et écologique notamment. Je vous propose de chercher à ancrer notre espérance en écoutant ce que Dieu nous révèle dans la Bible.
Il y aura deux images, en lien avec la navigation maritime. La deuxième à propos d’une ancre très spéciale qui stabilise sans immobiliser. Et voici la première : c’est l’histoire d’un mousse, un jeune apprenti marin, que le capitaine d’un grand bateau à voile envoie réparer un élément dans la mâture. De là-haut, voyant la mer très agitée au-dessous, le jeune homme se sent mal, au point d’être proche de tomber. Il entend alors la voix forte du capitaine : « Regarde en haut ! ». Le mousse regarde vers le ciel : tout est stable, calme. Il peut alors mener à bien sa tâche, même si les circonstances « en bas », n’ont pas changé.
Bien des choses sont agitées autour de nous. Regarder en haut, c’est faire comme Jésus quand il priait le Père, les yeux tournés vers le ciel. Regarder en haut, c’est orienter notre attention vers Dieu et l’écouter. Regarder en haut, c’est considérer par la foi que nos limitations et souffrances présentes ne sont pas la réalité ultime.
La foi chrétienne ne nie pas les difficultés, elle les met en perspective. Je suis, nous sommes, chacune et chacun, comme le jeune mousse, dans des circonstances qui peuvent déstabiliser, mais avec la possibilité de regarder en direction du ciel, de choisir de croire en Dieu, et de bénéficier de son aide.
Jérémie, prophète de l’Ancien Testament au 6ème siècle avant Jésus-Christ, a connu des bouleversements extérieurs terribles, Il a été persécuté. Il a aussi vécu des troubles intérieurs intenses, alors qu’il se trouvait emprisonné dans un cachot, puis dans une citerne. Il était abattu. Des pensées douloureuses s’agitaient en lui. Mais il a fait le choix fondamental de regarder en haut, en s’exprimant ainsi : « Voici la pensée que je me rappelle à moi-même, la raison pour laquelle j’aurai de l’espérance : non, les bontés de l’Éternel ne sont pas à leur terme et ses tendresses ne sont pas épuisées. » (Lamentations de Jérémie 3, 21-22)
Littéralement, le prophète écrit : « Je fais revenir vers mon cœur ». Jérémie fait le choix fondamental de réorienter sa pensée profonde ; de regarder, par la foi, en direction de Dieu et d’affirmer la bonté de Dieu. C’est comme si Jérémie avait chanté avec nous : « C’est vers toi que je me tourne ».
C’est le choix fondamental de la foi : les circonstances de vie peuvent rester difficiles mais je choisis d’espérer en Dieu, lui qui est là au cœur de nos vies, bien vivant en Jésus-Christ.
Quelque 2’600 ans après Jérémie, un autre homme a fait une expérience similaire. Le journaliste français Jean-Paul Kaufmann a été retenu en otage pendant 3 ans au Liban. Lors de sa libération en 1988, voici ce qu’il a déclaré : « La Bible a appuyé, nourri ma foi et l’a affermie. Ça a été quelque chose de très important. La Bible s’est révélée être également le véhicule d’un encouragement spirituel : des histoires comme celle de Job, de Joseph vendu par ses frères, et bien d’autres, parlent de gens plongés dans l’adversité. Par leur foi en Dieu, ils s’accrochent à l’espérance et surmontent leurs tribulations. »[1]
Nourrir l’espérance par la Parole de Dieu
Vous et moi pouvons faire face à de l’adversité, rencontrer des circonstances malheureuses. Vous et moi pouvons choisir, comme Jérémie, Jean-Paul et tant d’autres, de nous accrocher à l’espérance en Dieu. Comment faire concrètement ?
Pour l’otage privé de liberté, c’est la lecture de la Bible qui a nourri sa foi. Voici un magnifique passage de ce Livre de Vie : « Tout ce qui a été consigné autrefois dans l’Écriture l’a été pour nous instruire, afin que la patience et l’encouragement qu’apporte l’Écriture produisent en nous l’espérance. » (Romains 15, 4)
A 800 mètres de la chapelle d’où je vous parle se trouve une statue du réformateur Guillaume Farel, à côté de la Collégiale, sur les hauteurs de Neuchâtel. Il est représenté avec une grande Bible ouverte. Je vous propose sa prière intitulée « Conduis-nous par ta Parole » :
« Que nous recevions ta Parole par ton Saint-Esprit, et que tout en nous soit rangé, conduit, accompli et gardé selon ta sainte volonté qui est révélée et manifestée dans les saintes Écritures. »
Oui, que le Seigneur nous accorde de gérer les agitations extérieures et intérieures en nous ouvrant à sa Parole et à son action au plus profond de notre coeur, pour que « tout en nous soit rangé et conduit » selon Dieu.
Espérer ici et maintenant, malgré tout
L’espérance peut être définie ainsi : « Vertu surnaturelle par laquelle les croyants attendent de Dieu, avec confiance, sa grâce en ce monde et la gloire éternelle dans l’autre (le monde à venir) ».[2]
Pour ici et maintenant, la grâce, c’est ce don gratuit que Dieu nous a offert en Jésus-Christ mort et ressuscité.
L’espérance chrétienne est fondée sur l’œuvre de Dieu dans le passé. Comme la Bible l’affirme : « Nous avons été déclarés justes en raison de notre foi, nous sommes en paix avec Dieu grâce à notre Seigneur Jésus-Christ. » (Romains 5, 1)
Cette confiance est associée dans ce texte à des circonstances de vie douloureuses, avec des détresses, qui exercent la persévérance, qui conduit à une fidélité éprouvée, qui nourrit l’espérance. Les grandes difficultés de la vie engendrent parfois des appréhensions, des peurs, qui peuvent nous limiter.
Espérer ici et maintenant, c’est affirmer notre foi. Espérer ici et maintenant, c’est faire nôtres les paroles du chant entendu il y a quelques minutes : « Tu m'as adopté·e, je suis de ta famille. / Tu m'as sauvé·e, alors je peux chanter : je suis enfant de Dieu. / Je ne suis plus esclave de la peur, je suis enfant de Dieu. / Tu m’entoures d’un chant d’amour. / Mes peurs se noient dans ton amour. »
L’amour à recevoir et à partager
Dieu s’engage à nos côtés pour rendre l’amour possible ici et maintenant : « Notre espérance ne risque pas de tourner à notre confusion, car Dieu a versé son amour dans notre cœur par l’Esprit Saint qu’Il nous a donné. » (Romains 5, 5)
Dans quel état se trouve votre réservoir d’amour intérieur ? Pouvez-vous vous laisser plus et mieux aimer par Dieu, pour pouvoir à votre tour plus et mieux aimer votre prochain comme vous-mêmes ?
Dieu a promis de verser son amour dans notre coeur, par son Esprit, dans un flux constamment renouvelé. Dieu nous appelle à nous ouvrir à lui, à nous laisser plus et mieux aimer par lui, afin d’être rendu·es capables d’aimer plus et mieux nos semblables. C’est l’espérance pour ici et maintenant. Et l’espérance nous porte aussi vers l’avant, vers la gloire éternelle dans le monde à venir.
Choisir de regarder en haut et devant
Pour la deuxième image maritime, retrouvons le jeune mousse qui est redescendu sur le pont. Les flots continuent d’être agités, et le capitaine décide de stabiliser le bateau pour éviter un accident contre des rochers. « Va aider l’équipe à jeter l’ancre. » L’ancre va s’accrocher au fond et le navire tient dans la tempête, sans partir à la dérive.
La sécurité du bateau dépend de la nature du fond où est fixée l’ancre. La Bible associe l’image de l’ancre à l’espérance, mais de façon très particulière : l’ancre de notre vie, ou l’ancre de notre âme, qualifiée de sûre et solide, est fixée dans le ciel, là où Jésus-Christ ressuscité nous a précédé·es (Hébreux 6, 19-20).
L’espérance ancre de notre vie n’est pas un ancrage statique, qui nous fixerait sur place. C’est une stabilisation dans le mouvement. Si la force d’attraction nous attire naturellement vers le bas, l’espérance chrétienne nous attire, elle, vers le haut et vers l’avant.
Le pasteur Pierre Maury a décrit Jésus-Christ comme l’horizon unique de l’espérance chrétienne : « Nous n’attendons pas quelque chose, mais Quelqu’un. »
L’espérance chrétienne se distingue de l’optimisme. Il ne s’agit pas d’envisager des circonstances qui seraient dégagées de toute difficulté, mais de choisir la confiance en Dieu qui a agi, qui agit et qui agira. Par le passé, Dieu a agi pour tout accomplir en Jésus-Christ afin de nous réconcilier avec lui. Ici et maintenant, Dieu agit en fortifiant notre foi et en nous remplissant de son amour. Et Dieu agira, chaque jour à venir, et pour l’éternité.
Pour l’heure, nous vivons encore des douleurs, des difficultés et des détresses, mais bientôt Jésus-Christ va établir pleinement son Royaume pour un avenir renouvelé dans la présence de Dieu. La création sera alors débarrassée de toute forme de mal et de mort. Un avenir glorieux nous est promis, en Jésus-Christ. Notre existence, même marquée par la maladie ou la mort, va vers un bonheur sans fin avec Dieu.
Quand j’ai appris il y a quelques années que je devrais désormais porter des lunettes de vue, cela m’a fait un choc. J’ai pris conscience que je vieillis et que je perds petit à petit des capacités. Mon espérance pour le futur, c’est d’être dans la présence de Dieu, dans la vie éternelle… avec un corps ressuscité qui n’aura plus besoin de lunettes de vue, notamment !
Je peux continuer à vivre des pertes, des difficultés, des épreuves. Mais je veux affirmer ma confiance en Dieu chaque jour : je choisis de regarder, par la foi, en haut et vers l’avant.
Une soeur a écrit, après avoir souffert comme esclave en Afrique au 19ème siècle : « Je suis définitivement aimée et quel que soit ce qui m’arrive, je suis attendue par cet Amour. »
Partager l’espérance
Pour conclure, comment mieux vivre chaque journée dans l’espérance ? Voici ce que je propose personnellement : en y pensant plus et en la partageant plus. Demain matin, dès le réveil, nous pourrions prier : « Merci Seigneur pour cette journée ! Chaque matin, tes bontés et tes tendresses se renouvellent. Tu m’aimes, je t’aime, et je te demande de m’aider à vivre chaque instant de ce jour avec foi, espérance et amour. » (Lamentations 3, 22 et 1 Corinthiens 13, 13)
Nous sommes appelé·es à aimer notre prochain. Je vous propose de penser à une personne que Dieu vous met à coeur, et de demander l’aide du Seigneur pour savoir comment communiquer à cette personne : « j’ai de l’espérance pour toi ». C’est une magnifique façon d’encourager nos semblables.
Espérer pour son prochain, c’est s’appuyer sur la confiance en Dieu qui a créé chaque personne et qui l’invite à regarder en haut et vers l’avant, par la foi en Jésus-Christ. Et nous pouvons le faire en nous appuyant sur un texte du prophète Jérémie dans la Bible : « Car moi je connais les projets que j’ai conçus en votre faveur, déclare l’Éternel : ce sont des projets de paix et non de malheur, afin de vous assurer un avenir plein d’espérance. Alors vous m’invoquerez et vous viendrez m’adresser vos prières, et je vous exaucerai. Vous vous tournerez vers moi et vous me trouverez lorsque vous vous tournerez vers moi de tout votre coeur. » (Jérémie 29, 11-13)
Je vous invite à prier pour la personne à laquelle vous pensez : Seigneur, merci d’avoir créé cette personne que je nomme dans mon coeur, merci parce que tu la connais, tu l’aimes et tu lui offres de regarder en haut et vers l’avant, de recevoir ton don de vie par la foi. Accorde-moi d’être pour cette personne témoin de ton amour, dans la foi et l’espérance.
Que le Seigneur nous soit en aide pour regarder en haut, vers lui, le Dieu vivant qui nous aime et qui nous appelle à aimer.
Qu’Il nous accorde d’aller de l’avant dans la foi et avec espérance pour nous et pour notre prochain.
Que Dieu nous bénisse et qu’Il soit glorifié en tout.
Amen.
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[1] https://www.croirepublications.com/blog/un-jour-dans-l-histoire/22-mai-1985-jean-paul-kauffmann-et-la-bible