Écouter le culte :
Cette semaine, vous l’aurez remarqué, nous avons beaucoup entendu parler de la fin de monde qui, selon le calendrier maya, aurait dû avoir lieu le 21 du 12 2012, c’est-à-dire vendredi. Aujourd’hui, ouf, nous sommes encore là. Nous pouvons le prendre avec du recul, saupoudré d’une pointe de dérision, mais tout de même… Est-ce que toute cette effervescence ne dit pas quelque chose de nos peurs, de nos angoisses, en lien avec la fin du monde ?
Les disciples, eux aussi, attendaient la fin, c’était là leur grande préoccupation. Ils attendaient surtout le retour du Christ, mais celui-ci se faisait attendre, justement. Vous le savez bien, quand vous êtes à l’arrêt de bus ou chez le médecin, attendre, cela peut être très très long ; et plus cela dure, plus cela devient inconfortable, voire inquiétant. « Dis-nous quand cela se passera, et quel signe indiquera le moment de ta venue et de la fin du monde », demandent les disciples, inquiets, à Jésus tout au début du chapitre 24 de l’Evangile de Matthieu.
En effet, attendre peut être parfois difficile, voire angoissant. En décembre, nous attendons la bonne nouvelle de la naissance de Jésus à Noël, mais bien souvent, ce mois d’attente est tout sauf évident, non seulement à cause du stress et d’un agenda souvent trop rempli, mais aussi à cause de blessures en lien avec des deuils réveillés par l’approche de Noël, ou encore de la violence autour de nous, comme cette année la fusillade de Newtown aux Etats-Unis. En décembre, les ténèbres gagnent du terrain, et nous, nous avons besoin de lumière. Alors… comment attendre, à la fois cet heureux événement de Noël et à la fois ce Retour du Christ que les chrétiens de tous temps ont attendu ? Comment attendre alors que nous sommes plongés dans nos obscurités ?
La parabole que nous venons d’entendre, parabole dite des dix vierges, est tout sauf un texte facile. Si beaucoup d’éléments de cette parabole pourraient être relevés, interrogés, commentés, permettez-moi d’en souligner trois points.
Premièrement, deux thèmes clefs traversent ce texte: le retard du maître et la question de la responsabilité. En effet, au cœur de l’unité que forme le discours sur les temps derniers de Matthieu 24 et 25, cette parabole développe, comme les paraboles qui l’entourent, le thème du retard du retour attendu du Marié dans la parabole, du Christ donc, qui avait été annoncé par les Ecritures ; en outre, l’image des noces, comme souvent dans la Bible, fait référence au jugement dernier et exhorte à la responsabilité, individuelle ou collective : il faut prévoir assez d’huile, et être prêt.
Ainsi comme le montrent ces deux éléments, ce qui compte dans la parabole, ce n’est pas la noce, son déroulement, donc pour Matthieu et les disciples la fin du monde, le retour du Christ, et comment cela va se passer ; non, ce qui compte, c’est bien ce qui précède : l’attente, et la responsabilité en lien avec celle-ci.
Deuxièmement, j’aimerais souligner un élément qui peut paraître secondaire dans ce récit, mais qui me semble tout à fait essentiel : le récit se passe de nuit. De nuit, comme nos obscurités, comme les ténèbres qui nous envahissent. De nuit, car face à ces ténèbres, nous avons besoin de lumière, besoin d’espérance. C’est pour cela que dans la tente de la rencontre, comme nous l’avons entendu dans le texte de l’Exode tout à l’heure, l’huile du chandelier devait toujours briller la nuit pour rappeler l’espérance.
Et troisièmement, quelle est la différence entre les jeunes filles raisonnables ou imprévoyantes ? En écoutant la parabole, nous nous rendons compte que c’est tout sauf facile d’attendre. Toutes, je dis bien toutes, s’endorment. Non ce qui fait la différence, ce qui les rend raisonnables, c’est d’avoir de l’huile en suffisance pour être prêt, pour tenir bon et être là au bon moment. C’est d’avoir prévu, pensé en avance, à l’huile. Car dans la parabole, l’huile est facile à obtenir : il suffit de se rendre chez le marchand, mais encore faut-il y avoir pensé avant…
Donc, la parabole nous dit qu’il nous faut de l’huile (et un bon paquet) pour notre attente, pour être prêt. Mais qu’est-ce qui peut être « de l’huile » dans mon attente ? Qu’est-ce qui me permet de tenir bon dans les ténèbres ? Comme dans ces films de Peter Jackson, le Seigneur des anneaux, ou encore plus récemment dans le monde du Hobbit, le mal irradie dans le monde. Et face au mal, qu’est-ce qui permet de garder l’espérance, de ne pas désespérer dans mon attente ?
Oh, des sortes d’huile, il peut y en avoir une kyrielle. D’ailleurs sur mon mur Facebook, j’ai invité cette semaine mes amis, humains, Schtroumpfs, farfadets et êtres en tous genres, à poster ce qui est pour eux « de l’huile dans leur attente », ce qui les aide à tenir bon, ce qui leur donne de l’espérance. Et ce n’est rien moins qu’un feu d’artifice de différents types d’huile qui m’ont éclairé ; en voici quelques-uns, littéralement pour leur rendre justice :
Après ce qui s'est passé à Newtown je dois dire que je me suis posé plein de questions. Et voir tous ces gens qui se resserrent après une telle horreur, j'ai pensé à l'amour. Et finalement tout bien réfléchi, ce n'est pas ma famille mais bien cet amour qu'ils m'apportent qui éclaire ces journées d'ombres.
Le sourire d'un enfant, et ses bras qu'il tend vers nous plein de confiance chaque année. L'enfant s'appelle Jésus.
Un verset du psaume 86 : « Quand je suis dans la détresse, je t'appelle, car tu me répondras. » (86,7)
Le sentiment d'être aimé d'un amour inconditionnel par Dieu, et que, quoi qu'il arrive, Il est toujours là.
En tant que psy, ce qui m'émerveille chaque jour, ce sont les ressources présentes en chaque être humain, qu'il ignore parfois, qu'il découvre de manière inattendue, et qui lui permettent d'apaiser sa souffrance et de trouver un chemin vers encore plus de vie...
De l’huile qui nourrit l’espérance, cela pourrait aussi être vous, les autres, la communauté, la foi, la prière, etc. Et pour vous, qu’est-ce qui est « huile » dans votre attente ? Qu’est-ce qui nourrit votre espérance ?
Dès lors, notre responsabilité dans notre attente, selon cette parabole, c’est de prévoir notre huile, savoir s’appuyer sur ce qui nourrit notre espérance !
Prévoir notre huile, d’une part, mais ne pas oublier, d’autre part, que nous aussi, nous créons de la lumière autour de nous. Dans les camps, par exemple, comme au CéBéOVé en juillet, moment de communion entre chrétiens de tout âges. Moments de grâces où nous cueillons le jour : d’ailleurs, le titre du prochain camp sur le livre de Qohélét, l’Ecclésiaste, est « hakuna matata », expression en swahili que les fans du dessin animé Le Roi Lion connaissent bien : cueille le jour. Profiter des moments de grâce, c’est aussi cela, faire des réserves d’huile et se montrer avisé.
Mais n’oublions pas que Jésus nous dit à chacune, à chacun : « Vous êtes la lumière du monde » (Mt 5,14). Oui nous aussi nous pouvons être lumière pour les autres, nous aussi nous pouvons être de l’huile pour l’espérance des autres ! Comme dans ce concert de Gospel que nous avons donné il y a deux semaines avec des jeunes de l’Eglise Evangélique Réformée du Canton de Vaud, moment de lumière qui continue à rayonner dans nos cœurs et à nourrir notre espérance.
Aujourd’hui, nous attendons Noël et Celui qui vient. Dans nos vies, dans nos ténèbres, des signes apparaissent, signes de lumière, signes d’espérance. Regardez autour de vous, et vous pourrez en voir, des signes de Sa venue, comme ces objets inhabituels ici dans ce Temple de Lutry, avec les différents accessoires, podiums, micros, luminaires qui annoncent le jeu de Noël de demain soir 24 décembre à 23h qui sera également radiodiffusé. Mais dans l’intervalle, dans cette attente, n’oubliez pas d’une part de faire la réserve d’huile, de soigner ce qui nourrit votre espérance ; d’autre part, n’oubliez pas aussi d’éclairer les autres. C’est là notre double responsabilité. Car sans huile, sans espérance, sans lumière, ce serait vraiment… la fin du monde.
Amen