Ceux et celles qui nous écoutent à la radio n'ont pas devant eux la belle photo d'abeille que les participants au culte ont trouvée sur leur banc en arrivant. L'abeille, première réaction = peur, pourtant elle nous donne le miel.
"Essaimer" quand je pense à un essaim, mon premier mouvement est aussi de peur, ces milliers d'abeilles qui s'envolent et vont se poser n'importe où ! Mais il en va de leur survie, de leur développement. Essaimer - on est d'accord avec les jeunes - signifie mouvement, déplacement de la vie, enrichissement, passage de l'ancienne reine à la nouvelle !
En église, c'est d'abord le sens positif du mot que nous retenons : c'est une église assez vivante qui ira se poser ailleurs. Dans l'histoire des missions, tous ces récits de belles vocations, passion pour l'annonce de la Bonne Nouvelle. Pas d'illusion, il y avait aussi mélange, on essaimait souvent par goût d'aventure, parfois même par fuite de situations, je peux vous en parler !
Dans le texte entendu tout à l'heure, choisi pour la campagne d'automne (quel choix, n'y en avait-il pas d'autre qui parle de miel !) Il faut bien faire avec ! On est intrigué par Samson, homme sensible (il se laisse émouvoir par une jeune femme), homme déterminé (c'est celle-là que je veux !), homme spirituel (il se laisse prendre par l'Esprit du Seigneur), homme de courage par 2 fois (il empoigne le lion et va le revoir mort), et il ne s'oublie pas (il se sert de miel), homme de partage, généreux (il en donne à ses parents).
En première lecture, on voit des ombres. Il me semble qu'elles parlent de frontières, de limites. On dirait que Samson a besoin de toucher aux limites (ses parents : pourquoi aller ailleurs ?), au-delà de la frontière du discernement (on ne savait pas que le Seigneur était là derrière), on cache. Il y a des non-dits, pourquoi cacher, pourquoi ce mystère ?
Il y a aussi les abeilles pour qu'il y ait essaim, il a fallu qu'elles essaiment et qu'elles aillent se loger dans une carcasse de lion mort ! Cette image doit nous intriguer (image qui touche aux frontières de l'inimaginable, utilisée plus loin par Samson pour son énigme).
Pour nous chrétiens qui lisons l'Ancien Testament à la lumière du Nouveau Testament (et l'inverse), c'est bien un de ces textes de renversement, une de ces perles incompréhensibles qui trouvent sa pleine lumière dans la vie et la perspective du Christ. Lui, qui plus que tout autre, a invité au dépassement des ombres, à traverser les frontières.
Matthieu 28: vous, gens de rien, Galiléens, gens de la Judée, vous irez aux extrémités du monde, vous monterez à Rome ! Renversement, c'est le faible qui va vers le fort.
Hélas, la mission, l'église, n'a pas toujours été dans ce sens : c'est bien plutôt le fort qui est allé avec le fort, contre le faible, le colonialisme et tous ceux qui ont suivi. C'est possible aujourd'hui encore de renverser :
L'EPER a des projets en Arménie, pays dévasté par tant de tragédies, le DM au Chiapas, et non au Canada.
Mais, pour voir le miel dans la carcasse du lion, Samson a dû faire un détour, il faut le courage d'aller voir au-delà de la mort. Notre mission d'église est en crise, l'église n'est souvent plus au milieu du village, le DM - échange et mission vit ses 40 ans. On a dit que ce ne serait pas la crise des 40 ans. Crise financière, il y a en tous cas. Pourquoi pas ?
Allez, Conseil des Missions, équipe du DM, allez non par force, osez faire le détour, non pas au nom d'un pouvoir quelconque, si ce n'est celui de l'amour !
C'est là qu'il y a du miel. Les jeunes sont partis au Congo et ont vécu non dans les hôtels avec les autres expatriés, mais dans les familles. C'est là qu'ils ont vécu les plus beaux moments, c'est là que leur voyage intérieur a pris tout sens.
Job n'a pas fui, c'est dans la cendre et la poussière qu'il y a révélation. Et pour nous tous, paroissiens de notre région ou paroissiens de la radio comme le dit le prophète : " ce n'est ni par force, ni par puissance, mais par mon Esprit ".
Amen !
