Solar Impulse - Vivre par la foi

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Montée vers la lumière
Il y a une semaine, avec les catéchumènes, nous sommes montés à pieds à la Pointe de Cray. Ce sommet culmine à 2000 mètres et offre une vue superbe sur la Gruyère et le Pays-d'Enhaut. Nous sommes partis au milieu de la nuit de Château-d'Œx, pour arriver en haut suffisamment tôt pour accueillir le soleil. L'instant est magique lorsque les cimes commencent à se détacher dans le ciel et que la lumière, timide au début, emplit tout l'espace.
Cette montée vers la lumière requinque, comme on dit. Elle fait du bien. Il y bien sûr la satisfaction, la fierté de l'effort fourni et puis cette belle récompense du soleil qui nous accueille, de la lumière qui réchauffe notre cœur, au propre comme au figuré. Cette lumière nous en avons besoin. Difficile de vivre sans, je dirais même impossible. La lumière est synonyme de vie, d'élan, de courage, de confiance.

Solar Impulse
Cette montée vers la lumière me fait penser à une autre aventure que nous suivons dans les médias, mois après mois, c'est le vol du Solar Impulse, l'avion de Bertrand Piccard et de toute son équipe. Un avion qui ne vole qu'avec l'énergie que lui fournit la lumière, le soleil. C'est une belle parabole pour aujourd'hui et je vais m'y arrêter ce matin.
Cet avion a besoin de la lumière pour avancer. Le défi, c'est de voler aussi lorsque le soleil est absent, lorsqu'il fait nuit, et cela grâce à l'énergie emmagasinée quand le soleil brillait, avec l'espoir que, une fois la nuit passée, le soleil brille à nouveau et recharge les batteries. Cette façon d'avancer, me fait penser à la manière dont Dieu me demande de vivre. Vivre par la foi, en Lui faisant confiance. Aller de l'avant avec ce que Dieu m'offre, ne sachant pas toujours de quoi sera fait demain.
C'est pas courant de nos jours, de marcher sans connaître nos lendemains. Nous avons tous notre agenda papier ou électronique, en général bien rempli, parfois une année à l'avance. La Suisse est aussi un des rares pays où l'on peut être assuré trois fois pour la même chose. Il y a bien sûr des personnes qui vivent sans savoir ce que demain leur réserve, je pense à tous ceux qui ont perdu leur travail, ou qui n'ont plus d'argent suite à un placement douteux ou qui peinent à nouer les deux bouts avec à charge une famille nombreuse. Mais ils est rare que ces situations soient choisies, soient volontaires. Par contre, vivre par la foi, est un choix, une décision, qui peut parfois être stimulée par une réalité nouvelle.

Vivre par la foi
Prenons le peuple hébreux, qui pendant quarante ans a parcouru le désert. Une situation qu'il a choisie, qu'il a voulue, mais une situation qui s'avère difficile et qui demande du courage, de la patience et surtout de la confiance. Durant toutes ces années, le Seigneur a donné à son peuple, la manne, une nourriture inconnue, une nourriture miraculeuse. Il leur a offert de l'eau qui sort d'un rocher. Dieu a appris à ses enfants, qu'il leur était possible de vivre non pas de pain seulement, mais de toute parole que Lui, Dieu, prononce.
Chez nous, lorsqu'un jeune commence un apprentissage, cela dure en moyenne de 3 à 4 ans. Avec le peuple hébreux, cela a duré dix fois plus, quarante ans, une vie. Vivre par la foi ne s'apprend pas du jour au lendemain.
Et lorsque la nuit est là, comme pour le Solar Impulse, on se demande si l'on pourra voler jusqu'à ce que le jour revienne, si l'on ne va pas se « crasher » avant. Cela demande du courage, de la confiance. Pendant quarante ans, le peuple a appris à dépendre de Dieu seul, de la lumière. Il a appris à traverser la nuit dans l'espérance du jour qui se lève et aussi dans la mémoire du jour qui a été.

Il y a 20 ans, alors que j'étais en Afrique, j'ai fais la connaissance d'un homme qui venait du Mali, Paul. Il était père d'une nombreuse famille, il avait quitté son métier d'instituteur pour suivre Dieu. Il étudiait dans une école biblique, sans savoir de quoi il vivrait par la suite. Il aimait profondément sa femme et ses enfants. Cela ne l'avait pas aidé pour lâcher toutes ses assurances, financières professionnelles, sociales, pour suivre Dieu. Il en avait parlé avec sa femme, ils avaient laissé mûrir leur réflexion quelques années. Paul depuis ce moment-là, continue de vivre par la foi, de dons, de privations aussi. Ses enfants vont bien, sa femme également, il vient de prendre sa retraite. Durant ces 20 années, il a fondé et accompagné des écoles chrétiennes dans son pays, il a suscité de nouvelles communautés, il a prêché. Paul reste pour moi un exemple d'une personne qui, au mitan de sa vie, change totalement sa façon de voir les choses, pour faire confiance à Dieu.
Lui qui avait des soutes pleines de kérosène, pour faire tourner ses réacteurs et avancer à cent à l'heure. Il a osé larguer ses réservoirs et se tourner vers la lumière pour poursuivre son chemin.
Lorsque Jésus a envoyé ses disciples devant lui, il leur a dit : « Ne prenez ni bourse, ni sac, ni chaussures. En route ! ». Les disciples aussi avaient largué leur réservoir de kérosène, eux aussi ont dû avancer en faisant confiance à la lumière.

Solar Impulse, pour ceux qui l'on vu passer au-dessus de leur tête, n'est pas un foudre de guerre, il avance lentement, à la limite du décrochage. C'est l'inverse de tout ce que nous voyons autour de nous: un monde qui va de plus en plus vite, le courrier électronique, les trains à grande vitesse, l'information par Internet, nos appareils à peine achetés et déjà dépassés, des avions de plus en plus nombreux et rapides, sans parler de la fréquence soutenue au travail et l'illusion qu'il faut toujours en faire plus. Ce monde est épuisant, et pendant ce temps, Solar Impulse passe tranquillement au-dessus de nos têtes, avec ses grandes ailes, ses hélices, sans qu'on ait besoin de se boucher les oreilles.
On se retrouve presque au temps de Failloubaz, ce pionnier de l'aviation, qui à 18 ans à Avenches, faisait voler le premier avion en Suisse, une structure hyper légère, un petit moteur et une hélice. C'était il y a 100 ans, Failloubas a relié Avenches à Payerne. Solar Impulse, c'est un peu le grand frère ; lui aussi s'envole de la Broye, il a relié Genève il y a 3 semaines.
Vivre par la foi demande de ralentir, de prendre le temps, de vivre le temps, d'apprécier le parcours plus que le but. Il y a des choses que l'on aimerait faire aujourd'hui et qu'il faudra remettre à demain, voir au surlendemain, et alors ! Bien sûr, c'est à contre-courant de tout ce qu'on entend.
Solar Impulse, comme l'avion de Failloubaz a dû se faire léger. Comme les disciples de Jésus, il s'est envolé en laissant au sol ses chaussures, sa bourse, son sac. Vivre par la foi, c'est voyager léger. Ce n'est pas désagréable de se sentir léger, au contraire, mais à nouveau, cela demande un apprentissage, qui peut prendre du temps. Je lisais dernièrement un article qui parlait d'un homme aux Etats-Unis qui essayait de vivre en ne gardant que 100 objets. Le reste il l'avait jeté. C'est un peu excessif, bien sûr, mais la direction est bonne, on peut vivre léger.

Besoin des uns et des autres
L'apôtre Paul est aussi un de ces hommes qui a fait confiance à Dieu, jour après jour. Dans sa lettre aux chrétiens de Corinthe, il écrit : « Nous désespérions de conserver la vie. Il en fut ainsi pour que nous apprenions à ne pas placer notre confiance en nous-mêmes mais uniquement en Dieu », et il ajoute : « Oui, Il nous délivrer, et vous y contribuerez vous-mêmes, en priant pour nous. » Paul, non seulement fait confiance à Dieu, mais sait aussi qu'il est porté par la prière de tous ces amis. La communauté priante est nécessaire.
Souvent, arrivé à un certain âge, on se demande comment se rendre utile, nos forces n'étant plus ce qu'elle étaient. La prière est une belle façon de transformer les actes en bénédiction, que ce soit nos propres actes, comme les actions de ceux pour qui nous prions.
Solar Impulse n'aurait jamais volé sans le soutien de toute une équipe, plus de 50 ingénieurs et techniciens, plus de 100 scientifiques. André Borschberg, le pilote, témoigne : « J'avais un énorme soutien au sol qui m'envoyait une telle énergie. Je suis persuadé que cela n'aurait pas été la même chose si j'avais été tout seul. »l Il en est de même pour chacun de nous, nous vivons tous à un certain degré, par la foi. Et tous, nous avons besoin d'une équipe au sol, de quelqu'un qui prie pour nous. Cela peut être une grand-maman, en train de tricoter dans son fauteuil, un prêtre qui dit sa messe, un enfant dans sa chambre. De même, nous pouvons également offrir notre contribution pour que toute vie de foi soit portée par la lumière. Cela peut se concrétiser par notre accueil, notre hospitalité. Les disciples ont été accueillis et ils apportaient dans la maison ouverte, un peu de paix, un peu de lumière.
Solar Impulse projette un jour de faire le tour de la terre. Comme un certain Breitling Orbiter parti de Château-d'Oex, il y a quelques années. Faire le tour de la terre, grâce à la lumière. C'est un peu ce que les 72 disciples ont été appelés à vivre lorsque Jésus leur a dit: En route ! Ces personnes que Jésus a envoyées, c'était l'Eglise universelle qui se mettait en marche. Des hommes, des femmes apprenant à vivre de la lumière.

Conclusion
Solar Impulse est une belle parabole pour nous aujourd'hui. Bien sûr, on peut se dire, à quoi bon ? Pourquoi tant d'argent dépensé, n'y aurait-il pas mieux à faire ? Et puis autant de technologie pour se déplacer à la vitesse d'un tracteur, c'est risible.
Il est possible que les premiers disciples ait été accueillis par des réactions semblables. Mais Solar Impulse est pour moi une belle image du chemin de foi que Dieu m'appelle à vivre. Oser lâcher mes assurances, accueillir le soleil, prendre le temps pour me déplacer, pour être déplacer, compter sur l'équipe au sol et garder confiance la nuit, sachant que je ne suis pas seul et que le jour va bientôt se lever. Avec le psalmiste, je peux dire alors : « Tu m'as saisi la main droite, Seigneur, j'ai confiance en toi. » (Ps 73, 23, 28) Amen !

Détails

Avec la participation de
Orgue
Wojtek Wezranowski
Musique
Charlotte Oesch, trombone