Lavez les pieds, levez les pieds ! C’est ce que je comprends dans ce texte et que je souhaite expliquer. Deux messages pour une même histoire. Lavez les pieds, levez les pieds !
Si par exemple je vous avais dit : levez le pied ! Oui parce que les disciples ils ont dû lever le pied, un peu, pour se les faire laver. Si par exemple je vous avais dit : levez le pied et bien tout le monde aurait compris autre chose. Lever le pied ! Ralentir. Retirer son pied du champignon des gaz et prendre une vitesse inférieure. Lever le pied ! Comme dans tous nos métiers, faire moins pour gagner plus.... de temps.
Lavez les pieds, levez les pieds ! Eh bien c’est tout autre chose. C’est une histoire qui a deux sens et dont je vais débrouiller, débroussailler ce que nos pipelettes chéries nous ont narré.
Le texte biblique raconte ceci : un geste de Jésus sur les pieds de ses disciples reçoit deux explications.
§ D’un côté : Jésus est celui qui vous fait du bien
§ De l’autre : faites de même, faites pareil
D’un côté : ce n’est pas parce que je suis au centre que je suis supérieur aux autres. Ce n’est pas parce que je suis l’homme ou la femme principal d’une société, de ma famille, directrice, syndic, politicien, sportive d’élite que je suis supérieur aux autres. De l’autre côté : bougez-vous, vous tous !
J’ouvre un spot publicitaire pour vous vendre un tableau : Tableau historique à vendre. C’est une image, une croûte en fait. C’est une image de lavement de pieds. Il y a 2000 ans, la plupart des gens voyageaient à pied. Quand je dis voyager, ce n’était pas partir pour les vacances, c’était aller au village à côté, cela suffisait à en faire un voyage.
Les routes romaines bien pavées étaient rares. Le plus souvent et le plus confortable aussi c’était la terre battue, elle permettait de marcher en souplesse. Comme on avait au pied soit des sandales soit rien du tout, homme ou femme, à l’arrivée, vos pieds forcément étaient poussiéreux ou sales.
[Anecdotes d’il y a 20 ans : J’ai eu la chance de voyager dans un pays du Moyen-Orient et le matin en sortant de mon hôtel à CHF 1.– la nuitée – je ne vous mens pas, mais vous imaginez la banlieue – je trouvais toujours les rues de terre battue jaune ocre avec des flaques d’eau. Je me disais qu’il avait dû pleuvoir. Tu parles, le ciel était bleu jour et nuit et il pleuvait en moyenne 3 jours par an.
Donc, rues mouillées le matin. Un beau matin je comprends, une fenêtre s’ouvre, une femme verse son pot de chambre dans la rue, en terre battue. Explication des rosées matinales, ensuite, vous regardez la rosée autrement. Fin de l’anecdote voyage.]
Je reviens donc au tableau que j’essaie de vous vendre : quand on entrait chez les gens, quelqu’un devait vous offrir de l’eau et un linge et vous laver les pieds. Il y avait toute une hiérarchie du laveur de pied. L’esclave, l’enfant, la femme et si vraiment on ne trouvait personne - l’homme de la maison. Une fois les pieds propres, le voyageur entrait dans la maison propre, pouvait jouir des coussins, des lits, du tapis de corde, d’osier, voire de sols en mosaïques, chez les plus riches.
Donc mon tableau c’est l’image de quelqu’un qui lave les pieds d’un autre devant une maison, tout cela sur fond de paysages bucoliques d’un l’Orient pauvre, mais heureux. Fin du tableau historique, si quelqu’un achète ?
J’ai dit dès le départ, lavez les pieds levez les pieds et ce n’est pas une erreur. Ce n’est pas lavez les pieds qui m’intéresse dans cette histoire, mais levez les pieds. Et c’est pour la raison suivante : il n’y a de chrétiens que là où des pieds sont levés. Je crois que c’est la clé de voûte de cette histoire. Il n’y a de chrétiens que là où des pieds sont levés.
Je m’explique : Là où tout est arrêté dans l’aide que nous apportons aux autres, nous ne sommes plus chrétiens. Là où tout est arrêté et que nos deux pieds sont rivés au sol dans l’impossibilité de se mobiliser pour se salir en route, en chemin vers les autres, le christianisme est mort. Le christianisme est une histoire de pied levé.
Je vous raconte une petite histoire touchante : pour l’avoir vécue j’en ai eu beaucoup d’émotion. Dans un EMS une dame se mourrait et certains des résidants, des habitants de l’EMS comme on dit aussi, venaient lui dire au revoir et dans ma mémoire je revois les pantoufles jaunes d’une vieille dame, ses pieds décollaient à peine du sol, se glissaient le long du couloir, pas à pas, pour aller au bout de son chemin, de son idée, aller voir l’autre. L’autre qui s’en allait.
Il n’y a de chrétiens que là où des pieds sont levés. Il n’y a de chrétiens que là où des pieds sont levés. Vous voyez, cette émotion de voir une petite dame user ses forces pour un beau geste. Lever les pieds, même si en vérité, elle patinait.
Si j’étais catéchumène, je casserais l’ambiance ici et je dirais alors, ou du moins je le penserais, non je le dirais à mon voisin, un truc du genre : et les unijambistes, ou ceux qui sont en chaise roulante, alités, y font quoi ? Impitoyable !
Amis fatigués, handicapés, alités, vous, vous avez compris. On peut y aller. Se bouger vers l’autre n’est pas qu’une question de validité, de mobilité et les plus handicapés ne sont pas fatalement ceux que l’on pense.
Côté jeune, c’est fou ce qu’ils ont de la peine à aller chez un autre que leur meilleur copain, leur meilleure copine. Il y a comme une barrière, et ce n’est pas parce que la route est sale. C’est parce que les pieds sont collés. Ils sont nos pieds dans la glu, non du handicap, mais d’un syndrome du pied enraciné. On dirait une maladie !
Là, je regarde les pieds de mes paroissiens ! Jolies chaussures ! Baskets ! Chaussures de femme. D’homme. Bien cirées, ripolinées, un peu de poussière mon cher. Couleurs ! Et si à la sortie du culte nous nous étions organisés pour vous laver les pieds, pas les chaussures, non, non, les pieds. Si à la sortie du culte pour prendre l’histoire au pied de la lettre je vous lavais les pieds. Je suis sûr que vous seriez horriblement gêné. Parce que les pieds font partie de notre intimité de nos jours. Et on ne les montre aux autres que quand on l’a choisi. Pieds propres, pas de transpiration, ongles soignés, mais pas comme cela sur le vif, sans préparation, non ! Vous imaginez, si à la sortie du culte tout est prêt pour vous laver les pieds. Cela serait étonnement dur à vivre.
Pourtant certaines églises, dont l’église catholique ont gardé cette tradition, personnellement je trouve fantastique, mais quand je vois les images à la télévision de Sa Sainteté le pape lavant les pieds propres de quelques membres du clergé plus un ou deux fidèles lambda, je suis gêné. C’est trop propre, c’est trop show.
J’ai appris que par contre c’était un geste qui se vivait très bien dans la communauté adventiste.
Levez les pieds, levez les pieds s’il vous plaît ! Jésus passe de la table où ils sont en train de manger, à la place réservée à l’accueil. C’est curieux. Ils étaient en train de manger et tout à coup, retour à la case départ. Il ôte son manteau, met le linge sur ses genoux, prend soit la cruche, soit la bassine, soit se met près d’une petite fontaine domestique, et il commence à laver les pieds de ses disciples.
Le texte de l’évangile de Jean en raconte l’histoire au chapitre 13 que vous relirez avec plaisir.
Question 1 : Est-ce que cela a été fait en arrivant ?
Réponse 1 : Je n’en sais rien.
Mais, cela fait du bien. Mettez-vous maintenant à la place d’un disciple. Du plaisir à se sentir respecté, ces mains qui vous touchent, ce contact de l’eau, ce linge et peut-être ce regard, ce sourire. Je suis intéressant pour ce maître. Il me fait les gestes de l’accueil dans sa maison, j’aime bien. Il me fait à moi les gestes de l’accueil dans sa maison.
On paie aujourd’hui pour se faire papouiller les orteils ! Jésus leur fait lever le pied pour leur faire du bien et même si Pierre y met son grain de sel et en veut plus, cela n’a pas d’importance. Simplement. Jésus l’a fait. What else ? Levez les pieds.
Lever les pieds, c’est ensuite notre devoir. J’utilise volontairement ce mot démodé de « devoir ». Lever les pieds, c’est aussi notre devoir. Parce que nous avons reçu. Parce que nos pieds, tout notre être, des pieds à la tête est accueilli par Dieu, nous sommes responsables de nous mettre en route et d’avoir de la poussière sur nos pieds, d’avoir de la poussière sur nos chaussures, sur notre voiture et je pourrais continuer une liste sans fin, qui n’exclut personne.
Jésus lave les pieds. Et nous, nous levons les pieds, car il n’y a de chrétiens que là où ont des pieds levés pour les autres. Lavez les pieds, levez les pieds au nom de Jésus Christ.
Amen !