Dieu, où es-tu ?

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Silence des disciples ...

Le récit de la passion de Jésus me remue à chaque fois. J'ai envie de pleurer, de crier au scandale, de me mettre en colère. Pleurer de tristesse à cause des affres qu'a dû subir Jésus. Crier et exprimer ma colère, contre qui ? Evidemment, contre ces chefs religieux, contre ces chefs romains, contre cette masse populaire versatile.

Face à ces événements, je me pose la question suivante ? Aurais-je été capable de me tenir aux côtés de Jésus ? J'espère que oui. Mais en creusant un peu plus loin, je réalise que je n'aurais pas fait mieux. Comme la plupart des disciples, je me serais enfui. J'aurais abandonné Jésus à son sort. Bref, j'aurais brillé par mon absence.

Silence de Dieu

Mais ce qui m'effare d'autant plus, dans ce récit, c'est l'absence de Dieu, l'absence du Père de Jésus.
Dieu se tait et ne fait rien ! Il laisse aller... il laisse faire...
Jésus a crié cette absence : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?
Etre abandonné : c'est terrible. Pour moi, quand Dieu ne fait rien, se retire, il n'y a plus rien. C'est le vide, le vide absolu. C'est le néant. Jésus doit vivre ces instants seul : sans aucun soutien de ses disciples malgré les promesses les plus hardies, sans aucun soutien de la foule qui pourtant l'a acclamé lors de son entrée dans Jérusalem et aucun soutien de Dieu.

Jésus est cloué sur une poutre et exposé à la sortie de la ville. Sur une butte, au bord d'une route fréquentée par les pèlerins qui viennent pour fêter la Pâques juives à Jérusalem, un homme est cloué là, en exemple, pour dissuader les visiteurs de faire du grabuge durant la fête. Au-dessus de sa tête, un écriteau. Sur cet écriteau, la raison de sa condamnation : le roi des juifs.

La mort de Jésus

Jésus, meurt lamentablement. Notre Dieu meurt lamentablement. Est-ce bien Lui notre maître, notre Seigneur ? Est-ce à Lui que nous adressons nos prières car nous pensons qu'Il peut les exaucer ? Est-ce vraiment Lui notre protecteur, notre rocher ? Vendredi Saint, c'est l'absurdité totale ! Vendredi Saint comporte tous les ingrédients pour nous faire perdre la foi, pour nous faire quitter l'Eglise, pour profiter au maximum de ce jour de congé, pour jouir de ce week-end prolongé de Pâques. Tout est fini. Soit nous pleurons... soit nous fuyons et partons ailleurs pour jouir des ces jours de congés !

Une vie va germer

Et là, devant cette fin, Marc nous rapporte le seul élément positif de ce récit. De cette fin, de "ce Jésus mort sur la croix" la vie va éclore. La mort va engendrer la vie. C'est étonnant ! Une nouvelle vie va naître dans le coeur d'un homme. Cette vie nouvelle, c'est la foi. Au moment où Jésus meurt, un homme est là. Il a assisté à toute l'exécution. Il a même dû mener à bien cette exécution. C'est un officier romain. Le texte biblique précise qu'il "est en face de Jésus". Il a tout vu, tout entendu. Ce qui le secoue, nous dit le texte, c'est le "comment" de la mort de Jésus.

Jésus est mort dans la souffrance. Il est mort seul. Il est mort abandonné, en criant. Il semble que cette absence de Dieu et cette absence de secours de Dieu, va marquer ce romain. Cela va le conduire à la conversion, à dire une confession de foi : "Vraiment, cet homme était Fils de Dieu !". Dans l'évangile de Marc, ce romain est le premier à associer la croix et la messianité de Jésus. Pour lui, c'est une évidence, Jésus qu'il a vu mourir, abandonné sur cette croix, ce Jésus est Fils de Dieu.

Je suis surpris par ces propos. C'est inattendu. L'abandon vécu par Jésus a suscité la foi dans le coeur de ce soldat. J'aurais facilement conçu qu'un officier se convertisse à partir d'un acte de puissance. Mais trouver la foi, à partir d'une mort, d'un acte d'abandon, s'est surprenant. Comment expliquer cette conversion, cette révélation ? La foi est parfois bien difficile à expliquer à autrui, surtout quand cela semble absurde et irrationnel.

Ce matin, je vous suggère 2 pistes.

1) Une mission, jusqu'au bout
L'officier romain reçoit une mission dans l'armée. Il doit protéger, défendre ou "punir" quand il le faut. Il est attendu qu'il accomplisse cette mission. Un bon officier va jusqu'au bout de cette mission. Quel qu'en soit le prix, il fera ce qu'il doit faire. Jésus lui aussi a été jusqu'au bout, jusque dans la mort. Il a souffert jusqu'au bout. Il a été abandonné jusqu'au bout. Rien ne lui a été épargné. Il n'a pas reçu de secours, jusqu'au bout. Ce "jusqu'au bout" qui est important pour un soldat, a peut-être touché le coeur de ce romain. Car il sait que cela n'est pas facile d'aller "jusqu'au bout". Jésus a aussi obéi et rempli une mission que son Père lui a confiée : avec ce sacrifice, cette mort, offrir le Salut aux hommes. Ce Romain a perçu que Jésus accomplissait une mission. Par sa mort, cette mission est parfaitement réalisée. L'engagement total de Jésus a impressionné et convaincu ce chef de l'armée.

2) Vaincu par l'amour
Voici la deuxième piste : Le romain est un chef. Il est craint. Il donne ses ordres. C'est un homme de poigne et d'autorité. Il ne va pas se permettre de faiblesses. Il résiste à tout. Rien ne doit lui résister. Jésus lui aussi est un chef : l'écriteau nous le rappelle "le roi des juifs". Nous avons deux chefs qui se font face. Pourtant, Jésus, qui pendant trois ans a manifesté son autorité, se laisse faire. Il ne donne plus d'ordre. Il ne dit plus rien. Ce que l'on voit à ce moment là : c'est la faiblesse et l'impuissance. Jésus, le roi des juifs, subit. Il est une victime. Mais une victime qui ne s'en prend à personne. Une victime qui n'a pas de colère. Jésus crie vers Dieu. Il ne crie pas contre les hommes, ni contre ses bourreaux, ni contre ce chef romain, ni contre ses disciples. Il n'y a aucune haine.

Jésus a donné sa vie. Il a consenti à ce sacrifice. Il s'est donné par amour. J'imagine que ce Romain, responsable de l'exécution, s'en est trouvé bouleversé. Il est bouleversé que l'on puisse aimer, aimer à ce point-là, même ceux qui vous font du mal. Ce centurion a été vaincu par l'amour !

A notre tour

Vaincu par l'amour: ce fut aussi mon cas, il y a bientôt trente-sept ans. Quand j'ai compris que Jésus m'aimait tant, au point d'avoir donné sa vie pour moi, cela m'a bouleversé. Modestement, je lui ai donné ma vie à mon tour. Ce matin, je réalise que parmi mes frères dans la foi, il y a ce centurion romain. Je me réjouis d'avance de faire sa connaissance quand nous serons tous rassemblés dans le royaume des cieux. Je lui poserai cette question : Comment as-tu trouvé la foi, en voyant Jésus mourir sur cette croix? Je suis curieux de sa réponse.

En attendant ce moment, je vais faire comme lui. Je crois et j'annonce que Jésus est vraiment Fils de Dieu.

Amen

Détails

Avec la participation de
Doris Rochat, Françoise Keller et Michel Renaud
Orgue
Catherine Gremaud-Babel
Musique