L'hospitalité nécessite une disposition intérieure: être à l'écoute et rassemblé en son coeur.

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Écouter le culte :

Marthe et Marie: deux visages, deux présences, deux femmes au service de l’hospitalité. L’hospitalité, une maison sur un lieu de passage. Jésus et ses disciples étaient en chemin, ils passaient. Passage, notre écoute de la foi chrétienne nous dit qu’il s’agit chaque fois d’un chemin pascal, d’un passage vers un accomplissement de vie et sur ces passages en nos vies, nous avons besoin de pouvoir nous poser, nous reposer. Nous avons chacune et chacun besoin d’hospitalité : que ce soit l’hospice millénaire sur le lieu bimillénaire du passage au col du Grand-Saint-Bernard, que ce soit sur les rives du lac de Champex, la chapelle des Arolles, nous sommes là, ici, pour vivre un temps d’hospitalité, pour nous encourager sur nos chemins à nous, qui sommes ici, rassemblés dans cette chapelle. Vos chemins à vous, qui nous écoutez depuis votre maison, depuis votre chambre d’hôpital, en voiture, en route, ou encore ailleurs.

Deux visages d’hospitalité mais deux visages en tension, Marthe et Marie. Le service, l’écoute : y a-t-il concurrence entre ces deux attitudes ? Non. Marthe et Marie sont sœurs. Les deux attitudes, du service et de l’écoute, sont deux attitudes sœurs : l’une ne va pas sans l’autre. Comment rendre service si je n’ai pas commencé par écouter ce dont l’autre a besoin ? Combien de personnes handicapées, en fauteuil roulant, ont-elles témoigné que d’autres personnes les ont aidées à traverser la route, à vivre un passage alors qu’elles n’avaient pas écouté que la personne ne voulait pas traverser la route. Qu’est-ce que j’écoute ? J’écoute mon besoin d’aider l’autre, sans vérifier qu’il ait besoin d’être aidé, ou je me mets à l’écoute de ce qui va favoriser la vie en l’autre.

L’hospitalité, c’est une œuvre de communauté. Il n’y a pas une personne qui peut être hospitalière ; c’est une communauté humaine : qu’elle soit famille, qu’elle soit communauté d’amis, qu’elle soit communauté paroissiale : c’est une communauté. Aussi, il n’est pas très heureux que nous nommions cet Evangile « celui de Marthe et Marie », parce qu’un visage d’hospitalité a besoin de dessiner un espace d’accueil. Et pour qu’il y ait un espace, il faut qu’il y ait trois personnes. Il s’agit de l’Evangile de Marthe et Marie qui accueillent Jésus. Jésus est un visage qui fait intimement partie de l’hospitalité qui est offerte. Parce que finalement, quand j’accepte moi-même de recevoir de l’autre, c’est là que je lui fais le plus beau cadeau parce que je lui permets de donner, je lui permets d’exister, d’exprimer son savoir-faire et son savoir-être. Ce que nous livre cette page d’Evangile, c’est que c’est risqué d’exercer l’hospitalité. On peut avoir un grand désir en soi, le vivre, et tout d’un coup se sentir complètement dépassé, comme Marthe. Marthe, qui peut-être dans le désir de trop bien faire, perd le sens de ce pour quoi elle est là. Mais Marie, aux pieds de Jésus, prend le même risque. Dans l’atmosphère culturelle de l’époque, dans l’environnement culturel de l’époque, une femme ne se mettait pas comme ça, assise aux pieds d’un maître pour l’écouter. Il y a une nouveauté bouleversante qui dit un risque de vie, celui que prend Marie, et celui que prend également Jésus en acceptant ce positionnement. Il n’y a pas de hiérarchie dans l’hospitalité, il n’y a pas le service qui est plus petit et l’écoute qui est plus grande, car tout service naît de l’écoute. Et qui dit « écoute », dit « parole ».

C’est vrai, l’évangéliste oriente le regard vers Marthe, qui se laisse dépasser, et compare avec l’attitude de Marie. Mais qu’est-ce qui est comparé ? Est-ce le service et l’écoute ? Ou est-ce Marie qui est unifiée en Sa présence et Marthe qui est dispersée, qui n’est pas rassemblée en son cœur ? Comment accueillir l’hôte si je ne suis pas rassemblé en mon cœur ? Et en même temps, mon désir, que je vais mettre en œuvre, me met à la limite de la disponibilité. Qui d’entre nous, en ouvrant ses portes, d’une manière ou d’une autre, en s’engageant au service de l’autre, n’a pas été dépassé par la mission ? Mais finalement, « être dépassé », n’est-ce pas aussi une manière de vivre l’Evangile ? Tout service, vrai, favorise la vie, et la vie ne peut être favorisée par un service offert que si ce service-là naît de l’écoute et de la parole. Autrement dit, la présence de Marthe est culminante dans cet Evangile, alors qu’on aurait tendance à la rabaisser. Elle est culminante parce qu'elle s’appuie sur l’écoute et la parole. Et l’évangéliste nous dit simplement que cet appui est difficile, qu’on risque d’oublier d’écouter, d’oublier de s’écouter. Car finalement, pour qu’un service ne devienne jamais une servitude, un esclavage, le service est appelé à favoriser la vie et en l’autre, et en moi. Je ne peux pas m’écraser, me sacrifier dans le service de l’autre. Je ne peux pas non plus m’écouter au point que l’autre n’existe plus dans son besoin. Qui dit « hospitalité », dit « rencontre », dit respect des mouvements dans le cœur de l’autre, respect des mouvements à l’intérieur de mon propre cœur.

L’hospitalité, c’est aussi celle d’une parole à offrir, et c’est le visage de Jésus, dans cet Evangile, qui annonce la parole. L’hospitalité, c’est la parole que j’apprends à exprimer sur ce que je vis à l’intérieur de moi et que je peux confier pour que ce soit accueilli à l’intérieur de celui qui m’écoute. Nous le savons, oser une parole sur la vie, oser une parole sur soi, cela fait trembler à l’intérieur. C’est peut-être autant risqué que le service de Marthe. Cet Evangile nous encourage à oser vivre l’écoute, la parole, à nous risquer dans l’écoute de l’autre, dans la parole qui livre un peu de soi-même et que le service puisse être comme la célébration de l’écoute et de la parole. Le fondement, visuellement on le voit dans l’Evangile, c’est l’écoute. Marie est le plus proche du sol, assise aux pieds du maître. Le plus proche du sol, c'est-à-dire se connectant à la réalité. Pour rejoindre la réalité de ma vie, j’ai besoin d’être à l’écoute, et l’écoute appelle une parole. Jésus est assis un peu plus haut visuellement, parce qu’écouter c’est bien mais il faut se risquer dans une parole, une parole qui permet de ressaisir le mystère de sa vie, qui permet de dire ce qui se passe à l’intérieur de soi. Marthe est debout dans le service, et pour être debout, elle est appelée à intégrer les deux positionnements précédents. Cette dynamique-là, vous la retrouvez dans la vie de Jésus, notamment dans les pèlerins d’Emmaüs. Jésus est sur ce lieu de passage et il commence par écouter, comme Marie, ce que vivent les deux compagnons. Il écoute, comme un disciple, il se laisse guider sur ce chemin de déroute qui va vers Emmaüs. Ce n’était pas un pèlerinage à la base, c’était tourner le dos à une réalité trop dure. Ensuite, Jésus ose la parole pour donner le sens des événements qui ont troublé les disciples. Et lorsqu’il y a eu rencontre dans le mystère de l’écoute et de la parole, eh bien dans l’auberge d’Emmaüs, c’est Jésus qui se met au service en partageant le pain.

Oui, notre cœur sera davantage unifié dans les services que nous pouvons offrir ou recevoir, dans la mesure où ces services sont la célébration de l’écoute et de la parole.

Culte proposé par la paroisse protestante du Coude du Rhône Martigny-Saxon dans le cadre du pélerinage alpin d'été, du Val Ferret au Gd-St-Bernard. Pour manifester un oecuménisme vivant et stimulant dans les paroisses catholiques et protestantes de la région, la paroisse protestante propose ce matin, un échange de chair.Le pasteur Pierre Boismorand qui anime le Pèlerinage assure la prédication à 9h, durant la Messe radiodiffusée en direct depuis l'Hospice du Grand-Saint-Bernard et le chanoine José Mittaz, Prieur de l'Hospice du Grand-Saint-Bernard propose la prédication à la Chapelle des Arolles, dès 10h. Isabelle Minger-Baillod diacre, préside la célébration. C'est d'accueil et d'hospitalité dont il sera question. Quelles sont les forces et faiblesses de nos envies pour accueillir autrui, là où il est et comme il est ?

Détails

Avec la participation de
Isabelle Minger-Baillod et Raymond Minger
Orgue
Monique Aubord
Musique