Écouter le culte :
Esther Berger
Avec Ilham et Justine nous avons partagé autour de ces deux textes pour préparer cette prédication. Nous entendrons une partie de ce que cela a révélé en elles.
Je vous l’ai dit, nous voilà avec deux textes dont la compréhension n’est pas immédiate. Selon Paul nous sommes héritiers. Être héritier n’implique aucun mérite, il n’y a rien à faire, si ce n’est accepter l’héritage. En entendant ce mot, nous pensons à recevoir quelque chose en possession. Mais être héritier a une autre dimension, celle de se retrouver dans une communauté de partage. Et c’est sur ce point que Paul vient mettre la lumière.
Il insiste en reprenant le mot, avec la précision « cohéritier ». Il est vrai que souvent, en entendant le mot héritage, nous pensons à un avoir, à une richesse. Un héritage, c’est quelque chose de tangible qui vient ajouter un plus à notre quotidien. Mais ce dont Paul parle, c’est d’être dans une même réalité avec d’autres.
Se découvrir dans une même réalité avec d'autres ne va pas de soi. Ce n’est pas toujours facile de se sentir suffisamment en confiance pour dire sa réalité et il faut une bonne occasion de le faire.
Ilham Voirol
Durant l’année de KT, avec les autres, nous avons eu l’occasion de partager nos histoires, notre compréhension des textes bibliques, mais aussi ce que nous pensons de Dieu et de la foi.
Face à la diversité des opinions il n’était pas toujours possible d’être d’accord avec ce qui était dit. Mais en faisant l’effort de bien écouter et d’être honnête et bienveillant, ces échanges ont permis à chacun de trouver quelque chose qui lui a permis d’avancer.
Chaque réponse à une question amenait une autre question. Mais au final, ce sont ces questions qui permettent d’approfondir la relation à Dieu.
Esther Berger
Il est vrai que dans le parcours catéchétique, nous essayons toujours de laisser la place aux questions et de ne pas enfermer les autres dans une façon de croire ou de dire Dieu.
Lorsque nous reconnaissons que nous n’avons pas toutes les réponses, nous acceptons de cheminer ensemble. Nous nous découvrons ainsi dans une même réalité.
C’est le cas lorsqu’on se retrouve dans une activité commune. Mais nous pouvons aussi le vivre dans différentes circonstances de nos quotidiens. Dans les circonstances qui ont été les nôtres durant l’année de catéchisme, nous avons essayé de partager autant nos convictions que nos questions.
Justine Hirt
En même temps, lorsque l’on peut partager ses doutes, on peut aussi avancer des hypothèses et des affirmations de foi.
Dans ce texte de la lettre aux Romains, j’entends que c’est le témoignage de l’Esprit de Dieu qui parle à notre esprit et nous permet de nous sentir enfants de Dieu. Nous nous découvrons des frères et sœurs, nous partageons des moments de joie, de jeux, des temps de réflexion ou de méditation.
Personnellement je pense au camp de KT au Barboux. Là, j’ai découvert qu’être entourée de personnes qui partagent la même foi en Dieu, ou Jésus Christ, est une bonne chose. Lorsque nous acceptons de reconnaitre en l’autre un compagnon de route qui peut partager nos expériences de vie, qui lui aussi est capable de reconnaître ce que je vis, c’est rassurant.
Esther
Oui, il est rassurant de constater que l’on n’est pas seul ! C’est certainement le vécu des dix hommes dont l’évangéliste Luc nous parle.
Voilà dix hommes qui partagent un même destin, une même réalité, oh combien difficile !
Ils vivent l'exclusion. Aux yeux de la société, ils sont malades et contagieux : à éviter à tout prix. Aux yeux des personnes religieuses, de leurs coreligionnaires, ils sont impurs : infréquentables.
Et ces dix hommes, ensemble, vont à la rencontre de Jésus. Ils viennent aussi près que possible, et crient pour que Jésus les entende. Comme un seul homme, ils demandent : « Jésus, maître, prends pitié de nous ! »
Jésus a fait des choses incroyables : changé de l’eau en vin, guéri des malades, même ressuscité des morts. Il nous semble évident que Jésus va les guérir. Mais voilà, Jésus n'est pas là où on l'attend.
Au lieu de prononcer une formule magique, ou de leur imposer les mains, ou bien de faire quelque chose, il leur donne un ordre : « Allez, vous montrer aux prêtres. »
Il leur indique un chemin à suivre, un but à atteindre. Ce but au moment où ils se mettent en route n’a pas de sens, ce chemin n’a pas de raison d’être. En effet, ces dix hommes sont malades. Et ils le sont toujours au moment où Jésus les envoie se montrer au prêtre, et au moment où ils se mettent en route.
Il n’est pas surprenant d’aller se présenter aux prêtres pour faire valider le fait que la maladie, la raison de l’impureté et de l’exclusion, est levée. Les prêtres sont les seuls à avoir l’autorité pour reconnaître que des lépreux sont purifiés.
Les dix hommes marchent ensemble sur un chemin : un chemin qui les a menés vers Jésus, puis un chemin qui est censé les mener vers les autorités capables de les reconnaître purifiés.
Ils se mettent en marche pour là où on ne les attend pas – en tous cas pas encore – puisqu’ils ne sont pas guéris. En prenant ce chemin qui les mène vers les prêtres, ils sont déjà sur un chemin de foi. Ils croient qu'ils sont guéris et qu'ils peuvent se rendre auprès des prêtres pour que leur guérison soit reconnue.
En obéissant à l’injonction de Jésus, les dix hommes font déjà preuve de foi. Ils réagissent à l’action de Jésus en se mettant en chemin : ils sont purifiés. L’un d’eux revient vers Jésus ! Et les autres ? Le doute reste permis.
Il faut savoir que le rituel prescrit en cas de guérison de la lèpre (dans l’Ancien Testament) dure plus de huit jours. Cela pourrait expliquer que les dix hommes ne reviennent pas immédiatement vers Jésus.
Nous ne savons ce qu’ils font. Peut-être réagissent-ils selon ce qu’on attend d’eux ? Peut-être retrouvent-ils leurs vies d’avant ? Selon la personne qui analyse leurs comportements, ils ne sont pas où on les attend ou là où ils doivent être.
Il en va de même pour nous aujourd’hui ! Nous réagissons aux événements de la vie, y compris à la présence et l’action de Dieu en fonction de notre histoire, de notre éducation.
Il nous arrive d’avoir des attentes par rapport aux autres.
On attend de l'Église qu'elle soit présente, qu'elle affirme, qu'elle nous donne les directions pour notre vie. Mais n'oublions pas que l'Église visible n'est, entre guillemets, qu’une institution.
On attend des chrétiens qu'ils soient exemplaires. Mais n'oublions pas que nous avons beau être chrétiens, nous ne sommes qu’humains.
On attend des autres qu'ils soient « où on les attend » et cette attente est bien souvent une attente personnelle basée sur notre compréhension des choses.
Avec ce récit des dix lépreux, mais aussi avec le texte de l'apôtre Paul, nous découvrons que nous sommes ensemble en chemin. Et que le seul endroit où nous pouvons attendre l'autre, c'est là où nous acceptons de le rencontrer et de cheminer avec lui. De porter ensemble nos difficultés, d'avoir conscience que nous partageons un même chemin, une même progression.
Ilham
Dans ce que j’ai découvert, en particulier pendant le camp, il y a le fait que d’avancer avec d’autres m’aide à clarifier mes questions et à trouver des réponses. C’est ce qui m’a permis de voir ce qu’était la joie d’avoir Dieu dans sa vie. Pour finir j’ai consolidé ma relation avec Dieu. Grâce aux réponses apportées, j’ai grandi et appris.
Esther
Se savoir en route ensemble, accepter de dire à l’autre ses questions, sa façon de croire et même de ne pas croire, cela aide à clarifier ses idées et cela encourage à creuser les questions, à ne pas rester figé dans nos certitudes. Il arrive même que l’expérience change quelque chose à nos vies.
Justine
J’ai réussi cette année à mettre Dieu dans une grande partie de ma vie, à le voir là où il est présent. Tout ce que j’ai fait cette année m’a donnée envie d’apprendre plus de choses sur Dieu et avec Dieu.
Esther
« Où sont-ils ? » Que cette question concerne les autres ou Dieu, si nous pouvons y apporter une réponse, c’est que nous avons accepté la rencontre. Et donc la seule réponse que nous puissions avoir, c'est là où j'accepte moi de les rencontrer. Au croisement de nos chemins, dans la vie de tous les jours, dans un culte… Peu importe !
Laissons-nous surprendre en acceptant de voir l’autre où il est, et non là où « mon éducation, ma foi, ma compréhension de sa vie » voudrait qu’il se trouve ! Nous pouvons découvrir l’autre à nos côtés, partageant une même richesse ou une même difficulté, et vivre ensemble un même bout de chemin.
Amen.