Écouter le culte :
Sarah
Vous avez le droit de garder le silence. Tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous.
Ellen
Silence.
Sarah
« De quoi discutiez-vous en chemin ? »
Ellen
Silence.
Sarah
Confrontés à la question posée par Jésus, les disciples se taisent.
Un silence qui sert à ne pas dire, à dissimuler, à cacher.
Les disciples ne sont-ils pas d’une certaine façon dans la position du coupable face à un accusateur ? Eux qui se sont querellés pour savoir qui parmi eux était le plus grand, qui parmi eux avait la meilleure réputation, le plus de prestige. Cette question de Jésus vient donc souligner leur égocentrisme, leur jalousie, leurs rivalités.
Ellen
Silence.
Sarah
Plutôt que d’avouer, les disciples se taisent, ils choisissent d’utiliser le droit de l’accusé à garder le silence.
Souvenez-vous, lorsque vous étiez enfant, n’avez-vous jamais fermé les yeux le plus fort possible, en espérant qu’ainsi vous ne seriez pas trouvé dans votre cachette ? Le silence joue ce même rôle. Ne pas répondre à Jésus nous protège, nous protège de lui révéler ce que l’on ne veut pas qu’il sache.
Personne ne révèle et ne confie volontiers les moments honteux de son existence.
Ellen
Silence.
Le silence comme une confiance
Nadine
Certes, se taire permet de dissimuler.
Mais là, celui qui pose la question s’appelle Jésus.
Verset 37 : « Quiconque agit envers moi, dit Jésus, d’une manière ou d’une autre, n’agit finalement pas envers moi, mais avant tout et uniquement envers celui qui m’a envoyé, c’est-à-dire Dieu. »
Ce qui revient à dire, que se taire, ne pas répondre à une question posée par Jésus revient non pas à ne pas répondre à Jésus, mais avant tout et uniquement à ne pas répondre à Dieu.
Or, est-il possible de dissimuler quelque chose à Dieu ? Dieu qui, scandent nos psaumes, sonde nos vies. Dieu qui nous connaît mieux que nous-mêmes. Dieu.
Pouvons-nous berner et abuser Dieu avec nos silences, nos dissimulations, nos feintes, nos stratagèmes ?
Si réellement Dieu est Dieu, au-dessus de ce que nous pouvons exprimer, au-dessus de ce que nous pouvons concevoir, avons-nous encore la prétention de pouvoir tromper cet immense mystère ?
Ellen
Silence.
Nadine
Et donc, si les disciples se taisent, c’est peut-être aussi parce qu’ils réalisent que face à Jésus, face à Dieu, toute parole, toute tentative de justification, voire tout aveu de culpabilité sont inutiles.
La liberté nous est laissée de dire, d’avouer, de nous confier ou non à Dieu.
Soyons juste conscients et lucides, Dieu le sait déjà.
La question de Jésus n’est pas inquisitrice. Elle est une demande de partage. Dis-moi, confie-moi ce qui te pèse. Je le porterai avec toi.
S’il y a un lieu, un geste dans lequel nous pouvons nous confier, c’est bien dans ce dialogue avec Dieu, que cela soit en prière ou en chantant, en méditant, en faisant du sport, de la musique, de l’écriture.
Ainsi, le silence des disciples n’est pas seulement le silence du coupable, mais il est aussi et peut-être avant tout un silence de confiance, un silence qui est acceptation de se confier à Dieu, acceptation de ne rien cacher à celui qui a envoyé Jésus pour nous dire que nous étions acceptés tels que nous sommes.
Sarah
« De quoi discutiez-vous en chemin ? »
Ellen
Silence.
Nadine
Il y a le silence de l’accusé, et puis le silence comme confiance, dialogue avec Dieu. Et puis il y a le silence des sans voix.
Le silence des sans voix
Sarah
Verset 36 : « Jésus prit un petit enfant, le plaça au milieu d’eux, et leur dit : Quiconque reçoit en mon nom un de ces petits enfants me reçoit moi-même. »
Ellen
En-fants. Dans votre langue, cela veut dire : sans voix.
Nous, les enfants, nous n’avons pas de voix. Chez nous, à l’époque, on n’avait rien à dire. On était les sans voix, comme il y a des sans-papiers aujourd’hui, des sans domicile fixe, des sans-patrie, des sans sous.
Ce jour-là, c’était un mercredi, en fin de journée. On était quelques enfants, filles et garçons.
J’ai vu ce groupe d’hommes, et j’en ai reconnu quelques-uns : les hommes qui accompagnent celui qu’ils appellent rabbin Jésus.
C’était un peu tendu entre eux, on l’a tout de suite senti.
C’est là que le rabbin Jésus a pris la parole, doucement, mais avec autorité. Et il s’est dirigé vers moi.
Quel choc !
Pourquoi moi, Myriam?
Je voulais fuir, mais je n’y arrivais pas.
Et c’est là qu’il a posé sa main sur mon épaule et qu’il a dit des choses qui sonnaient bien, qui m’allaient droit au coeur.
Quelque chose comme : pour être quelqu’un de bien, on doit s’occuper des petits enfants, comme moi.
Il m’a prise dans ses bras, on n’a pas forcément le temps pour les caresses – un vrai luxe !
Depuis ce jour-là, bien des choses ont changé dans ma vie. J’ai grandi, je suis mère de famille. Mais ce mercredi-là, alors que je n’avais que 7 ou 8 ans, j’ai appris une chose pour toute ma vie : l’espérance.
Par un simple geste, une étreinte, une parole : l’espérance m’a habitée pour toujours.
L’espérance qu’au-delà de la vie où il faut jouer des coudes pour être quelqu’un aux yeux de tous, au-delà de cette vie, une vie d’une autre qualité est possible, avec Dieu. De plus, ce jour-là, Jésus nous a dit que les petits et les oubliés, les sans voix, les espoirs et sans lendemains, nous avons notre place dans le dessein de Dieu.
Les sans voix, les sans rien, les insignifiants sont aussi importants pour Dieu.
Nadine
« De quoi discutiez-vous en chemin ? ».
Ellen
Silence.
Sarah
Silence coupable, silence de honte, silence des sans voix, mais aussi silence du dialogue, dialogue avec Dieu, silence de la confiance, silence de celui/et de celle qui se sait accueilli-e.
Nadine
Il y a tout cela dans le silence.
Sarah
Alors, osons faire silence en nous, pour nous ouvrir au dialogue avec Dieu, pour accepter de confier nos vies à Dieu, pour nous ouvrir à son chemin d’espérance.
Ellen
Silence.
Sarah
Amen.