Ça va se savoir !

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Je dois commencer ma prédication maintenant, mais en bon théologien je dois avoir des éléments précis, concrets pour ne pas dire n’importe quoi et je ne les trouve pas dans mes livres. À propos de cette histoire de miel. Je sais bien où trouver mon miel à la « Microp », je sais même dans quel rayon. C’est amusant. ! Tiens, c’est peut-être pour cela que l’on appelle les rayons dans les magasins, ces rayonnages, à cause des rayons du miel, je n’en sais rien.
Dans les gens autour de moi ici il y a un grand monsieur, de haute taille, c’est le syndic du village, le maire en français courant et il s’y connaît un peu en abeille.
-(François) Holà, Marc, mon ami syndic, j’ai besoin d’aide
- (Marc Ducret) Que veux-tu pasteur ?
- (François) J’y connais rien en abeille pourrais-tu me dire si cette histoire de Samson est plausible ?
- (Marc) Je vais essayer
- (François) A ton avis, est-ce que c’est plausible de trouver un essaim d’abeilles dans le cadavre d’un lion ?
- (Réponse de Marc) Ce lion vivait dans un pays chaud, j’imagine que le vent du désert et le soleil n’ont laissé qu’un peu de peau sur quelques os, oui, c’est une anfractuosité dans laquelle un essaim d’abeilles aurait pu s’y glisser.
- (François) Je vois un autre problème, est-ce que c’est possible de prendre des rayons de miel à la main ?
- (Réponse de Marc) : Je n’en suis pas capable, mais oui, certains apiculteurs aguerris y arrivent très bien, ils doivent bien supporter une piqûre ou deux mais c’est sans risque pour eux, surtout les vieux !
- (François) Est-ce que l’on peut tout manger, les rayons et le miel ou est-ce qu’il faut laisser couler, aspirer ?
- (réponse de Marc) D’habitude on laisse couler, mais effectivement on peut tout manger. Il reste à la fin comme une sorte de chewing-gum fait par la cire qui n’a pas un goût désagréable
- (François) Qu’est-ce que tu aimes lorsque tu t’occupes de tes abeilles ?
- (réponse de Marc) J’aime ce côté bourdonnant et les abeilles ne sont pas des individus, mais forment un tout, quoique je n’aimerais pas être un faux bourdon. Dis-moi pasteur, à propos de trucs qui piquent, comment arrives-tu à justifier la mort de 30 Philistins pour leur voler leurs tuniques ?

Deuxième problème à résoudre dans cette histoire. Pas simple. Je ne vais quand même pas oser critiquer publiquement Samson et le texte biblique en disant que c’est un scandale, mais je ne peux tout même pas justifier la mort de 30 Philistins pour quelques nippes. Je ne peux pas faire cela.
Je pourrais dire que c’étaient des méchants philistins. Mieux, je pourrais dire que c’étaient des terroristes. Non, encore mieux, je pourrais dire qu’ils risquaient de devenir des terroristes. Potentiellement. Cela c’est bien, mais c’est déjà utilisé.
Peut-être… Peut-être Marc et vous autres, tous les autres, je pourrais penser comme vous. Rien ne justifie un massacre d’innocents, qu’il soit présenté pour une noble cause ou pour de sordides motifs.
Peut-être ceci pour mieux comprendre : Samson vivait dans un temps où les dieux se cherchaient querelle pour établir leur territoire. Oui, c’est sans doute cela, rechercher la victoire pour abolir des barbaries et pour y implanter le vrai Dieu. Mais j’ai mal à cette belle histoire si je n’en écoute que la fin. Même en sachant que Samson finira par y laisser sa peau, je ne peux pas la justifier.

Bon, j’ai tous ces éléments, le miel, les 30 Philistins, les querelles entre les dieux, prêchons maintenant le Christ : savez-vous quelle est la devise des sumotoris ? Vous savez, ces lutteurs japonais imposants avec de drôles de tissus pour culottes. Elle est la suivante : « Plus le corps est fort et plus l’âme doit être sensible. »
Je comprends très bien cette devise et j’aimerais que tous ceux qui se sentent jeunes et sportifs comme Samson ici et ailleurs et qui oublient leur vie spirituelle parce qu’ils courent, nagent et pédalent à toute allure puissent entendre ce message.
« Plus le corps est fort et plus l’âme doit être sensible. » Sur nos forces sportives, ou brutales, ou nos pulsions, qui nous guidera ? Une âme sensible peut-être. Comme on raconte toujours, et c’est un lieu commun, qu’une ceinture noire de judo, homme ou femme, doit être irréprochable s’il y a de la castagne dans l’air.
Du Dieu fort est sorti le Dieu doux. Du Dieu fort de l’Ancien Testament est sorti le Dieu doux du Nouveau Testament. Dieu autrefois a dû se battre pour faire sa place, puis, au milieu de son peuple, il a tenté de nous faire vivre la douceur parfaite. Un projet de paix sur la terre pour les hommes et les femmes de bonne volonté. Un projet de vie meilleure parce que de vie partagée autour de valeurs simples, l’amour de Dieu, l’amour du prochain, l’amour de soi.

Une anecdote, juste une ! Dieu, c’est comme quelqu’un qui gagne à l’Euromillion, et vous savez ce qu’il offre aux gens? : Son temps aux autres. Son temps aux autres. ET encore une chose, son temps aux autres. Peut-être que quelqu’un n’a pas encore compris, tout au fond de l’église, tout au fond du poste: son temps aux autres.
« Du Dieu fort est sorti le Dieu doux. » La devinette de Samson, je la ressens personnellement comme une prophétie, comme une parole qui annonce une vérité profonde. Et cet épisode narratif doit se lire dans son contexte, prenez plaisir à lire le livre des Juges, tout le livre et les chapitres 14 et suivants en particulier:
Jésus de Nazareth sera ce Dieu doux. Ce qui est marrant, c’est que pour Jésus, on lui a donné un tas de surnoms : Christ, Le Fils de l’Homme, le Fils de Dieu, le Fils de Joseph, le Prince de la Paix, Seigneur, Maître, Rabbi. Et lui-même dira « Je suis le Pain de vie », « Je suis le chemin, la vérité, la vie » « la porte », « la lumière » et j’en oublie, car les premiers chrétiens étaient pleins d’inspiration : ineffable océan d’amour, l’au-dessus de tout, médecin des corps, mors de mes tendres poulains.
Mais personne n’a dit qu’il était le miel de notre existence, ce Jésus qui se mange en plus. Je pourrais commencer une prière qui aurait de l’allure : « Ô toi Miel de ma vie, accompagne-moi s’il te plaît et sois mon Dieu plein de douceur pour moi qui souffre ou pour moi qui vais si bien. Amen. »
Tout le monde, je crois s’y retrouverait. Alors je laisse l’idée aux plus croyants d’entre vous, comme à ceux qui écoutent par hasard: comment puis-je mettre un peu de miel dans ma vie ?

Miel : ce produit rare et subtil qui s’obtient par la collaboration entre les hommes et les abeilles, entre l’homme et la création. Miel : ce produit rare et subtil qui se garde si bien, parfois dur, parfois coulant, mais jamais abîmé. Douceur et stabilité. Qui nous dira les mots d’amour qui vont si bien ensemble ? Qui fera de nous l’homme ou la femme que nous sommes ? Qui aura pour nous le geste de fleurir chaque semaine un vase d’une fleur ? Qui aura pour nous l’amitié sereine d’une carte postale ? Qui nous donnera le pouvoir de rayonner ?
Rayonner ! C’est être bien à l’intérieur de soi bien sûr. C’est difficile, cela ne s’invente pas d’un claquement de doigts. Et quand nous sommes pris dans l’engrenage de l’hiver, qui nous dira… ? « Du Dieu fort est sorti le Dieu doux »
Et de nous qu’en sortira-t-il ? Nous qui ne sommes pas Samson, mais qui pouvons être des soleils, que sortira-t-il de doux de nous ? Et surtout, pourquoi ?

Amen !

Détails

Avec la participation de
Orgue
Christianne Cornu Cavin
Musique