Ah, les odeurs et les parfums qui envahissent nos maisons dès le début de l'Avent. Ces goûts et ces saveurs qui viennent réchauffer notre cœur et notre bouche. Les épices de Noël. le genièvre dans le vin chaud, les épices un peu poivrées du thé de Noël, l'anis, l'anis étoilé. Tiens, il y a même une épice en forme d'étoile; elle sent bon, fort, c'est très typé. Cette odeur d'anis, elle est unique; l'étoile que les mages ont suivie en ce temps-là, elle était aussi unique. Il y avait sûrement toutes sortes de parfums dans cette nuit-là, se mêlant à ceux que les mages portaient. Avec ces parfums épicés ou étoilés, la fin de l'Avent sent très bon, ce matin.
Dans nos paroisses ici, nous avons une tradition, c'est de donner la parole à l'assemblée présente. Je vais très bientôt vous inviter à évoquer vos souvenirs autour d'une épice. On va mettre ensemble quelques images, quelques souvenirs. Vous voilà tous prévenus !
Ce matin, votre nez a peut-être frémi en entrant ici: ça fleure bon la cannelle. Cette épice délicieuse, savoureuse, porte un nom latin qui sonne bien : cinamommum zeylanicum. Et puis, comme son nom l'indique, elle vient principalement de l'île de Ceylan. La cannelle, c'est l'écorce d'un arbre de 5 à 7 mètres de haut. Ce ne sont pas directement des petits bâtons comme au magasin. En plus, ça fait déjà des siècles et des siècles qu'elle voyage, en Orient, puis en Europe. Elle apparaît dans l'Ancien Testament, avec un statut très important: : le Seigneur lui-même ordonne à Moïse d'utiliser de la cannelle pour les huiles précieuses.
Dans le livre de l'Apocalypse, la cannelle est citée à côté de l'encens et de la myrrhe qui nous ramènent tout droit à l'histoire des mages. Rien qu'en prononçant le mot cannelle, on en sent presque l'odeur et le goût. Mais laissons-nous emporter un peu par ces effluves. Laissez-vous glisser dans votre mémoire, et puis racontez, que nous puissions partager cette bonne odeur et ce bon goût. Dites-moi, vous imaginez de la cannelle à quel endroit, dans quel aliment, à quelle époque de votre vie?
Chers auditeurs, les parfums d'épices ne glissent pas sur les ondes, mais nous vous avons offert ces souvenirs savoureux, à vous qui connaissez bien la richesse de l'arôme de cannelle. Un petit air gourmand en commun nous réunit ce matin, non ? C'est étonnant comme une odeur ou une saveur peut nous marquer. Comme ça nous renvoie vite à un événement précis. La mémoire des odeurs, ça compte ! Et puis c'est clair la cannelle fait partie des ingrédients de l'Avent et de Noël. Je n'imagine même pas préparer un Noël sans goût, sans odeur…
C'est vrai, Noël, ça sent bon ! C'est tout plein de bonnes choses à manger. Même trop, si on se laisse aller. Goût d'épices, goûts sucrés et salés. Et puis les odeurs de sapin, celle du soufre des soleils, ces étoiles filantes qu'on allume aux branches. En fait, on ne prépare pas seulement Noël pour les yeux et les oreilles. Il ne s'agit pas seulement de lumière et de musique, ni de belles paroles.
Non non, moi, je pense que Noël, ça se mange ! Et que la période de l'Avent sert à se réjouir de manger Noël. Et puis Noël, on le respire, on capte ses arômes et on les savoure, on les garde précieusement en soi. Souvent, nous nous en rendons moins compte de cet aspect-là. Parce que nous croyons retenir seulement des mots, des notes de musique, la vision d'un sapin tout décoré, des lumières. Mais nous l'avons entendu tout à l'heure, que de bonnes choses à manger dans nos mémoires, dans nos envies d'enfants et d'adultes.
Noël, c'est l'amour de Dieu qui vient au monde, là, sous l'étoile de Bethléem, dans la crèche. C'est un cadeau pour le monde, tellement fou, impossible à comprendre vraiment. En tout cas pas avec notre tête : nous avons besoin de tous nos sens, et le goût, et l'odorat. Les trois rois étrangers suivent une étoile parce qu'elle leur dessine ce cadeau dans le ciel. Lorsqu'ils arrivent, ils trouvent un Enfant. Et ils croient que c'est lui, le roi, le cadeau de Dieu au monde. Elan irrésistible de foi. Mais il n'y a rien à comprendre, il ne reste qu'à ressentir, à respirer, à s'imprégner.
L'amour de Dieu ne se comprend pas, il se mange. Il est nourriture, pas pour la tête et les raisonnements. Nourriture pour le corps. A mâcher longtemps, soigneusement, pour qu'il descende tout au fond de nous. Pour qu'il nourrisse notre vie. Eh oui, Noël, c'est l'amour de Dieu venu au monde. Donc, Noël, ça se déguste, lentement, et pour une fois, sans modération. Parce que ça n'a pas de fin, c'est pour nourrir tous les jours d'une vie.
L'histoire des trois rois et de leur marche à l'étoile a comme un parfum oriental, elle fleure bon les mystères de là-bas. Et il y a cette délicieuse, chaude et riche odeur de cannelle qui vient d'Orient: elle donne à nos Noëls un peu de leur saveur au fil de nos souvenirs.
Et si nous préparions, chacun à notre manière, chez moi, chez vous, paroissiens et auditeurs, un Noël qui se mange ? Pour mâcher lentement, en prenant notre temps, une présence qui vient donner des forces et de la chaleur à notre être tout entier, comme un plat épicé juste à souhait, ni trop, ni trop peu.
Et puisque nous suivons l'étoile, pourquoi pas, osons imaginer que nous captons la présence de Dieu dans une étoile à la cannelle !