Écouter le culte :
Un jour, un journaliste a demandé à Madame Einstein, l’épouse de l’illustre savant, si elle comprenait quelque chose à la relativité dont la théorie a été mise en lumière par son mari en 1905.
- Pas du tout, a-t-elle répondu, mais je connais mon mari, et je sais qu’on peut s’y fier !
Si on me demande si je comprends quelque chose aux mystères que nous révèle au moins en partie la Bible, comme la Trinité par exemple, je ne peux guère répondre qu’en parodiant Madame Einstein.
- Pas complètement, mais je connais celui qui est le Seigneur du Ciel et de la terre, et je sais qu’on peut s’y fier.
Effectivement, la Trinité que nous fêtons ce dimanche est et restera toujours, tout du moins en partie, un mystère pour nous. Oui, nous croyons en un Dieu unique, mais ce Dieu unique se présente à nous comme trois personnes distinctes. Identiques quant à leur nature divine, ces trois personnes sont différentes dans leurs actions, mais ne forment qu’un. Si Dieu est un, comment peut-Il être à la fois un et trois ? Mathématiquement, cela n’a pas de sens. Il y a là de quoi véritablement s’arracher les cheveux ; et il serait peut-être même judicieux de remplacer le vin de la cène par un bon Alka-Seltzer pour palier au mal de tête.
Bon ! Essayons donc d’illustrer cela. Mais j’aimerais le faire à partir de la Bible. Nous avons dit à l’instant que Dieu est un Dieu unique. Nous l’avons même chanté en reprenant la confession de foi centrale du judaïsme que l’on trouve dans le livre du Deutéronome au chapitre 6 verset 4 : écoute Israël, l’Eternel notre Dieu, l’Eternel est un ! shema Israël, Adonaï Eloheinou, Adonaï eHad. EHad. Un. Effectivement, mais eHad, en hébreu, ne signifie pas un seul, unique. Un seul, unique, insécable, indivisible, en hébreu se dit yaHid. EHad signifie un dans le sens d’uni. Une des premières fois que le mot eHad est utilisé dans la Bible, c’est lorsque Dieu dit en parlant du mariage « l’homme et la femme ne formeront plus qu’un », eHad, ce que nos traductions françaises rendent par « plus qu’une seule personne ». On en connaît, ou on en a tous connu, de ces couples scotchés l’un à l’autre, indécollables l’un de l’autre, où on ne peut jamais rencontrer l’un sans avoir affaire à l’autre également.
Cela me rappelle une anecdote liée à une préparation de service funèbre : un couple de la Vallée était tellement connu comme marqué par cette fusionnite aigüe que si vous croisiez par exemple Monsieur seul dans les rayonnages de la Migros, les gens ne lui demandait pas spontanément comment il allait, mais où était sa femme ; et il était à parier qu’elle se trouvait juste au rayonnage d’à côté. Oui, ici ou là, on parle de couple-fusion. Mais par le mariage, l’homme et la femme ne fusionnent pas pour ne former qu’un seul et unique être ; par le mariage, Monsieur ne va pas littéralement phagocyter Madame et vice-versa ; non. Mais ils sont unis devant les hommes et devant Dieu ; et unis, ils portent ensemble un même appel, une même destinée, une même mission. Ils sont couple et l’un et l’autre.
EHad a donc à la fois une notion d’alliance qui ouvre à la possibilité qu’il y a plusieurs acteurs à cette alliance, enfin au moins deux. Et eHad signifie aussi que ces différents acteurs de l’alliance vivent une unité tellement forte entre eux, qu’aux yeux de l’extérieur ils ne forment plus qu’un, que plus grand-chose ne les distingue les uns des autres.
Oui, Dieu est un Dieu unique, un et inséparable quand bien même en son sein Il témoigne d’une pluralité de Personnes. Mais ce qui unit ces trois Personnes divines est largement plus important que ce qui les distingue. C’est cela le dogme de la Trinité. Dogme parce que l'expression trinité ne figure pas dans le Nouveau Testament ; mais les trois personnes y sont clairement nommées, y agissent et s’y manifestent, à la fois dans leur distinction et dans leur unité. Que ce soit lors de l’Annonciation à Marie ou lors du baptême de Jésus au Jourdain, les trois Personnes de la Trinité sont mentionnées.
Mais la mention la plus claire des Personnes divines est dans la finale de l’Evangile de Matthieu : « Allez, faites de toutes les nations des disciples, et baptisez-les au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. » (Matthieu 28.19) Et le Nouveau Testament est encore rempli d’autres formules qui affirment la parfaite divinité du Fils d’une part, et qui d’autre part associent pleinement l’Esprit-Saint à la vie, à l’intimité et à l’action du Père et du Fils.
Mais finalement pour nous la question la plus pertinente est la suivante : qu’est-ce que croire en la Trinité nous apporte de plus ? En effet, il serait plus simple pour nous de croire uniquement en Dieu le Créateur du Ciel et de la terre, ou alors de croire en trois divinités distinctes qui peuvent à la limite collaborer entre elles. Alors qu’est-ce que nous découvrons au travers de la Trinité ? La réponse tient en une phrase : l’amour que Dieu nous porte est incommensurable et inconditionnel.
Je m’explique. Au sein de la Trinité, nous trouvons tout d’abord le Dieu Père. C’est lui qui a créé cet univers dont une des composantes principales est la liberté. Oui, mes amis, nous sommes libres, libres de nos choix, libres de nos paroles et de nos actes. Je ne suis pas en train de nier le fait que nous portions passablement d’hérédité, de limites, ici ou là de chaînes qui nous entravent dans cette liberté. Mais nous ne sommes pas pour autant le jouet de forces qui nous dépassent. C’est bien là ce qui différencie un être humain d’un animal : nous sommes libres de mener notre vie et de choisir les règles éthiques auxquelles nous voulons consciemment nous soumettre. Cette liberté est la première caractéristique de l’amour que Dieu nous porte : Il ne veut pas des marionnettes ou des pantins qui réagissent uniquement à Ses ordres. Non. Dieu désire avoir une véritable relation avec nous, face-à-face, en vis-à-vis. Arrive-t-on à imaginer cela : que le grand Dieu de l’univers s’intéresse à nous, petites fourmis ? Qu’Il nous laisse libres de répondre à Son amour ou de le rejeter ? Et pourtant, c’est le cas ! Mes amis, vous êtes le joyau de la création. Vous êtes l’image de Dieu. Vous avez été créés à la ressemblance de Dieu. Hébreux 2, reprenant le Psaume 8, dira que nous avons même été créés supérieurs aux anges. Vous avez une valeur inimaginable aux yeux de Dieu.
Mais dans notre liberté, nous avons dédaigné l’amour du Père. Nous nous sommes rebellés. Nous avons suspecté Dieu de nous mentir et de nous cacher certaines choses. Nous n’avons pas cru que Dieu voulait un cœur-à-cœur avec nous. Nous n’avons pas accepté que Dieu place une limite entre Lui et nous, qui pourtant garantissait notre identité. Nous avons considéré cet amour comme une prison. Notre liberté est devenue le lieu même de notre péché. Un fossé nous sépare désormais de Dieu.
Depuis ce jour fatidique, l’humanité est traversée non seulement par une puissance de vie, de croissance et d’amour, mais également par une sinistre puissance de mort, de destruction et de haine. Et tour à tour, nous subissons le mal régulièrement, et nous le propageons allègrement. Soyons honnêtes : le mal a autorité sur nous !
Mes amis, imaginez la personne que vous aimez le plus au monde. Imaginez que cette personne se fasse assassiner. Seriez-vous d’accord que son meurtrier échappe à toute justice, à toute sentence sous prétexte qu’il vient en aide aux plus démunis, qu’il soutient financièrement les pauvres en Afrique, qu’il est d’une gentillesse et d’une politesse remarquable sur son lieu de travail et dans son entourage ? Non ! Et il en va de même pour nous. Nous faisons certainement de notre mieux, mais Dieu ne tiendra jamais le coupable pour innocent et l’innocent pour coupable.
C’est là que le dogme de la Trinité devient source de foi et d’émerveillement pour nous. Dieu a décidé que tout être humain qui prend conscience du mal qui régit sa vie, qui prend conscience que rien de positif dans sa vie ne pourra contrebalancer le mal subi et commis, qu’aucune circonstance atténuante, qu’aucune bonne action ne pourra satisfaire la justice divine, cet être humain-là peut trouver la réconciliation avec Dieu. Comment ? Par le sacrifice de Jésus-Christ.
Dieu a décidé qu’un homme subirait la sentence à la place de tous les autres. Cet homme s’appelle Jésus. Mais si ce n’était qu’un homme, même volontaire, ce serait tout simplement ignoble. Chaque être humain a tellement de valeur aux yeux de Dieu ; comment Dieu pourrait-il faire payer à un les fautes de tous les autres ? Cet homme-là n’aurait-il aucune valeur aux yeux de Dieu ? Non. Au nom de l’amour incommensurable et inconditionnel que Dieu porte à l’être humain, on ne peut pas croire que Jésus ne fut qu’un homme. Comme le dit Paul en Romains 9.5 ou en Tite 2.13, Jésus n’est pas qu’un homme, Il est Dieu, notre grand Dieu qui par amour pour nous décide de subir la sentence qui était sensée nous revenir.
Le dogme de la Trinité affirme que l’amour incommensurable et inconditionnel de Dieu pour le genre humain est tel que seul Dieu pouvait subir la sentence et la condamnation que méritent nos fautes. Croire en la Trinité, c’est croire que Dieu Père descend jusqu’à nous pour nous pardonner par le sacrifice de Dieu Fils en Jésus-Christ. A la croix, l’amour inconditionnel de Dieu nous appelle : je t’aime tel que tu es, avec tes forces et tes faiblesses, avec tes réussites mais aussi tes échecs, je t’aime malgré toutes tes fautes ; vas-tu revenir à moi ? Veux-tu encore entrer dans ce cœur-à-cœur, ce vis-à-vis, ce face-à-face que j’aimerais avoir avec toi ? Veux-tu découvrir l’incommensurable grandeur de mon amour inconditionnel pour toi et goûter combien ton Dieu est bon ?
Chers amis, chers auditeurs, aujourd’hui, cela est encore possible : reconnaissons nos fautes, admettons qu’aucune de nos bonnes actions ne contrebalancera jamais le poids de nos mauvaises, ne nous satisfaisons pas d’imaginer que « faire au mieux » suffira aux yeux de Dieu, humilions-nous, changeons notre regard, convertissons notre façon de penser et de faire, puis regardons à la croix : là, l’amour de Dieu est pendu au bois et susurre à notre oreille : oui, je t’aime et je t’ai pardonné !
Et pour porter un comble à son amour incommensurable et inconditionnel pour nous, Dieu Père et Dieu Fils se proposent d’établir leur résidence en nous. Dieu veut faire de nous sa demeure, son Temple. Il veut inscrire sa Loi dans notre cœur. Il veut doucement mais résolument diriger nos pensées, nos réflexions, nos perceptions, nos décisions, nos actes et nos paroles selon sa Loi d’amour. C’est pour cela que Dieu Père et Dieu Fils nous envoie Dieu Saint-Esprit : pour ne pas nous laisser seuls dans ce combat permanent contre la sinistre puissance de mort, de destruction et de haine qui sévit encore dans ce monde et dans nos vies.
Au nom de l’amour incommensurable et inconditionnel de Dieu pour nous, nous restons libres d’accepter ou non cette présence de Dieu en nous, nous sommes libres de nous opposer à son autorité en nous, nous sommes libres de museler l’Esprit-Saint. Mais nous sommes libres aussi de L’accueillir, de L’écouter et de nous y soumettre : je suis convaincu que c’est en nous soumettant à la volonté de Dieu, celle qui nous est transmise par l’Esprit Saint qui habite en nous, je suis convaincu que c’est là que se trouve le véritable sens à notre vie sur cette terre. Je suis convaincu qu’en nous soumettant à Dieu, nous pouvons poursuivre l’œuvre de création de Dieu Père dans ce monde, propager l’œuvre de salut de Dieu Fils à tout homme et toute femme, accomplir l’œuvre de consolation et de vérité de Dieu Esprit-Saint autour de nous. Cette vie-là, par l’autorité et la puissance de Dieu, est certainement la seule qui vaut vraiment la peine d’être vécue.
La Trinité est et restera toujours un mystère. Mais la Bible lève un coin de voile. Et ce qu’elle révèle est juste magnifique : nous y découvrons que le grand Dieu, créateur du Ciel et de la terre a créé l’ensemble de cet univers en pensant à nous et pour nous ; nous y découvrons que le grand Dieu, parce qu’il aime tellement les êtres humains, a lui-même pris forme humaine pour payer dans sa chair le prix de nos fautes ; nous y découvrons que le grand Dieu veut élire domicile en chacun de nous pour nous soutenir, nous conduire, nous consoler et nous relever ; nous y découvrons que notre grand Dieu Tout-Puissant porte à chacun d’entre nous un amour incommensurable et inconditionnel.
Amen.