Le texte que je viens de lire est extrait d'un dialogue entre Jésus et la foule des Juifs qui sont venus l'écouter. Je voudrais vous rendre attentifs à quelques éléments de ce dialogue :
- D'abord les interlocuteurs de Jésus : "plusieurs Juifs qui avaient cru en lui". Le fait que le texte parle de Juifs n'est pas étonnant : Jésus était lui-même Juif et son ministère s'est adressé en priorité à son peuple. Mais cette mention nous permet de dire quelque chose sur ces interlocuteurs de Jésus : c'étaient des hommes religieux, préoccupés de servir Dieu préoccupés de lui obéir de la meilleure manière. Ils étaient fiers à juste titre de leurs origines, de leurs traditions et de leur histoire.
De plus c'étaient des hommes ouverts, puisqu'ils étaient venus écouter Jésus et qu'ils avaient cru en lui.
- En face de ces hommes, ce texte nous dit aussi quelque chose sur Jésus. Jésus ne correspond pas à l'image que beaucoup se font de lui. Il n'apparaît pas ici comme un personnage très doux et tolérant. Il ne met pas forcément les gens à l'aise. Son discours ne chatouille pas forcément non plus notre soif de spiritualité.
Jésus affirme avec autorité. Il n'a pas peur de susciter la contradiction et même la révolte de ceux qui l'entendent.
- Alors que dit-il à ces Juifs qui avaient cru en lui ? Il leur parle de liberté : c'est le thème central de ce passage. (v. 31b-32) "Si vous voulez devenir des hommes libres, il vous faut demeurer dans ma parole".
Demeurer dans la parole de Jésus, cela veut dire grosso modo s'attacher à Jésus, persévérer à croire en lui et à obéir à tout ce qu'il dit. Jésus leur dit : "C'est ainsi que vous serez vraiment mes disciples, c'est ainsi que vous connaîtrez la vérité, et c'est la vérité qui vous rendra libres".
Drôle de liberté et drôle d'affirmation. Si je paraphrase, Jésus dit : "Si vous voulez être libres, alors obéissez-moi".
- Mais ce n'est même pas cela qui choque les interlocuteurs de Jésus. Ce qui les heurte, c'est simplement que Jésus les invite à la liberté : "Hé ho . Tu veux nous rendre libres, merci ! Mais nous sommes déjà libres ! Nous n'avons jamais été esclaves de personne !"
- Alors Jésus renchérit. Il commence par ces mots : "En vérité, en vérité, je vous le dis..."
Quand Jésus commence une phrase comme cela, c'est toujours parce qu'il va dire quelque chose de particulièrement "difficile à avaler" pour ceux qui l'entendront.
Voici ce qu'il leur dit : "Quiconque commet le péché est esclave du péché"; votre liberté n'est qu'une illusion, vous êtes en fait esclaves du péché.
Jésus utilise ensuite une image, celle de la maison ( v.35).
La maison, c'est la maison de Dieu. C'est une image de la possibilité de vivre avec Dieu, de connaître une communion, une intimité avec lui.
Or contrairement au fils, qui a sa place dans la maison, l'esclave du péché n'a pas de place assurée et permanente dans cette maison. La communion avec Dieu et la liberté qui l'accompagne lui sont refusées.
- Et Jésus conclut : v. 36. La liberté que Jésus propose à ceux qui l'écoutent, c'est la liberté du fils ou de la fille dans la maison. La liberté de vivre une relation filiale, une intimité, une communion avec Dieu. Seul le Fils peut nous donner cette liberté, et c'est cela la vraie liberté.
Je voudrais maintenant revenir à cette affirmation de Jésus : "Quiconque commet le péché est esclave du péché". Elle a choqué les Juifs qui écoutaient Jésus. Elle peut aussi nous choquer à plus d'un titre. Dans notre société la liberté est une valeur très à la mode. "Liberté chérie, que de crimes on commet en ton nom". Tous nous revendiquons notre droit à la liberté. Nous n'aimons pas être confrontés à tout ce qui menace et restreint notre liberté chérie, pourtant ces choses existent : les autres, la vieillesse, la maladie, la souffrance, la mort. Mais Jésus affirme que derrière tout cela, il y a quelque chose d'encore plus fondamental, qui nous rend esclaves : le péché. Jésus ne développe pas, il n'explique pas, il affirme : vous êtes esclaves du péché, et à cause de cet esclavage vous ne pouvez pas demeurer dans la maison de Dieu.
Cette affirmation, on peut la justifier, l'expliquer, on peut aussi la rejeter, l'ignorer, etc. Mais peut-être aussi que nous pouvons reconnaître la chose suivante : ce qui est vrai, c'est que je ne suis pas à ma place dans la maison de Dieu, je ne jouis pas de cette communion libre et intime avec Dieu, je ne connais pas cette liberté de fils ou de fille devant Dieu. Ma vie ne correspond pas au projet que Dieu a pour moi, je suis à côté, je suis en dehors. Je crois que c'est cela, être esclave du péché.
Ce que Jésus offre à ceux qui croient en lui, c'est de passer de cet esclavage à une vraie liberté. Et puisque nous ne connaissons pas en fait la liberté, il nous dit en quoi elle consiste : la vraie liberté, c'est d'être introduits comme des fils et des filles dans la maison de Dieu, c'est découvrir l'intimité, la communion avec Dieu. Je ne prétends pas avoir découvert toutes les richesses d'une telle relation. Mais le petit peu que Jésus m'a déjà donné d'en goûter transforme toute ma vie. Je n'ai rien de plus précieux, et je crois aussi que ce que je vais encore découvrir dans cette communion avec Dieu par Jésus-Christ dépasse ce que je peux imaginer.
Alors c'est passer de l'esclavage à la liberté, c'est devenir ces fils et ces filles dans la maison de Dieu ? "Si le Fils vous rend libres, vous serez réellement libres". Jésus s'appelle lui-même "le chemin, la vérité et la vie" : "Je suis le chemin, la vérité et la vie, nul ne vient au Père sinon par moi" (Jean 14,26)
Il ne s'agit pas seulement de croire en Jésus mais de demeurer dans sa parole : si vous demeurez dans ma parole, vous êtes vraiment mes disciples, vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres".
Autrement dit, Jésus vous invite à vous attacher tout entiers à lui et à lui seul, à adhérer à lui de tout votre être. C'est en lui que vous trouvez le chemin, la vérité et la vie. C'est en vous attachant à lui, qu'il vous délivre de l'esclavage du péché sous toutes ses formes. C'est lui qui vous libère du mensonge, de vos libertés illusoires, en vous faisant goûter à la vérité qui est en lui.
C'est lui qui vous introduit dans une relation vraie et profonde avec Dieu.
Jésus est vivant aujourd'hui, et chaque homme est invité à le rencontrer, à s'attacher à lui, à découvrir tout ce qu'il a fait pour vous et quelle est la liberté glorieuse dans laquelle il veut vous introduire. Il n'y a pas pour cela de recette ni de méthode. Mais il y a une invitation à chercher Jésus-Christ de tout votre coeur, à vous laisser rencontrer par lui, à lui demander de se révéler à vous d'une manière nouvelle et de vous attirer près de lui : c'est son désir de répondre à cela, et il sait comment faire.
Amen.