Le légalisme, une gangrène dans l’église

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Lorsque nous répétions ce culte tout à l’heure, que le lecteur lisait ce texte de Luc 18, une paroissienne riait et me disait : « C’est fou, comme on est des fois comme lui, comme ce Pharisien à penser au fond « Nous, on est mieux que les autres. » Est-ce qu’on a ce regard critique sur soi, est-ce qu’on arrive à rire de soi et de ce regard parfois hautain que nous avons malheureusement tendance à avoir dans l’église ou peut-être aussi à l’extérieur dans d’autres domaines.
Ce matin, j’ai envie de dire : le légalisme, c’est la gangrène de l’église, c’est un mal qui la coupe quelque part de sa vie ; parce qu’on oublie bien souvent que Jésus était ami des gloutons, des ivrognes, des collecteurs d’impôts qui étaient vraiment mal vus à l’époque et des pêcheurs de tous bords. Il aurait aujourd’hui assurément recherché la compagnie de personnes honteuses d’elles-mêmes pour x raisons, qui leur appartiennent. Par contre Jésus a été très dur à l’égard des pharisiens, qui étaient considérés à l’époque comme les bons croyants, les chrétiens modèles – c’étaient pas des chrétiens, c’étaient des juifs – mais voilà, ils avaient la cote. Pourtant Jésus leur dit par exemple : « Vous, vous nettoyez le dehors de la coupe et du plat et à l’intérieur vous êtes pleins de rapine et de méchancetés.». L’air de dire au fond vous soignez l’apparence, mais à l’intérieur de vous ce n’est pas ça, c’est pas très beau à voir.
Dans ce texte que nous venons de lire, nous voyons ce pharisien qui est fier et plein d’orgueil, parce qu’il a une éthique irréprochable ; au fond, on a l’impression qu’il se dit qu’avec toutes les bonnes œuvres qu’il fait, cela doit suffire de faire pencher la balance du bon côté, sans qu’il ait besoin de recevoir le pardon. Et là quelque chose cloche, quelque chose ne va pas, parce que celui qui est au centre de notre foi, celui qui est au centre de l’évangile, Jésus, c’est quelqu’un qui aime donner le pardon, qui aime que nous puissions vivre de la grâce.
Il a des stocks de pardons en réserve pour nous dans le ciel et bien souvent, on n’ose pas faire appel à ce pardon. On n’ose pas, on a peur, on se gêne, parce que quand on nous donne gratuitement on se sent mal à l’aise, on se sent redevable, donc on se dit que l’on doit mériter le pardon. On doit faire des choses pour le mériter, on doit être bon, être juste, être parfait, irréprochable comme ce pharisien, mais au fond, cela fausse notre relation avec Dieu et avec les autres. Parce que si on se met à mériter le salut, à mériter le pardon, alors on s’endurcit, on se crispe sur l’obligation d’être des modèles et du coup, ceux qui ne seraient pas des modèles, on aura tendance à les regarder de travers, à les regarder avec mépris, comme ce pharisien qui méprise le collecteur d’impôt, parce que lui il est un peu voleur. Quand il récolte les impôts, il en prélève un peu plus que ce que César a déterminé et il le garde pour lui.
Alors il le sait très bien, mais au lieu de faire comme si de rien n’était, il ose le dire ; il vient devant Dieu et lui dit « Aie pitié de moi qui suis un pêcheur. » Il a cette attitude d’humilité, de franchise ; devant Dieu il ne se cache pas, il n’a pas un jardin secret qui serait sombre, honteux devant Dieu ; il ose venir en toute sincérité dire à Dieu ce qui ne va pas. Et bien souvent, on a en nous comme un esprit religieux qui nous fait penser que si on n’est pas parfait, on n’ a pas le droit d’aller à l’église ou de se dire chrétien, parce que on n’est pas à la hauteur.

Je crois que ce matin Dieu aimerait nous interpeller : sommes-nous de ceux qui s’excluent, totalement ou partiellement de la vie d’église, parce que nous pensons qu’il faut être parfait pour être chrétien. J’aimerais vous laisser cette parole qui est pour moi d’une grande importance
« Mieux vaut être un chrétien qui fait quelques bêtises mais qui se sait sauvé par grâce qu’un chrétien qui se donne l’illusion d’être parfait et qui cherche à se sauver lui-même. » Alors, je vous pose la question : Est-ce que vous avez l’impression d’avoir fait quelques bêtises ? Peut-être pas, mais est-ce que, comme le collecteur d’impôts, vous vous dites «Je peux venir devant Dieu en toute liberté, sans craindre son regard ; je peux aller à l’église en toute liberté sans craindre le regard des gens qui seront là, sans craindre leurs paroles. » Bien sûr, malheureusement, on a peut-être fait de mauvaises expériences, mais c’est un appel à être vigilent sur nos bouches, mais d’abord sur nos pensées.
C’est ce regard sur l’autre, ce regard de jugement qui est une gangrène au sein de l’église. Je crois que Dieu nous appelle à dépasser ce regard, à ne pas juger celui que l’on ne connaît pas, parce que, comme Emil Cioran a dit : « Ne juge personne avant de te mettre à sa place. » On ne peut pas se mettre à la place de l’autre ; on ne sait pas pourquoi il agit d’une manière plutôt que d’une autre ; on ne connaît pas son passé, sa vie, ses blessures, ses souffrances.
Seul Dieu nous connaît, seul Dieu connaît tout de nous. Il connaît tout de nous et ce texte de Paul aux Corinthiens nous dit qu’un jour viendra où il mettra en lumière ce qui est caché dans l’obscurité. Non pas qu’il mette en lumière des choses que nous avons faites pour nous humilier, non ! Il va mettre en lumière ce que les autres ne savent pas de nous et qui font qu’il y a des choses en souffrance dans nos cœurs, qui conditionnent notre manière d’être ou d’agir aujourd’hui. Mais Dieu va le faire en toute compassion, avec un amour immense, pas du tout pour nous humilier, mais simplement parce que Dieu ne juge pas à l’emporte-pièce. Il ne juge pas tout le monde avec le même regard, mais il a un regard plein de compassion sur chacun, sur chacune et il nous est dit qu’il révélera les intentions sincères du cœur des hommes.
Dieu regarde à notre cœur, à notre désir de bien faire et si parfois les autres ne nous comprennent pas, Dieu nous comprend et il ne faut pas avoir peur de venir devant Dieu avec ce que nous sommes, en toute liberté en toute sincérité et lui dire ce qui nous habite comme ce collecteur d’impôts. Dieu a des stocks de pardons pour nous et il se réjouit lorsque nous venons à lui avec tout ce que nous sommes, parce que, comme il nous est dit dans ce texte de Luc, lorsque le collecteur d’impôts retourne chez lui, il est en paix devant Dieu.
Alors que celui qui se crispe sur ses positions, qui ne veut pas avoir quoi que ce soit à se reprocher n’est pas aussi en paix devant Dieu ; les choses ne sont pas aussi limpides pour lui, il ne se sent pas complètement en règle avec Dieu. Nous avons quelque part besoin d’expérimenter le pardon de Dieu pour entrer dans la joie de l’amour fraternel de l’accueil de l’autre tel qui l’est, de l’accueil de l’autre sans jugement, sans un regard qui soit dur. Je crois que Dieu nous invite à un regard plein d’amour les uns sur les autres, un regard de compassion, de tendresse, d’amour, écoutons cet appel. Amen !

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Détails

Avec la participation de
Orgue
(sans)
Musique
Sylvain Jaccard( piano) et Frédérique Jaccard (flûtiste)