Aujourd'hui j'ai choisi la parabole de Jotham, la parabole des arbres pour commencer notre série de prédications. La parabole, peut-être que vous ne la connaissez pas ! Vous êtes peut-être même surpris qu'il y ait des paraboles dans l'Ancien Testament et pourtant c'est exactement le mot que la Septante (version grecque et très ancienne de l'AT) utilise en parlant de cette histoire : l'histoire des arbres qui décident de choisir un roi quand visiblement ils n'en ont pas besoin ; les arbres qui décident de choisir un pouvoir, une puissance quand ils n'en pas besoin.
Et après 3'000 ans, cette parabole résonne comme une parabole contre le pouvoir, contre l'injustice, contre la corruption du pouvoir, le pouvoir et la violence, utiliser les uns contre les autres depuis le début de l'humanité. Des paraboles, il y en un certain nombre dans les Ecritures, pas seulement celles de Jésus, mais aussi paraboles des rabbins, mais encore paraboles de Platon, de Socrate et surtout d'Aristote qui a recommandé cette méthode d'enseignement. Mais ici nous avons l'histoire de Jotham, l'épouvantable histoire de Jotham, qui ressemble plutôt aux histoires d'Hérodote qu'à celles de l'Ancien Testament parce que c'est au sujet de Jotham, garçon qui vient d'une famille massacrée par un demi-frère, qui arrive à donner une prophétie d'un rocher sur le mont Garizim, au-dessus de la ville de Sichem et qui utilise la parabole pour expliquer leur culpabilité et les dangers qui guettent les habitants. Et en fin de compte à la fin du chapitre 9, que se passe-t-il, la prophétie de Jotham se réalise !
Que s'est-il passé ? Jotham est un fils de Gédéon. Gédéon vous le connaissez : il avait régné 40 ans. Maintenant il est mort, âgé et paisible. Il n'était pas question d'hérédité, il n'y avait pas de monarchie. Les gens en temps de guerre choisissaient leurs chefs et parmi la descendance de Gédéon, il y avait des ambitieux, et le plus ambitieux de tous était un certain Abimélec, un demi-frère des autres fils de Gédéon et d'une concubine venant de Sichem. Après la mort de Gédéon, il massacre toute la famille de Gédéon, sauf Jotham qui s'est caché et a pu ainsi s'échapper.
Mais puisqu'Abimélec a massacré sa propre famille avec l'aide des gens de Sichem, Jotham prononce une parabole que le peuple de Sichem a pu entendre haut et clair : les gens de Sichem ont décidé de choisir un roi, Abimélec et ils n'en pas besoin. Et ce que Jotham est en train de souligner à la fin de la parabole c'est le danger de leurs actes pour le peuple de Sichem et pour Abimélec lui-même. Il dit dans la dernière phrase : "Si vous voulez vraiment me choisir comme roi venez vous placer sous mon ombre", or il n'y a pas d'ombre de la part des ronces, pas d'ombre qui en vaille la peine en tous cas. Ce qui veut dire que la protection du peuple de Sichem par Abimélec est complètement illusoire ! Et puis " si vous ne le faites pas, qu'un feu jaillisse de mes épines et brûle même les cèdres du Liban " qu'est-ce que cela signifie : c'est comme pour n'importe quel incendie d'une forêt mal entretenue en saison de sécheresse, le feu dans les ronces s'étend à toute la forêt, vous le voyez chaque année dans les régions de la Méditerranée.
Si les habitants de Sichem sont vraiment fidèles à Abimélec, leur partenaire dans le crime et dans le massacre de sa propre famille, la protection de celui-ci n'est pas du tout sérieuse. Et si les habitants de Sichem ne sont pas loyaux envers Abimélec, il va causer leur ruine. Et que va-t-il se passer en fin de compte, je vous épargne les détails. Lisez-les pour vous-mêmes au chapitre 9 du Livre des Juges, c'est très édifiant. Sichem est pris et massacré par Abimélec et ses amis, Abimélec essaie d'étendre son pouvoir plus loin et que se passe-t-il : il se fait tuer ! Alors cette mauvaise action des gens de Sichem et d'Abimélec est fatale à tous les acteurs en place ; ce pouvoir qu'il n'aurait jamais dû chercher, le pouvoir que les gens de Sichem n'auraient jamais dû encourager, soutenir, tout cela était tellement vraiment mauvais. La parabole de Jotham vient en guise d'avertissement : ce n'est pas l'olivier, ce n'est pas la vigne, ce n'est pas le figuier, mais ce sont les ronces qui constituent le danger.
Et pour la 2e tentation, Jésus se fait montrer tous les royaumes du monde, toute la richesse, le pouvoir, la puissance, la tentation de tous les dictateurs. Et Jésus est tenté ! Quelle tentation de régner sur tout le monde, tous les pays, tous les peuples, tous les continents. Jésus refuse en utilisant une phrase que l'on trouve à deux reprises dans le Deutéronome aux chapitres 6 et 10 : " L'écriture déclare : " Adore le Seigneur, ton Dieu et sers-le, lui seul. " Voilà résumé le but de l'humanité. C'est la seule ambition légitime de l'homme, ce n'est pas de régner sur les autres, de les dominer. C'est ce qu'avait compris Jotham, c'est ce qu'avait compris Jésus : le pouvoir corrompt. Si on recherche le pouvoir, on devient corrompu. Je ne parle pas de toutes les formes de pouvoir, pouvoir bien dilué dans une démocratie comme la nôtre, je parle du pouvoir dans l'état, dans la religion, dans la sexualité, dans les entreprises, entre les membres d'une même famille : le pouvoir qui n'était pas nécessaire pour Sichem ou Abimélec les a ruinés les deux. Si Jésus avait succombé à la tentation du pouvoir, le pouvoir aurait ruiné la mission sur terre de notre Seigneur Jésus-Christ. Le pouvoir corrompt. Jotham le savait, Jésus le savait, mais nous, nous devons l'apprendre chaque jour dans la vie privée, dans la vie économique, dans la société civile, dans les institutions ecclésiastiques, le pouvoir corrompt.
Les gens ne sont pas nés mauvais, mais ils se laissent détourner par les événements de la vie et par leurs propres ambitions. Vous voyez cela tous les jours, le pouvoir utilisé comme moyen de violence par des gens qui ne sont pas autrement intéressants. Pourquoi les talibans sont-ils en train de démolir les statues des Bouddhas ? Pour montrer leur puissance. Pourquoi ont-ils voilé les femmes ? Pour montrer leur pouvoir sur les femmes. Ces gens doivent être parmi les plus limités sur la surface de la Terre et les moins intéressants à part leurs kalachnikovs, mais le pouvoir leur tente.
Manifestation de pouvoir, manifestation terroriste, il y en a beaucoup en ce moment. Dans mon passé, j'ai connu beaucoup de terroristes, surtout des femmes. Et qu'est-ce qu'on s'imagine : les poseurs de bombe, les assassins, est-ce qu'on les trouve sexy, excitants ? Pas du tout, ce sont des gens banals et sans intérêt, et c'est souvent ce genre de personnes qui recherchent le pouvoir, parce qu'elles sont mal dans leur peau, parce qu'elles n'ont pas d'autres possibilités de se manifester dans la vie et qu'elles n'ont pas compris que le but de l'humanité comme Jésus disait est de servir Dieu et lui seul.
Et dans les affaires sexuelles, qu'en est-il? Des histoires de pouvoir. Il me semble que la prostitution n'est qu'un symbole de pouvoir, du mâle sur la femelle et que le viol c'est une forme de pouvoir à peine sexuel, c'est une haine pour la femme. L'homme qui a peut-être peur de la femme et veut montrer qu'il est plus fort, que fait-il ? Il attaque, il utilise un pouvoir. Cela fonctionne de la même façon pour les pédophiles : ils ne sont pas attirés par les enfants. Ce sont des gens qui détestent les enfants et qui pensent que les enfants doivent être punis. Prostitution, pédophilie sont autant de formes différentes d'exercer un certain pouvoir.
Ceci est valable à tant de niveaux de la vie humaine. Jésus l'a bien compris. Il a rejeté le pouvoir sous forme de violence pour dominer les autres. Pourtant il vient simplement, doucement, pour nous interpeller et pour nous demander de changer de conduite. Et puis Jotham, Sichem, Abimélec, les criminels qui pensaient que le pouvoir méritait un massacre, ils sont tombés sous le coup du jugement divin.
Mais je crois que les gens ne sont pas mauvais depuis le début ; ils se laissent détourner par les événements de la vie et deviennent mauvais. Il y a dans beaucoup de théologie une idée de péché originel. Personnellement je n'y crois pas, il n'y a aucun fondement biblique à cette doctrine. C'est une doctrine qui se base sur quelques versets bibliques épars, mais devient typique de l'église chrétienne entre le 4e et le 13e siècles. Cela arrange très bien une église institutionnelle et patriarcale pour exercer un pouvoir - un faux pouvoir - comme institution capable d'accorder le pardon aux gens. Je le répète l'idée du péché originel n'est pas biblique : les hommes ne naissent pas mauvais, mais ils le deviennent par leur capacité d'être corrompus par leur pouvoir de manipuler les gens autour d'eux et par les événements de la vie.
Si on est pécheur et on l'est, ce n'est ni à cause du péché originel ni à cause du diable, mais c'est à cause de notre incapacité à contrôler nos propres désirs et nos enfers. Croyez-moi : regardez autour de vous : les enfers, ce n'est pas un endroit sous la terre, l'enfer c'est ici, c'est avec les gens qui crèvent du sida, c'est avec les gens qui sont pris dans les massacres, ce sont les enfants qui ont marché sur les mines, l'enfer est ici. Et Jésus nous demande de changer de comportement . Et nous sommes appelés à choisir entre le bien et le mal, entre Jésus et le monde. Nous n'échapperons pas à notre responsabilité.
Quelle est la conclusion de cette parabole des arbres ? A Sichem, pendant 2 ou 3 ans peut-être, ils se sont réjouis parce qu'ils ont aidé Abimélec à commettre un massacre, mais leur protection était une illusion, parce qu'il les a massacrés eux aussi. Et lui, son pouvoir, sa puissance était aussi illusoire parce qu'il s'est fait tuer très peu de temps après la prise de Sichem. Alors la tentation du pouvoir et sa corruption, c'est une évidence, mais Jésus résiste et nous encourage à résister nous aussi, à changer de comportement, à demander pardon pour ce que nous avons déjà fait. Le pardon est là, gratuit et total. Et c'est précisément parce que le pardon est gratuit et total, qu'il nous est difficile de l'accepter. C'est parce que nous n'avons pas l'habitude de choses gratuites dans notre monde. Que devons-nous faire ? Suivre Jésus, plutôt que de suivre nos propres désirs et nos propres ambitions et de se fier - en nous souvenant de la parabole des arbres - sur cette citation que Jésus utilise à la fin de sa 2e tentation : "Adore le Seigneur, ton Dieu et sers-le, lui seul." Là et là seulement est notre espoir ; notre espoir est de suivre Jésus dans nos actes, dans nos pensées et dans nos paroles.
Amen !