Écouter le culte :
Hommage à Dieu, Libérateur : c’est la couleur de notre culte de ce matin, sa tonalité, son mouvement. Nous voici libres de chanter Dieu sans retenue, de nous laisser aller, de nous « lâcher », comme la sœur d’Aaron, Myriam, dansant et frappant le tambourin. Aujourd’hui nous voici libres d’oublier un instant (une heure, une vie !) tout ce qui nous pèse et nous enserre, ce qui nous peine et nous englue. Libres de nous pousser nous-mêmes – car ce n’est pas évident du tout, je sais bien – nous forcer un peu à nous détendre, à rire et à faire rire, à sourire du moins – je pense à telle ou telle personne, en ce moment précis, qui doit s’accrocher pour goûter ne serait-ce qu’une miette de l’ « optimisme » de la foi; libres d’être un peu heureux, de ne plus avoir besoin que l’on nous plaigne, ni de nous plaindre d’autrui. Libres d’oublier le repentir lui-même, toute contrition et tout aveu, nos faiblesses et nos tourments et nos questions sans réponse : tout cela est englouti dans l’Evangile pascal.
Ecoutez ces paroles d’Etienne, voué au supplice ; lui, le premier martyr chrétien (premier d’un long et tragique cortège que de nouvelles victimes rejoignent aujourd’hui encore), Etienne au bord du gouffre et témoin de la force extraordinaire qu’il reçoit du Christ ressuscité :
Livre des Actes des Apôtres, au chapitre 7 :
35 «…Moïse que les Israélites avaient rejeté en lui disant: ‹Qui t'a établi comme chef et juge? ›, Dieu l'a envoyé comme chef et libérateur, par l'intermédiaire de l'ange qui lui était apparu dans le buisson.
36 C'est Moïse qui a fait sortir les Israélites d'Égypte, en accomplissant des prodiges et des miracles dans ce pays, à la mer Rouge et au désert pendant quarante ans.
37 C'est Moïse encore qui dit aux Israélites: ‹Dieu vous enverra un prophète comme moi, qui sera un membre de votre peuple.›
55 …rempli du Saint-Esprit, Etienne regarda vers le ciel; il vit la gloire de Dieu et Jésus debout à la droite de Dieu.
56 Il dit: «Écoutez, je vois les cieux ouverts et le Fils de l'homme debout à la droite de Dieu.»
Livre de l’Exode, chapitre 15, versets 1 et 2 :
Moïse et les Israélites chantèrent en l'honneur du Seigneur le cantique que voici: Je veux chanter en l'honneur du Seigneur: il a remporté une victoire éclatante, il a jeté à la mer chevaux et cavaliers!
2 Ma grande force, c'est le Seigneur, il est venu à mon secours. Il est mon Dieu, je le louerai; il est le Dieu de mon père, je proclamerai sa grandeur.
Le couronnement de la foi, c’est le chant, la musique, la reconnaissance ; car Dieu a fait « quelque chose » pour moi, pour nous, quoi ? Oui, quoi ? Dieu était-il vraiment à l’œuvre dans vos deuils, dans vos jours de maladie, dans le divorce de vos enfants, dans le dépôt de bilan de votre entreprise, dans le drame qui a touché votre voisin, dans le procès du fils de l’autre voisin, dans l’accident si bête qui tiendra votre amie une année à l’hôpital ? Dieu a-t-il apporté au moins quelque consolation ? S’est-il au moins intéressé à vous ? N’avez-vous pas été seuls, tout compte fait, dans vos creux ? Et par chance, on s’en est sorti !
Mais, impressionné, je regarde derrière moi : oui, je vois un visage – deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit visages – je me souviens d’une parole, je me rappelle l’air grave du médecin et surtout son assurance, par laquelle j’ai pu déposer ma confiance entre ses mains. Je vois des circonstances, des occasions, des opportunités que j’ai pu saisir, un changement de cap imprévu quoique secrètement attendu. Je veux relire ma vie à la lumière de la foi, la voir comme un cadeau, j’en ai la liberté : j’en suis heureux. Je ne crois pas au hasard, en tout cas pas au hasard souverain ni à quelque nécessité ou destin froid et mécanique. Toutes les pages de mon parcours ne sont pas belles, mais je veux les lire toutes à la lumière de l’amour du Père – loué soit-il ! – Lui par qui tout reste ouvert, possible, au-delà de tout !
Alors, apaisés, nous pouvons regarder devant, sans crainte ; aujourd’hui, c’est le temps du merci. Mais c’est vrai, il y en a eu des épreuves et des chutes, des peines, des menaces, du découragement !
Comme le chante le Cantique de Myriam de Schubert¹, des « monstres » nous ont guettés : rappelez-vous ces monstres qui passèrent tout près de chez vous, cherchant à entrer dans votre bonheur, dans votre intimité, y parvenant un jour ou l’autre, s’insinuant au milieu de vos relations. Le chant de Schubert les voit « intimidés » : ils ne sont pas dangereux ni méchants, ils ne peuvent plus l’être.
Alors « Passe ! » – nous dit Dieu, le Berger – « passe la mer ; prends tes doutes et tes questions sous le bras, ne les renie pas, prends-les avec toi, garde tes objections et ta raison, continue de refuser d’être crédule et trop naïf, mais n’aie pas honte de te reconnaître croyant, d’oser voir que la Terre promise, c’est aujourd’hui. Je t’accueille, je veux te libérer, comme j’ai libéré mon Fils de toute entrave. Libère-toi, joue, aime, malgré tout. Tu as du prix à mes yeux – dit le Seigneur Dieu ! – et je ne cesserai jamais de t’aimer, ni aucun de tes proches. »
Lecture du livre de l’Exode, chapitre 15, versets 20 et 21 (le cantique de Myriam) :
20 Alors la prophétesse Miriam, sœur d'Aaron, prit son tambourin. Toutes les femmes d'Israël la suivirent en dansant au son des tambourins.
21 Miriam reprenait devant elles le refrain: Chantez en l'honneur du Seigneur: il a remporté une victoire éclatante, il a jeté à la mer chevaux et cavaliers!
Le voilà donc, ce Cantique de Myriam, clair et bref, violent et joyeux, écho d’un temps lointain où Dieu était perçu comme héros des batailles, irrésistible, guerroyant à la tête de son peuple. C’est le chant d’une femme et de toutes les femmes d’Israël avec elle : après le drame terrible qui vient de se jouer entre les murailles d’eau, voici la légèreté de leur danse et de leur chant : elle exprime la liberté reçue, la joie surgissant du fond des épreuves.
Par amour, Dieu va dissiper les obstacles. Ce n’est pas une vieille histoire, ce n’est pas un vieux rêve. C’est possible aujourd’hui, pour vous, tant il est vrai que, dans la foi, le chemin, c’est déjà le but. L’auteur de l’épître aux Colossiens veut tellement que nous la sentions actuelle, cette libération, qu’il projette l’avenir dans le présent avec une audace extraordinaire : il ose écrire : « Dieu vous a fait revivre avec le Christ / vous êtes ressuscités avec lui. » :
Epître aux Colossiens 2, 12 - 15 – Le triomphe du Christ :
12 Quand vous avez été baptisés, vous avez été mis au tombeau avec le Christ, et vous êtes aussi ressuscités avec lui, parce que vous avez cru en la puissance de Dieu qui l'a ramené d'entre les morts.
13… maintenant, Dieu vous a fait revivre avec le Christ. Il nous a pardonné toutes nos fautes.
14 Il a annulé le document qui nous accusait et qui nous était contraire par ses dispositions: il l'a supprimé en le clouant à la croix.
15 C'est ainsi que Dieu a désarmé les autorités et pouvoirs spirituels; il les a donnés publiquement en spectacle en les emmenant comme prisonniers dans le cortège triomphal de son Fils.
Epître aux Colossiens, 1er chapitre – Louange au Christ, chef de l’univers :
12 Remerciez avec joie Dieu le Père: il vous a rendus capables d'avoir part aux biens qu'il réserve dans le royaume de lumière à ceux qui lui appartiennent.
13 Il nous a en effet arrachés à la puissance de la nuit et nous a fait passer dans le royaume de son Fils bien-aimé.
14 C'est par lui qu'il nous a délivrés du mal et que nos péchés sont pardonnés.
15 Le Christ est l'image visible du Dieu invisible. Il est le Fils premier-né, supérieur à tout ce qui a été créé.
16 Car c'est par lui que Dieu a tout créé dans les cieux et sur la terre, ce qui est visible et ce qui est invisible, puissances spirituelles, dominations, autorités et pouvoirs. Dieu a tout créé par lui et pour lui.
17 Il existait avant toutes choses, et c'est par lui qu'elles sont toutes maintenues à leur place.
18 Il est la tête du corps, qui est l'Église; c'est en lui que commence la vie nouvelle, il est le Fils premier-né, le premier à avoir été ramené d'entre les morts, afin d'avoir en tout le premier rang.
19 Car Dieu a décidé d'être pleinement présent en son Fils
20 et, par lui, il a voulu réconcilier l'univers entier avec lui. C'est par la mort de son Fils sur la croix qu'il a établi la paix pour tous, soit sur la terre soit dans les cieux.
Amen !
(1) Frank Schubert, cantate Mirjam’s Siegesgesang