Que celui qui a des oreilles, voie ! Que celui qui a des yeux, entende !

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Entre la Genèse et l'Apocalypse, de la ténèbre primordiale à la lumière infinie, du creux de la nuit à l'aube d'un jour nouveau, quelque part entre les deux, nous éclairer d'une Parole, pour y voir clair encore, enfin.
C'est donc l'histoire d'un aveugle-né. D'un aveugle quelque part à Jérusalem aux prises avec la nuit de sa vie qui ne quémande rien d'autre que les moyens de sa survie. C'est le récit d'un aveugle sans défense, que Jésus manipule, et qu'il projette sans ménagement sous les feux de la rampe.
Mendiant sans avenir, soudain devenu vedette d'Evangile, héraut de Bonne Nouvelle, figure exemplaire traversant les siècles, "pour que les œuvres de Dieu se manifestent en lui…" Parole du Seigneur !
Maintenant donc, fermez les yeux, oui, fermez les yeux, pour mieux vous ouvrir à l'entendement. Et imaginez … un pauvre hère, à la lente trajectoire hésitante, les yeux collés d'une boue de poussière et de salive, ignorant tout de celui qui l'envoie se laver, hormis son nom.
Que ne ferait-on pas - même faire confiance à l'inconnu qui s'impose comme votre seule chance - que ne ferait-on pas quand l'espoir fou de sortir de la nuit vous pousse en avant ? Quand passer des ténèbres de l'aveuglement aux couleurs du monde viendrait vous rendre dignité et statut d'homme ? Suivez-vous sur l'écran de votre imaginaire ce pêcheur d'espérance qui s'en va à Siloé chercher l'eau qui lavera son malheur ?

Gardez les yeux fermés, juste pour mieux voir. Ne le distinguez-vous pas en cet instant, debout au bord de la piscine de Siloé, découvrant mille visages aux voix d'avant si bien connues, éprouvant dans un face à face déjà tendu toute l'incrédulité des témoins de l'événement : Est-ce lui ? Ou n'est-ce pas lui ? Si, c'est moi, c'est bien moi ! Alors, raconte, alors dis comment ? Et lui d'expliquer, la boue, l'ordre donné.
Gardez donc encore les yeux fermés. Et regardez un peu plus loin : ne les discernez-vous pas, cachés dans l'ombre de leur pressentiment avec leurs visages lisses et gris de montreurs d'exemples, donnant à voir à qui veut l'entendre, la droite, la juste, la bonne, façon de croire !
J'annonce, ci-derrière ces messieurs, les pharisiens !

Interrogatoire. Bien évidemment.

Comment ? Dis-nous comment ? Avec de la boue sur mes yeux, et puis se laver à la piscine de Siloé. Qui ? Qui t'a fait ça, un prophète ? Un prophète, oui, un prophète !

Citation des témoins. C'est logique. Les témoins se récusent.

Mais nous ne sommes que ses parents, il est grand maintenant, interrogez-le !

Mesdames et Messieurs, chères sœurs, chers frères, chères auditrices, chers auditeurs, laissons un instant les personnages de notre histoire continuer l'audience et permettez que je glisse ici un commentaire, à voix basse, vous m'en excuserez, car je suis moi-même dans la salle :
Voyez-vous ce que j'entends ? J'entends que cet homme est seul devant ses juges.
J'entends qu'il y voit clair, certes, et que pourtant, il n'est guère clairvoyant : Jésus, un prophète ? Mais non, c'est le Fils de l'homme ! Mais qui le lui soufflera ?
Et où est-il donc ce Jésus, Mesdames et Messieurs ? Que fait-il donc l'Avocat, l'Intercesseur ?
Que fais-tu, Seigneur ? Qu'en est-il de la cause de l'homme ? Et qui donc se lèvera pour battre en brèche "l'axe du mal" ! Abandonnerais-tu l'œuvre du Père, nous laissant aux mains meurtrières des cow-boys du monde ? Seigneur ne les laisse pas arbitrer du bien et du mal !
Il est impossible, rigoureusement impensable de laisser l'homme planté là, dans ton absence.

Vous pouvez ouvrir les yeux maintenant. Et écoutez bien : n'entendez-vous pas le grondement de leur discours de préjugés, toujours en retard d'une guerre, appelant à la barre Moïse lui-même : "Nous sommes disciples de Moïse !" Ah bon très bien ! et donc, nous sommes les garants de la Loi ! Ah, si vous le dites !
Ouvrez les yeux, et regardez bien : ne les reconnaissez-vous pas ces pharisiens aveuglés de leur propre pouvoir, voyant sans voir, se voilant la face, incapables d'accueillir la lumière d'une aube nouvelle ? Que cet aveugle de naissance voie, aucun doute ! Mais qu'il soit entré dans la lumière "afin que l'œuvre de Dieu soit manifestée" cela leur est fermé, obscur, incompréhensible, inadmissible.
Que l'on prononce ici le verdict : dehors, qu'on le jette dehors !
Dehors. C'est donc qu'ils sont dedans, et qu'ils y sont restés. Dehors. C'est donc que le guéri est rendu à la lumière. Jésus apprit qu'ils l'avaient chassé. Il vint alors le trouver. (ah, tout de même !) et lui dit : "Crois-tu, toi, au Fils de l'homme ?" "Qui est-il Seigneur pour que je croie en lui ?" "Eh bien! tu l'as vu, c'est celui qui te parle."

Toi, qui m'écoutes te raconter encore et encore la fameuse histoire de l'aveugle-né qui fut guéri au vieux temps de Jésus parmi nous, as-tu suivi la consigne ? As-tu bien fermé les yeux pour mieux les ouvrir maintenant ? As-tu vu passer au tribunal des hommes, - tu le sais trop bien, les humains : ces maîtres d'inquisition, ces champions de fanatisme, ces redresseurs de morale, ces prétentieux de vaincre par eux-mêmes "l'axe du mal". Toi qui m'écoutes, as-tu bien vu passer au tribunal du monde, du monde d'aujourd'hui, entendons-nous bien, tant et tant d'humains clairvoyants, rejetés aux portails des puissants ?
Et l'as-tu reconnu Celui qui vient les trouver, eux qui n'ont rien demandé d'autre que les moyens de Vivre ? Bienheureux es-tu si, comme l'aveugle libéré de son esclavage de la nuit tu peux répondre avec lui : "Je crois, Seigneur !"
Avec toi, le cortège des visionnaires, l'immense foule bigarrée de ceux et celles qui fuient la ténèbre, et qui dans l'espérance du règne de lumière qui s'approche, attendent avec impatience et joie ce jour où enfin "toute lumière sera faite".
Jésus dit alors : "C'est pour un jugement que je suis venu dans le monde, pour que ceux qui ne voyaient pas voient, et que ceux qui voyaient deviennent aveugles." Les pharisiens qui entendirent ces paroles lui dirent : "Est-ce que par hasard nous serions aveugles nous aussi ?" Eh bien ! il leur fut répondu : "Si vous étiez des aveugles, vous n'auriez pas de péché. Mais à présent vous dites "nous voyons" : votre péché demeure.
Que donc celui qui a des oreilles, voie !
Que donc celui qui a des yeux entende !
Afin qu'entre Genèse et Apocalypse, entre ténèbre primordiale et lumière infinie, éclairé d'une Parole, encore, enfin, il proclame à la face du monde ces quelques mots : "Je crois, Seigneur."

Amen !

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Détails

Avec la participation de
Orgue
Viviane Henry
Musique
Ensemble de cuivres de jeunes