Écouter le culte :
Alléluia / Sy Hosana !
Alléluia / Sy Hosana !
C’est par ces mots que notre ami Mam’ a commencé notre premier concert. De manière joyeuse, festive, qui n’est pas sans rappeler les supporters des stades de foot, on se place sous le regard de Dieu. On rappelle sa bonne nouvelle. Alléluia! Joie et louange à Dieu!
Puis ce fut à nous, avec notre premier chant, un medley comprenant Samba Samba Zanahari, un cantique en malgache. Et là, surprise! De la foule rassemblée dans l’église FJKM d’Ambohipo, émergèrent des cris, des applaudissements, des vivas dignes d’un rock star! Impressionnant. Décoiffant. Carrément déstabilisant pour les Vahaza kely aviani Suissi, les petits étrangers venant de Suisse que nous étions. Et les poils, forcément au garde-à-vous. Ca y est, nous y sommes, que je me suis dis. Après deux ans de travail acharné, de prises de têtes, de joies mais aussi de déceptions avec le report du projet en novembre de l’an passé dû à une épidémie de peste persistante sur l’île. Deux ans de traversée du désert, nous y étions, enfin. Madagascar, c’était notre terre promise, et le gospel, ce qui la rendait si belle.
Madagascar, cela a été pour nous d’abord la terre de l’accueil, du partage, par le chant notamment. Nous avons passé deux semaines H24, comme disent les jeunes, avec un groupe de jeunes Malgaches. Ces 9 Malgaches ont été pour nous des anges. Pas qu’ils avaient des ailes ou des auréoles, mais pour nous, je crois que nous pouvons le dire aujourd’hui avec la distance des 2 mois et demi qui se sont passés depuis notre retour, ce furent des messagers de Dieu pour nous. Messagers de foi, d’espérance et d’amour. Par l’accueil qu’ils nous ont réservé, par leur foi dont ils nous ont témoigné, par leur vision de la vie qu’ils nous ont partagée : Herman, Tsilav, Aina, Hoby, Mamy, Koloina, Arnaud, Laetitia, Micha ont été pour nous des anges rayonnant de la lumière de Dieu. Misoatra, merci, Tikouanareo, je vous aime.
Madagascar, cela a été pour nous ensuite la terre du Okalou, ce qui veut dire « attends », mais aussi « tranquille, cool » et qui pour nous a rapidement voulu dire « chill, on se prend pas la tête ». Car comme l’ont dit les jeunes, les Malgaches ont une façon de vivre qui nous a fait du bien : on ne se prend pas la tête, et plutôt que de se plaindre, comme on sait si bien le faire ici, ou plutôt que de voir ce qui nous manque ou ce qui est mieux chez l’autre, les Malgaches expriment simplement leur reconnaissance pour ce qu’ils ont. Être heureux pour ce que l’on a, voilà une belle leçon de vie. Peu après être rentré en Suisse, je suis tombé sur cette citation qui fait écho à cela : « Le bonheur n’est pas d’avoir tout ce que l’on désire, mais d’aimer ce que l’on a. »
Le passage de l’épître aux Hébreux que nous venons d’entendre rassemble ces deux points : d’une part l’accueil et l’hospitalité qui nous font prendre conscience que nos frères et sœurs ont été pour nous comme des anges. « Que l’amour fraternel demeure. N’oubliez pas l’hospitalité, car, grâce à elle, certains, sans le savoir, ont accueilli des anges. » D’autre part, foi et reconnaissance, avec notamment ce verset : « Contentez-vous de ce que vous avez, car le Seigneur lui-même a dit : Non, je ne te lâcherai pas, je ne t’abandonnerai pas ! » Cette foi que Dieu est toujours présent, ne les lâche jamais, quoi qu’ils vivent. Et je peux vous dire qu’ils en vivent des choses difficiles, nos frères et sœurs malgaches…
(Ecoute d’un chant malgache.)
Et il y a un autre mot que je voulais partager avec vous, parce qu’il me parle. Parce que c’est une chanson joyeuse et dansante que les Malgaches chantent souvent pour louer Dieu. Ce mot, nous allons l’entendre, c’est Afaka aho, qui signifie « libéré ».
Afaka aho, libéré: les Malgaches nous donc ont réappris à chanter la libération de Dieu, comme les chants gospel issus de la tradition des esclaves noirs le font si bien. Libérés, délivrés, oui mais de quoi ? Aujourd’hui, nous ne sommes plus esclaves comme les Israélites en Égypte. Mais notre société ne nous rend-elle pas esclaves également? Esclaves du rendement, de la performance, de la compétition; esclaves du matérialisme, du consumérisme, du libéralisme; esclaves de l’individualisme qui nous fait perdre de vue l’horizon de notre frère, de notre sœur; esclaves de la technologie, des téléphones portables, des réseaux sociaux, et là je prêche pour ma paroisse...
Alors face à tous ces esclavages de notre société, cela a été forcément un moment très fort pour moi, en tant que pasteur, de voir ces jeunes se libérer de ce qui leur pèse pour vivre ce voyage épanoui, goûtant à chaque instant. En fait, dans le chant notamment, je les ai vus comme transfigurés. Une note de musique avec les Malgaches et tout a changé. Les chants devenaient tout à coup nouveaux. « Il a mis dans ma bouche un chant nouveau, une louange pour notre Dieu, » dit le Psalmiste. Oui c’est comme si Dieu avait placé en nous un nouveau chant de louange, portés par les Malgaches, leurs chants, leur joie de vivre et leur foi. C’était beau. Presque irréel. Une vie nouvelle avec un chant nouveau.
Car Madagascar, cela a été bien sûr pour nous une terre de foi. Un regard sur les évènements qui replace toujours ce qui se passe dans la main de Dieu. Le Psalmiste le dit avec des mots que les Malgaches pourrait sûrement aussi utiliser : « Qu’ils sont grands, Seigneur mon Dieu, les projets et les miracles que tu as faits pour nous ! »
Lors de notre séjour, j’ai remarqué que nos frères et sœurs malgaches disaient toujours « Grâce à Dieu ». Tout arrive « grâce à Dieu ». Par rapport à notre société suisse qui bien souvent oublie de rendre grâce à Dieu, la différence était saisissante. Mais là, c’était vrai. Ce chant nouveau, ce changement, ce rayonnement, c’était bel et bien grâce à Dieu. Grâce à son action par l’Esprit Saint, par les Malgaches aussi, des anges envoyés auprès de nous, comme nous avons été des anges envoyés auprès d’eux. La rencontre s’est faite dans les deux sens et c’était par exemple beau de voir certains Malgaches apprécier nos recueillements très intérieurs et silencieux qui contrastaient fortement avec l’exubérance de leurs temps de prière. Nous nous sommes changés les uns les autres, grâce à Dieu.
Oui, nous avons été « Madagatés ». C’était « Madagabber », comme disent les jeunes. Merci Seigneur, pour tout ce que nous avons vécu, grâce à toi, grâce à Dieu. La question maintenant qui se pose, c’est comment ce chant nouveau qui nous habite encore aujourd’hui va impacter notre vie ici, nos engagements dans la société ou dans l’Église ? Pour que l’amour que l’on a partagé nous donne l’envie d’aimer, chantait Daniel Lévi dans la comédie musicale des Dix Commandements. Qu’allons-nous en faire de cet amour partagé, donné, reçu ?
La bonne nouvelle de ce voyage, chers frères et sœurs d’ici ou d’ailleurs, c’est que Dieu est ce Père infiniment aimant qui récompense nos efforts. Sans lui, ce voyage n’aurait assurément pas eu la même saveur. Dieu vous invite maintenant à continuer à cheminer avec lui. Vous aussi, qui n’êtes pas partis à Madagascar, osez vous lancer sur le chemin avec Dieu. Vivez dans l’amour fraternel. Pratiquez l’hospitalité, soyez des anges les uns pour les autres. Souvenez-vous de vos frères et sœurs chrétiens dans le monde qui souffrent. Contentez-vous de ce que vous avez, soyez reconnaissants. Vivez dans la confiance que quoi qu’il arrive, Dieu ne vous abandonnera jamais.
Alors bien sûr, le chemin avec Dieu n’est pas sans embûches. Mais cela en vaut la peine, vous verrez. Grâce à Dieu, nous pouvons accomplir de grandes choses. Demandez aux jeunes du PIG. En fin de compte, le chemin avec Dieu, c’est Tsara be, trop beau. Beau comme une plage de Foulpointe. Bon comme le Godrogodro, un dessert malagasy, ou les Caca pigeon, qui comme leur nom ne l’indique pas, sont des sortes de chips pour l’apéro.
Oui, le chemin avec Dieu, c’est Tsara be : beau et bon. Car Dieu est grand! Dieu est bon! Dieu est avec nous! Et que l’on soit en Suisse ou à Madagascar, ou dans un autre pays, nous pouvons le louer, avec ce chant nouveau :
Alléluia / Sy Hosana !
Alléluia / Sy Hosana !
Amen.